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L'animation japonaise est célèbre pour ses intrigues inhabituelles, ses visuels vivants et son ironie sur les sujets d'actualité et les stéréotypes. La Russie est mystérieuse pour les Japonais et c'est pourquoi les artistes, les réalisateurs et les scénaristes essaient de démêler notre culture et notre vie. En Occident, il existe une certaine image de l'homme russe – caractère sévère, amour de la vodka et du borchtch, résistance au froid. Mais comment les personnages d'origine russe sont-ils représentés dans les animes ?
La Russie comme héros
La quintessence de l'image du personnage russe dans l'anime est la Russie, ou Ivan Braginski, de Hetalia : Axis Powers (2009). La série dépeint de manière allégorique les événements historiques et politiques de la Seconde Guerre mondiale. Les personnages principaux sont les pays de l'Axe (Japon, Allemagne, Italie – pays de la coalition d'Hitler) et les forces alliées (Russie, États-Unis, Angleterre, France et Chine). Chaque État est représenté par un personnage distinct.
La Russie est un type gentil et joyeux, le plus grand du groupe allié. La Russie semble amicale et apprécie même la possibilité de rencontrer à nouveau ses alliés, mais elle souffre d'une maladie mentale due à une histoire sanglante et troublée. Elle a également deux sœurs, l'Ukraine et la Biélorussie. Cependant, la première a quitté son frère à cause de ses amis européens, et la seconde veut l'épouser de façon maniaque. D'autres pays ont peur de lui, notamment la Lettonie, la Lituanie et l'Estonie. Braginski croit qu'un jour tous les pays du monde s'uniront à la Russie.
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Personnalités historiques
Dans les animes, les Japonais montrent des personnages historiques célèbres – Staline, Raspoutine, Poutine. Cependant, il s'agit le plus souvent d'images épisodiques. Dans le long-métrage d'animation Lupin III : Le secret de Mamo (1978), Lupin rencontre la créature immortelle Mamo. Cette dernière lui raconte sa vie, au cours de laquelle elle a rencontré de nombreuses personnalités historiques et a assisté à des événements importants. Son histoire est illustrée sur de grands écrans et l’on peut y voir Staline ainsi que Karl Marx et Lénine.
L'image du mystique Grigori Raspoutine, ami de la dernière famille impériale, est montrée dans un autre film de cette série comme un modèle pour ses descendants, qui jouent ici les antagonistes. Le Raspoutine de Lupin III : From Russia With Love (1992) est une copie exacte de son grand-père. Il peut lire les pensées des gens et prédire leur avenir. Grâce à cela, il a de nombreux adeptes dans le monde entier, et les célèbres politiciens Gorbatchev et George Bush se tournent vers lui pour obtenir de l'aide. Le jeune Raspoutine est à la recherche de l'or de Nicolas II, prétendument laissé par le tsar après sa fuite à l'étranger (bien sûr, tous ces événements sont loin d'être réels). Il a l'étrange habitude de communiquer avec les autres en leur mettant un doigt dans la bouche, le nez ou les oreilles. Comme un méchant classique, il vit dans un énorme château gothique dans le petit village sibérien de Kossak (faut-il préciser qu'il n'y a pas de châteaux dans les villages russes et qu'il n'y en a jamais eu, sans parler du style gothique).
Dans l'anime Cristal Triangle (1987), le professeur Koichiro Kamishiro, qui possède un artefact donnant un pouvoir incroyable, est embêté par le petit-fils de Raspoutine, membre du KGB. Ce dernier aime tirer avec un lance-grenades antichar portatif et, dans les moments solennels ou dramatiques, il se tourne vers son grand-père en parlant dans un russe plus que bancal.
Dans l'anime Dumbbell nan-Kilo moteru? (aussi connu sous le titre How heavy are the dumbbells you lift) (2019), Gina Boyd, une étudiante russe, présente Poutine à ses camarades de classe japonais. Il est à moitié nu, musclé et étreint un ours brun sur un fond de montagnes enneigées. Gina cite aussi le président : « Comme le dit notre grand leader, le camarade Poutine, il faut simplement faire de son mieux ! ». En fait, Poutine n'a jamais prononcé de telles paroles, du moins pas en public.
Le film d'animation Bakumatsu no Spasibo (1997) montre quant à lui un événement historique important dans l'histoire de la Russie et du Japon – la signature du traité de Simodsk en 1855, le premier accord diplomatique entre les deux pays. Grâce à lui, des relations commerciales entre l'Empire russe et le Japon ont été établies. Malgré l'authenticité historique générale, les clichés sont aussi présents – les marins russes de la frégate Diana boivent de la vodka et dansent la kalinka-malinka. Cependant, ils se montrent de bonne nature et amicaux, et l'ambassadeur russe, l'amiral Evfimi Poutiatine, s’avère un marin et un diplomate avisé.
Les Japonais ont également mentionné des écrivains russes dans leurs animes. La série Bungo Stray Dogs (2019) raconte ainsi l'histoire de personnes dotées de superpouvoirs et les utilisant pour faire des affaires ou établir la justice. Au cœur de l'histoire se trouve celle de l'Agence des Détectives Armés, qui s'oppose à des groupes de malfaiteurs et enquête sur des crimes. La plupart des personnages portent les noms d'écrivains et de poètes célèbres. Le personnage Fiodor Dostoïevski est le chef de l'organisation clandestine des « Rats dans la maison des morts » (référence à l'ouvrage de l'écrivain russe du même nom Souvenirs de la maison des morts). Il dispose d'un superpouvoir « Crime et Châtiment ». On ne sait pas exactement de quoi il s'agit, mais les fans de la série supposent qu'un homme peut mourir d'un simple toucher de Dostoïevski. Il réfléchit à la nature pécheresse de l'homme et a de fortes convictions religieuses.
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L'image de l'URSS
L'URSS est souvent devenue un lieu d'action dans les animes. La franchise Lupin III (1977-1981) raconte par exemple les aventures de l'arnaqueur Lupin. Dans l’épisode 58, il décide de voler un diamant à la ballerine russe Monica. En arrivant en URSS, le protagoniste voit un pays où les policiers sont partout, prêts à tirer sur les espions des pays capitalistes.
L'URSS a également été présentée comme une force politique qui a joué un rôle décisif dans l'histoire de l'humanité. Dans l'anime Blue Comet SPT Layzner (1985), la « guerre froide » entre l'URSS et les États-Unis se poursuit. Les hommes commencent à explorer la galaxie et ont déjà construit des bases sur la Lune et sur Mars. Cependant, la race extraterrestre Gradosiens n’apprécie pas cela et décide d’exciter les deux superpuissances l’une contre l’autre pour mieux conquérir la Terre sans pertes.
Enfin, les Japonais ont montré dans les animes non seulement des images déprimantes de l'URSS totalitaire, mais aussi des personnages soviétiques positifs. L'anime Gunbuster (1988-1989) raconte ainsi la lutte de l'humanité contre des extraterrestres ressemblant à des insectes et venus depuis l'espace. Jung Freud, l'une des protagonistes, est une jeune pilote soviétique. Elle pilote un robot de combat avec une faucille et un marteau. Elle a grandi dans une colonie sur la Lune et a un caractère explosif, c'est pourquoi elle est constamment en conflit avec les autres filles pilotes. Avec le temps, elle se rapproche cependant d'elles et devient leur meilleure amie.
Après l'effondrement de l'Union soviétique : anciens membres du KGB et mafia
À partir des années 90, dans les mangas et animes ont commencé à faire leur apparition des personnages russes ayant quitté leur pays après l'effondrement de l'URSS et trouvé de nouveaux emplois à l'étranger. Le plus souvent, ce sont d'anciens agents du KGB soviétique, des forces spéciales et des vétérans de la guerre d'Afghanistan. « Blanca », de son vrai nom Sergei Varishkov, de l'adaptation cinématographique du manga des années 90 Banana Fish (2019), est un ancien lieutenant du KGB qui a déserté après le meurtre de sa femme. En conséquence, il est devenu un tueur professionnel et a pris le surnom de « Blanca » en mémoire à son épouse, qui était originaire de Biélorussie. Varishkov devient le mentor du personnage principal de l'anime, Ash Lynx, et apprend au jeune homme tout ce qu'il sait.
De son côté, l'anime Gunsmith Cats (1995) met en scène Nastasiya Rodionova – ancien capitaine des forces spéciales de l'URSS qui, après l'effondrement de l'Union, est devenue une combattante de la mafia russe sous le pseudonyme « Bloody Blade ». Encore en service, Rodionova était engagée dans un trafic de drogue. Ainsi, pour son travail, elle est payée en héroïne, qu’elle vend ensuite en Russie.
Un autre personnage au destin similaire est « Balalaïka », ou Sofia Pavlovna Irinovskaïa, de Black Lagoon (2006). Son père, essayant d'échapper à la punition pour un crime inconnu, s'est enfui en Amérique. Irinovskaïa a donc été élevée par son grand-père, qui était un général de l'armée soviétique. Ayant grandi, Vladilena (c'est le deuxième pseudonyme de l'héroïne – diminutif de Vladimir Ilitch Lénine) a rejoint les forces aéroportées et a participé à la guerre d'Afghanistan, a servi comme capitaine, mais a ensuite été rétrogradée et renvoyée. En 1992, elle a formé une organisation mafieuse d'anciens combattants de son détachement appelée « Hôtel de Moscou ». Le surnom « Balalaïka » a été donné à l'héroïne pendant la guerre d'Afghanistan – c’est de cette manière qu’est appelé le fusil sniper SVD dans le jargon des soldats.
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Des Russes inhabituels
Dans les animes, vous pouvez également trouver des personnages d'origine russe avec une apparence inhabituelle pour la Russie. Simon Brezhnev de Durarara!! (2010) est par exemple un émigrant d'Amérique au teint plus foncé. Son vrai prénom, russe, est révélé dans la première série – Semion. Il travaille comme promoteur dans un restaurant russe de sushis, où des plats inhabituels sont servis, par exemple des sushis au borchtch ou du caviar de saumon.
Il y a aussi des projets fous combinant connotations érotiques, magie et orthodoxie. L’anime The Qwaser of Stigmata (2010) en est un exemple frappant. Dans son histoire, des prêtres-alchimistes (qwasers) savent comment contrôler les éléments du tableau de Mendeleïev. Leurs capacités sont activées après l'utilisation de ce qu'on appelle le soma, qui peut être obtenu à partir des seins des jeunes filles. Le but des alchimistes est un artefact mystique, une icône miraculeuse de la Mère de Dieu de Tsaritsyne. Le personnage principal de cet anime est Sasha Hell. Il est âgé de 13 ans. En raison de son enfance difficile, il ne fait confiance à personne. Il se montre sérieux et direct, et est donc comparé par les autres personnages aux gelées sibériennes. Il peut contrôler le fer et, parfois, il insère des mots russes dans son discours, mais à cause de l'accent, ils paraissent ridicules et incompréhensibles.
À bas les stéréotypes
Les stéréotypes de certains personnages russes dans les animes plus modernes sont cependant beaucoup moins criants. Un exemple de ce type d'anime est Yuri!!! on Ice (2016), qui raconte l'histoire d'un jeune patineur, Yuri Katsuki, et de son entraîneur, Victor Nikiforov, qui veulent obtenir la première place au Grand Prix de patinage artistique. Cette histoire ne se fait pas sans clichés, mais elle montre avec précision les réalités de la Russie moderne, la tenue des patineurs artistiques russes, ainsi que les rues de Saint-Pétersbourg, les palais de glace de Sotchi et de Saransk, en République de Mordovie. L'un des personnages principaux est le patineur artistique russe Yuri Plisetsky, un jeune homme plein d'ambition et de talent. Il fait de son mieux pour attirer l'attention de Nikiforov afin que ce dernier devienne son entraîneur.
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Les personnages russes dans les animes ont donc fait un chemin étonnant, passant de l'image stéréotypée d'habitants rudes d'un pays lointain, dont le caractère correspond au climat, à celle de héros profonds et crédibles.
L'héroïne de l'anime Dumbbell nan-Kilo moteru? (How heavy are the dumbbells you lift) (2019), une étudiante russe venue au Japon dans le cadre d'un échange, Gina Boyd, distingue justement trois types de personnages russes traditionnels dans les animes : un intellectuel au sourire glacial, un patriote passionné, un individu féroce au sang-froid.
Qu'est-ce qui a donc changé dans l'image du héros russe au fil du temps ? Leurs traits stéréotypés, leur amour pour le borchtch, la vodka et le « mat » (argot) russe ont cessé d'être déterminants. Maintenant, ce ne sont plus que des traits hauts en couleur venant compléter des personnalités charismatiques et vives, qui sont intéressantes en elles-mêmes.
L'auteur remercie le projet à but non lucratif Russia in anime pour son aide dans la préparation de cet article.
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