Rapide comme l’éclair et symbole national: la troïka russe en dix faits

Une troïka durant le XXe Championnat de Russie de troïkas à l’Hippodrome central de Moscou

Une troïka durant le XXe Championnat de Russie de troïkas à l’Hippodrome central de Moscou

Mikhaïl Voskressenski/Sputnik
La troïka est un symbole séculaire de la Russie et en incarne la plus sincère authenticité. Mais que savez-vous exactement à son sujet?

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Une troïka est un type d’attelage équestre exclusivement russe, puisqu’il n'a pas d'analogue dans le monde. De plus, c'est le plus rapide ! La troïka est un symbole de la Russie, au même titre que les poupées gigognes, la balalaïka et le froid.

Une rapidité sans pareil

Peinture sur une boite traditionnelle réalisée par la Fabrique de peinture miniature de Fedoskino, dans la région de Moscou

La troïka russe est un traîneau composé de trois chevaux avançant à des allures différentes. En effet, le cheval central (appelé « limonier ») doit être le plus fort, le plus grand, et avance au trot. Les chevaux latéraux, les « bricoliers », se déplacent quant à eux au galop, « portant » donc le limonier, tout en étant moins fatigués que s’ils avançaient seuls. Un tel attelage peut parcourir de longues distances à des vitesses allant jusqu'à 45-50 kilomètres à l'heure. Autrefois, il s’agissait donc du moyen de transport le plus rapide.

Des chevaux regardant dans différentes directions

Si vous examinez attentivement une troïka russe, vous pouvez remarquer un détail intéressant : les chevaux latéraux tournent la tête vers les côtés, mais vont pourtant tout droit. Pourquoi cela se produit-il ? Le fait est que dans l’attelage, le cheval droit galope de la jambe gauche, et le gauche – de la droite. Ils tournent donc la tête dans l'autre sens pour trouver l'équilibre. Il s’agit d’un réflexe instinctif qui renforce, avouons-le, l’élégance de l’attelage.

Les meilleures troïkas doivent être d’une même race

Chevaux Orlov attelés en troïka

On pense que les meilleures troïkas sont composées de trotteurs (des chevaux élevée spécialement pour la course) de même race. Les chevaux de race Viatka sont à cet égard considérés comme les plus fiables en raison de leur endurance, mais les plus prestigieux attelages étaient constitués de chevaux Orlov.

La troïka est prévue pour trois passagers

Peinture sur une boite traditionnelle réalisée par la Fabrique de peinture miniature de Fedoskino, dans la région de Moscou

Le mot « troïka » (qui signifie tout simplement « trio ») en lui-même a commencé à être utilisé au XVIIIe siècle (certaines sources parlent de la fin du XVIIe) pour désigner les attelages. À l'époque, le nombre de chevaux dépendait du nombre de passagers et de la cargaison – si une seule personne montait à bord, un seul cheval était attelé, et si plus de « puissance » était nécessaire, les chevaux étaient attelés les uns derrière les autres. Mais ce mode d'attelage ne s'est pas implanté en Russie en raison de la mauvaise qualité des routes (ou plutôt de leur absence). Néanmoins, lorsque l’on a commencé à essayer d'attacher les chevaux les uns à côté des autres, cela a démontré une meilleure efficacité.

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Un essor dû à la poste

Illustration du début du XXe siècle

Nous ne savons pas qui a inventé la troïka ni quand. Il est toutefois fort probable que son émergence en tant qu'attelage de différentes allures ait été facilitée par le développement de l’activité postale. En Russie, les distances entre les lieux de peuplement sont considérables et la livraison du courrier et des chargements, même entre Moscou et Saint-Pétersbourg, prenait plusieurs jours. Pour d'autres grandes villes cela pouvait même nécessiter plusieurs semaines, surtout au printemps et en automne, lorsque les chemins sont particulièrement en mauvais état.

Or, pour le transport du courrier, était non seulement importante l'endurance des chevaux, mais aussi leur vitesse. On sait qu'au début du XIXe siècle, les diligences postales en Russie étaient tractées par trois chevaux. Les troïkas ont ensuite commencé à transporter à la fois des coursiers et des passagers, mais aussi à servir de simple divertissement prestigieux dans les villages et les villes. Par exemple, un riche paysan considérait qu'il était obligatoire de louer une troïka pour transporter sa fiancée, ses proches et convives.

Ornements contre les forces du mal

Célébration du 360e anniversaire de la ville de Nertchinsk (région de Transbaïkalie, en Sibérie), en 2013

De nos jours, de nombreux automobilistes aiment tuner leur « cheval de fer », que ce soit en modifiant leur peinture ou en y ajoutant des lampes halogènes. Mais autrefois, quand les voitures n’existaient pas, les conducteurs « tunaient » également leur attelage. Le limonier était pour cela équipé d’un arc en bois (appelé « douga ») arborant des dorures, des ornements décoratifs et de fines sculptures. Au milieu du XIXe siècle, les arcs incrustés de cuivre sont apparus à la mode, et quelques décennies plus tard, il était habituel de les décorer avec des rubans colorés. Les cochers pensaient que ces ornements ne servaient pas seulement à des fins esthétiques, mais qu'ils constituaient également une protection contre les voleurs et le mauvais œil.

Une clochette en guise de radiocassette

« Nous allions en troïka avec des grelots », décrivent les paroles de la chanson Par une longue route (Dorogoï dlinnoïou) de Boris Fomine et Konstantin Podrevski. En effet, lorsque la troïka roulait, on pouvait l'entendre à un kilomètre ! Les cochers utilisaient des clochettes pour que leur approche soit entendue et que l’on libère le passage sur les routes, mais aussi afin de prévenir de l’arrivée du service postal.

Les propriétaires privés ont cependant eux aussi aimé l'idée des grelots, et ont commencé à les utiliser en promenades. Bien sûr, les amateurs qui se déplaçaient en ville en faisant sonner leurs cloches gênaient le travail des services postaux, et le gouvernement, dans la seconde moitié du XIXe siècle, a donc introduit une interdiction de ces grelots pour les particuliers. En réponse, ces derniers ont eu l'idée d'utiliser des clochettes en bronze sur des tiges en cuir, qui produisaient des sons plus doux. Les grelots étaient sélectionnés en fonction de leur ton et chaque troïka avait donc son propre accompagnement musical durant les voyages.

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Exposition internationale

La troïka russe a effectué sa première apparition à l'étranger en 1911, lorsqu’elle a été présentée à l'Exposition universelle de Londres. Elle était composée d’un trotteur Orlov au centre et de bricoliers de race Strelets. Depuis lors, les troïkas ont régulièrement participé à des expositions en dehors du pays. Pendant l’ère soviétique, la tradition s'est poursuivie, mais les troïkas étaient alors majoritairement composées uniquement de chevaux Orlov.

On peut encore en voir aujourd'hui

Durant le Championnat de Russie de troïkas

Avec l'avènement du chemin de fer, puis de l'automobile, les troïkas (et de manière générale le cheval comme moyen de transport) ont bien entendu perdu en popularité. Cependant, on peut encore les voir lors de festivals dans les villes touristiques de Russie (comme Souzdal et Vladimir) et lors de compétitions sportives.

Au milieu des années 1990, dans différentes villes du pays, ont été établies les compétitions annuelles de la Coupe de Russie pour les troïkas. La finale se déroule traditionnellement à Moscou.

Une source d’inspiration

Le mot « troïka » ne se traduit pas et est utilisé tel quel dans les autres langues. Il s’agit donc d’un véritable symbole de la Russie. De nombreux tableaux, poèmes, récits, chansons lui sont consacrés. Le plus célèbre est certainement cet extrait des Âmes mortes de Nicolas Gogol : « N’es-tu pas ainsi faite, ô Russie, ô mon bien-aimé pays ? Ne te sens-tu pas emportée vers l’inconnu comme l’impétueuse troïka, que rien ne saurait atteindre ? Sous toi la route fume, les ponts gémissent, tonnent ; tout est dépassé, distancé, débordé ».

D’ailleurs, la carte utilisée par les utilisateurs des transports en commun à Moscou s’appelle également « troïka » et arbore l’image de ce célèbre attelage.

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