Comment l’AK-47 a-t-il fait de Kalachnikov le principal fabricant d’armes du monde?

Sciences & Tech
NIKOLAÏ LITOVKINE
Ce fusil d’assaut, devenu le symbole des révolutions et mutineries, représente plus de 15% de l’arsenal mondial des armes à feu.

À la fin des années 40, le concepteur Mikhaïl Kalachnikov a donné naissance à un fusil automatique qui deviendra non seulement l’arme principale de l’armée soviétique, mais également l’un des symboles du pays. C’est aussi précisément cette invention qui s’est retrouvée entre les mains des partisans et opposants aux gouvernements des pays du tiers monde.

Le chemin vers la production d’armement

Mikhaïl Kalachnikov est né au sein d’une famille paysanne le 10 novembre 1919, dans le petit village de Kouria, dans la région de l’Altaï. Il était le dix-septième enfant de la maison et, ses parents n’ayant pas suffisamment d’argent pour tous les nourrir, il a commencé à travailler dès ses 13 ans sur le chantier du chemin de fer Turkestan-Sibérie.

Là-bas, il s’est intéressé aux mécanismes des engins et, grâce à ses connaissances, est entré quelques années plus tard dans une unité de conducteurs de char de l’armée soviétique.

Il a donné naissance à ses premières inventions avant même que n’éclate la Seconde Guerre mondiale. Parmi elles figuraient un compteur de tirs pour char, ainsi qu’un autre pour le kilométrage. Chacun des objets élaborés par ses soins a alors été produit en série et équipé sur les véhicules de l’époque.

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A ensuite débuté l’année 1941, durant laquelle l’URSS s’est elle aussi retrouvée engagée dans le conflit. En septembre, Kalachnikov a donc été envoyé sur le front en tant que conducteur de char, mais a été gravement blessé un mois plus tard et transporté à l’hôpital. Le conflit sur le front était pour lui terminé, et il s’est donc rendu dans une usine d’armement d’Ijevsk (République d’Oudmourtie, 968 kilomètres à l’est de Moscou), pour se consacrer à la conception d’armes militaires de tir.

Kalachnikov a cependant conçu sa première arme automatique alors qu’il se trouvait encore à l’hôpital. Il s’agissait d’un pistolet-mitrailleur de petit gabarit pour conducteurs de chars, qu’il était possible d’emporter dans les véhicules étroits. Toutefois, cette arme s’est avérée problématique : elle possédait un mauvais groupement des touchés, et personne ne lui aurait accordé plusieurs années de perfectionnement alors que la guerre faisait rage. C’est pourquoi le projet a été abandonné, et Mikhaïl a commencé à travailler pour la production d’une arme de série à l’usine.

Avènement de l’AK-47

Le début des années 1940 a été caractérisé par l’apparition d’une nouvelle classe d’armes à feu : les fusils d’assaut. Les premiers sont apparus dans les rangs des troupes nazies et seront réellement une révolution dans la production d’armes.

La particularité de ces armes résidait dans leurs munitions, plus faibles que celles d’un fusil habituel, mais bien plus puissantes que celles d’un pistolet. Cette combinaison a donc permis de croiser la puissance des fusils avec la rapidité des pistolets-mitrailleurs de l’époque. Les tireurs jouissaient ainsi de la possibilité de faire feu par salves, tout en atteignant des cibles situées à 100-200 mètres.

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Son premier et principal triomphe, Kalachnikov l’a connu précisément grâce à ce type d’arme. Il a en effet créé le célèbre AK avec ces munitions « intermédiaires » de calibre 7,62x39mm. En 1945, il a alors présenté son prototype à un appel d’offres du ministère de la Défense pour la conception de la nouvelle arme principale de l’armée soviétique.

À la fin de la décennie, Kalachnikov a finalement remporté la compétition et l’usine d’Ijevsk, où il œuvrait, a donc entamé la production en série de son fusil automatique, connu dans le monde sous l’appellation AK-47.

Ceci-dit, l’arme la plus célèbre de la planète devait encore subir de nombreux ajustements, auxquels ont participé les ingénieurs allemands de l’usine Schmeisser faits prisonniers durant le conflit. Le plus grand défaut de l’arme durant l’appel d’offres était son mauvais groupement de touchés, voire même sa presque entière absence. Ainsi, au cours des années suivantes, les spécialistes soviétiques et allemands ont œuvré à résoudre ce souci.

Au final, en a résulté l’arme de tir la plus fiable de toutes. Y compris encore de nos jours. Tel est l’avis des membres des Forces d’opérations spéciales (SSO), interrogés par Russia Beyond.

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« La Kalachnikov est surpassée par les américains et allemands contemporains en termes de précision/groupement de touchés et d’ergonomie. C’est-à-dire qu’en opération dans des lieux fermés et étroits, où la rapidité est importante, je préférerais une AR ou H&K. Mais s’il faut travailler au Moyen-Orient, en Syrie, alors j’opterais sans ambiguïté pour l’AK pour sa fiabilité et la simplicité de ses mécanismes », nous confie en effet l’un d’eux lors d’une compétition des forces spéciales en Tchétchénie.

Secret d’une réussite

L’AK a reçu une popularité sans précédent à travers le monde justement grâce à sa fiabilité ainsi qu’à sa simplicité de production. À l’heure actuelle, on dénombre environ 100 millions de fusils automatiques Kalachnikov dans 55 pays. Et il ne s’agit toutefois que de la quantité d’armes officiellement enregistrées, donc sans prendre en compte ses répliques de contrebande. Ce fusil peut ainsi être aperçu entre les mains de partisans ou d’indépendantistes du tiers monde.

Les raisons à cela sont nombreuses : la simplicité et la fiabilité des mécanismes, comme expliqué précédemment, mais également le prix. En effet, un AK coûte près de 300 dollars sur le marché, tandis que son principal concurrent, l’américain AR-15, se vend pour un montant démarrant à 1 000 dollars.

 Le fusil automatique de Kalachnikov a été adopté par tous les pays du bloc socialiste et dans de nombreuses autres contrées. Des versions modifiées de l’AK-47 sont encore aujourd’hui produites en Albanie, en Bulgarie, en Hongrie, en Egypte, en Iran, en Chine, en Roumanie, en Corée du Nord, et ce, partiellement sans licence.

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En outre, l’AK peut même être aperçu sur les armoiries, le drapeau et la monnaie du Mozambique, ainsi que sur les armoiries du Zimbabwe. Il y a peu encore, il ornait également celles du Burkina Faso.

Il est malheureusement également populaire au sein des communautés criminelles du monde entier. Par exemple, les membres des cartels de drogues latino-américains lui ont même attribué un surnom : curno de chivo (corne de chèvre), certainement en raison de la forme de son chargeur.

La vie après l’AK

Cette arme imaginée par Mikhaïl Kalachnikov à la fin des années 40 est devenue le fondement du développement de l’ensemble du secteur de l’armement en URSS. En réalité, absolument tous les fusils automatiques et mitrailleurs ayant vu le jour en Union soviétique et en Russie par la suite ont, indépendamment du calibre ou du gabarit, été conçus sur la base des mécanismes de l’AK.

Par conséquent, au cours du demi-siècle suivant, Kalachnikov et ses disciples de l’usine d’Ijevsk ont créé toute une série de fusils automatiques : les Vitiaz, de calibre 9mm prévus pour les opérations dans des lieux étroits et environnements urbains, où la puissance de tir de l’AK pouvait transpercer des murs et donc risquer de blesser des civils ; la mitrailleuse légère Petcheneg de calibre 7,62x33mm ; la version améliorée de l’AK dans les années 70 de calibre 5,45x39mm ; et bien d’autres encore.

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« Il n’y aurait pas eu la Seconde Guerre mondiale, j’aurais certainement mis au point des technologies facilitant le dur labeur des paysans. Les Allemands sont coupables du fait que je sois devenu un constructeur militaire », a déclaré Mikhaïl Kalachnikov aux journalistes lors de l’exposition consacrée au 60ème anniversaire de l’AK-47.

Jusqu’à la fin de ses jours, cet homme a participé à la conception de nouvelles armes au sein de l’usine d’Ijevsk. Il est décédé en décembre 2013 des suites d’une grave maladie.

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