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Après avoir repris Stalingrad durant l’hiver 1942-1943 et remporté la bataille de Koursk à l’été 1943, l’Armée rouge continua, à l’automne suivant et au début de l’hiver, à repousser l’ennemi allemand vers l’ouest. À la fin de l’année 1943, les troupes soviétiques avaient presque entièrement libéré la partie de l’Ukraine située sur la rive gauche du Dniepr et étaient entrées en Biélorussie. Elles avaient aussi isolé sur la péninsule de Crimée la 17e armée allemande du reste des forces nazies engagées sur le front de l’Est.
Dans le nord-ouest de l’URSS, l’Armée rouge ne rencontrait pas les mêmes succès. Bien qu’elle ait ouvert une brèche dans l’encerclement de Léningrad le 18 janvier 1943, elle n’était pas encore parvenue à la fin de l’année à libérer la ville , repousser et écraser les troupes allemandes du groupe d’armées « Nord ».
« Durant cette période, tous nos officiers soviétiques apprirent énormément, écrivait dans ses mémoires L’Affaire du Vie le maréchal Alexandre Vassilievski. Ils étaient désormais riches d’une nouvelle expérience dans l’art de la stratégie et de la tactique opérationnelle. Ils avaient appris à battre l’ennemi d’une manière plus efficace en essuyant moins de pertes. Tout cela non seulement nous donnait la possibilité, mais nous obligeait à déployer sur toute la longueur du front, de Leningrad à la mer Noire, de larges offensives pour libérer le plus rapidement possible tout le pays soviétique de l’ennemi... »
La bataille pour la partie de l’Ukraine située sur la rive droite du Dniepr dura de fin décembre 1943 au printemps 1944. Cinq fronts soviétiques et deux groupes d’armées allemands y prirent part, soit près de quatre millions d’hommes.
Des bombardements massifs de certaines zones, un déploiement d’envergure de l’aviation, des offensives rapides dont le rythme ne faiblissait pas, un engagement raisonné des armées de chars sur les points de percée permirent aux soldats soviétiques de briser les défenses ennemies et même, à certains endroits, de prendre les forces allemandes en tenaille. Ainsi, lors de la bataille de Tcherkassy (ou de Korsoun), également appelée la « deuxième Stalingrad », deux corps d’armée de la Wehrmacht furent défaits : « des colonnes entières d’Allemands cherchaient à s’extirper de là-bas et nous les écrasions sous les chenilles de nos chars ... », se souvenait Nikolaï Orlov, un pilote de char.
Au début de l’année 1944, l’Armée rouge fut ainsi en mesure d’infliger une très lourde défaite aux groupes d’armées « Sud » et « Centre ». Les generalfeldmarschall Erich von Manstein et Ewald von Kleist furent limogés par Adolf Hitler. Le 26 mars 1944, les troupes soviétiques étaient à la frontière soviéto-roumaine. De manière symbolique, le 24e régiment frontalier des armées du NKVD – dont les hommes avaient offert à cet endroit même une résistance acharnée en 1941 – fut le premier à atteindre le Prout.
Dans la région de Leningrad, après plusieurs années d’échecs, l’Armée rouge connut des succès importants durant l’hiver 1943-1944. Au cours de l’offensive Leningrad-Novgorod lancée le 14 janvier 1944, les troupes soviétiques levèrent complètement le blocus de Leningrad puis repoussèrent les Allemands à 200-280 kilomètres de la ville, les obligeant à se positionner sur la ligne de défense « Panthère » à la frontière avec l’Estonie. Au printemps, les tentatives soviétiques pour la percer furent vaines.
« On entend toujours le son des canons, que l’on connaît bien depuis longtemps, mais aujourd’hui ce sont des grondements tellement réjouissants », écrivait le 27 janvier dans son journal une habitante de Leningrad dont le nom a été perdu. Elle décrivait aussi le feu d’artifice qui fut tiré pour fêter la fin du siège de la ville : « Des lumières multicolores diaprent le ciel. La magnifique cascade de couleurs vives – framboise, vert, argent – illumine d’une manière éblouissante les brouillards gris qui voilent nos cieux. Mes enfants sont au comble de la joie. Mon cœur s’est arrêté de battre, mes mains tremblent. Est-il donc possible que tout cela soit fini ? Est-il possible que le cauchemar inhumain de notre existence amère soit enfin terminé ? »
La reconquête rapide par l’Armée rouge des terres ukrainiennes situées sur la rive droite du Dniepr avait réduit à néant les espoirs du commandement allemand de rétablir une liaison terrestre avec la Crimée. Au printemps 1944,il fallut un peu plus d’un mois aux troupes soviétiques pour libérer complètement la péninsule et réinstaller la flotte de la mer Noire à Sébastopol, son premier port d’attache. Au début du mois de mai, les hommes de la 17e armée de la Wehrmacht qui n’avaient pas été évacués par la mer furent vaincus.
« Vue du ciel, Kherson ressemblait à un gigantesque cimetière de matériels militaires qu’on aurait dit avoir été écrasés par la meule monstrueuse d’un énorme moulin, se souvenait Mikhaïl Avdeev, commandant du 6e régiment de chasseurs de la garde des forces aériennes de la flotte de la mer Noire. On aurait cru qu’on avait entassé ici tous les chars hors d’usage et toutes les armes, tous les véhicules détruits, tous les cadavres de soldats et d’officiers en uniforme gris souris que l’on avait trouvés sur tous les champs de bataille de cette grande guerre ».
À l’été 1944, l’Armée rouge démontra à la Wehrmacht qu’elle avait su apprendre des amères leçons de 1941 et pouvait maintenant elle-même mettre efficacement en œuvre la stratégie de la guerre éclair. Le 23 juin, soit trois ans et un jour après l’invasion de l’URSS par l’armée du IIIe Reich, fut lancée l’offensive en Biélorussie, autrement connue comme l’opération Bagration.
Les puissants coups de butoir des troupes soviétiques firent presque immédiatement céder les défenses de l’ennemi qui s’attendait à ce que l’Armée rouge concentre son attaque en Ukraine. Les chars soviétiques s’engouffraient immédiatement dans les brèches ouvertes dans les lignes allemandes. Les Soviétiques avançaient à un rythme soutenu, faisant jusqu’à 25 kilomètres par jour.
Les troupes au sol étaient aidées par les bombardements intensifs de l’aviation qui visait les points de passage sur les cours d’eau et les colonnes allemandes qui battaient en retraite. Elle ne leur donnait ni le temps, ni la possibilité de se réorganiser et de se fixer sur de nouvelles lignes de défense. En même temps, les groupes de partisans à l’arrière des troupes allemandes se mirent à les attaquer.
« Lors de l’opération Bagration, le commandement militaire à tous ses échelons fit la démonstration de sa pleine compréhension, affinée avec le temps, de la nécessité d’encercler rapidement et d’éliminer de grands groupes d’armées ennemis. L’art du commandement, l’habileté et le courage des hommes leur permirent de vaincre le regroupement de forces allemandes le plus puissant qui bloquait notre avancée sur Berlin », écrivait le maréchal Gueorgui Joukov dans Souvenirs et Réflexions. À la fin du mois de juin 1944, plus de 10 divisions allemandes furent écrasées près de Bobrouïsk et Vitebsk. Encerclée près de Minsk, la 4e armée de la Wehrmacht, forte de 100 000 hommes, fut défaite au début du mois suivant.
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Au cours de l’opération Bagration, l’Armée rouge défit 17 divisions et 3 brigades allemandes. 50 autres divisions perdirent plus de la moitié de leurs hommes et, de ce fait, leur capacité au combat. Les pertes allemandes s’établirent au total à près de 500 000 hommes. Cette offensive coûta la vie à plus de 178 000 soldats soviétiques. 587 000 furent blessés. « La fin est proche ... Seuls les restes épars d’une trentaine de divisions ont échappé à la mort et à la captivité en URSS », concluait le général Siegfried Westphal après la défaite infligée par l’Armée rouge au groupe d’armées « Centre » durant l’opération Bagration.
En deux mois de combat, l’Armée rouge progressa de 550-600 kilomètres vers l’ouest. Après avoir libéré la Biélorussie et une grande partie de la Pologne orientale, les troupes soviétiques approchaient en août 1944 de Varsovie et de la frontière de la Prusse orientale. Une pause opérationnelle fut alors décidée.
Le 17 juillet, avant même la fin de l’opération Bagration, les autorités soviétiques firent défiler dans les rues de Moscou 57 000 soldats et officiers allemands faits prisonniers durant cette offensive. Leonid Leonov, un témoin de la « Marche des Vaincus », se souvenait : « un silence dégoûté régnait dans les rues de Moscou qui n’étaient saturées que du bruit du piétinement de ... milliers de bottes. Rarement, ça et là, j’entendais des voix calmes et posées. Des réflexions à haute voix nous parvenaient de gens qui étaient derrière nous : "Sales chiens, avez-vous vraiment cru pouvoir nous écraser, nous les Russes !"... Évidemment, beaucoup de mots "flatteurs" à l’égard d’Hitler et du nazisme en général volèrent. Et, on entendit aussi quelques formules "accueillantes" adressées aux participants du "défilé" : "Salauds, puissiez-vous crever !", "Pourquoi ne vous a-t-on pas tous tués sur le front ?" ».
Durant l’été 1944, le commandement de l’Armée rouge établit les plans de la libération la Carélie soviétique, toujours occupée par la Finlande. Longtemps, cette zone du front de l’Est fut l’une des plus calmes. On plaisantait même au sujet des troupes qui y étaient positionnées : « Dans le monde, il n’y a que trois armées qui ne combattent pas : la suédoise, la turque et la 23e soviétique ».
Au cours des offensives menées durant l’été 1944, l’Armée rouge repoussa les Finnois sur la ligne où ils se trouvaient avant le début de la guerre. Le 19 septembre fut conclu l’Armistice de Moscou par lequel la Finlande cessait toute participation au conflit mondial et s’engageait à chasser les troupes allemandes de son sol. Cette disposition provoqua le déclenchement de la Guerre de Laponie.
Au sud de l’Europe, le IIIe Reich perdit deux de ses alliés. Le 20 août 1944, l’Armée Rouge lança l’offensive de Jassy-Kichinev au cours de laquelle elle défit le groupe d’armées « Ukraine Méridionale » et commença à libérer la Moldavie. Le 23 août, alors que les troupes soviétiques venaient d’entrer en Roumanie orientale, le roi Michel Ier et des hommes politiques opposés aux nazis organisèrent un coup d’État contre le conducǎtor Ion Antonescu, qu’ils firent emprisonner, et les membres de son gouvernement. L’armée roumaine reçut alors l’ordre de cesser de se battre contre l’Armée rouge.
« Lorsque je me suis réveillé le 23 août au matin, je n’étais pas sûr de vivre jusqu’au lendemain. J’étais fermement résolu à sortir la Roumanie de son alliance avec Hitler. Les armées de Staline étaient aux portes de la Roumanie, le front s’effondrait et la population n’en pouvait plus de la guerre », se souvenait le roi.
Le 31 août 1944, l'Armée rouge entrait dans Bucarest, sans avoir dû combattre. La Roumanie rejoignit la coalition anti-hitlérienne et son armée, placée sous le commandement soviétique, allait livrer des combats acharnés contre ses alliés d’hier.
Le 8 septembre, la 3e armée ukrainienne placée sous les ordres du général (élevé au rang de maréchal le 12 septembre) Fiodor Tolboukhine entra et progressa en Bulgarie sans rencontrer de résistance. Ce pays n’avait pas déclaré la guerre à l’URSS mais avait mis à la disposition de l’armée allemande ses aérodromes, son réseau de chemin de fer et ses ports. Le gouvernement du Front de la Patrie, installé après le coup d’État du 9 septembre, déclara la guerre à l’Allemagne. L’armée bulgare rejoignit ensuite les forces soviétiques qui participèrent à la libération de la Yougoslavie.
En octobre 1944, l’Armée rouge franchit le cercle polaire. Durant toute la guerre, la Wehrmacht avait échoué à avancer sur le territoire de l’URSS par le grand Nord. Après avoir désenclavé Mourmansk, les troupes soviétiques délogèrent la Wehrmacht de la région de Petsamo, que la Finlande avait cédée à l’URSS en application de l’Armistice de Moscou, et lancèrent l’opération de libération du nord de la Norvège.
« À 9 heures 25 du matin, nos troupes avancées entrèrent dans Kirkenes, se souvenait le maréchal Kirill Meretskov. Le tableau était triste à voir. En se repliant, les Allemands avaient fait sauter toutes les installations portuaires, détruit les bâtiments administratifs et les habitations. Seules restaient debout de petites maisons à la limite de la ville. Lorsque les armes se furent tues, les habitants commencèrent à sortir des grottes où ils s’étaient cachés des nazis. Ils accueillirent avec joie les soldats soviétiques. C’était touchant de voir que des gens du Grand Nord, habituellement si pudiques, avaient les larmes aux yeux et serraient leurs libérateurs dans les bras... ».
À l’automne 1944, au prix d’âpres combats furent libérées l’Estonie, presque toute la Lettonie et les zones de la Lituanie qui étaient encore aux mains des Allemands (Vilnius et Kaunas leur avaient été repris durant l’été). Le 10 octobre 1944, des détachements de la 51e armée atteignirent la rive de la Baltique dans la région de Memel (Klaipėda), coupant ainsi 400 000 soldats du groupe d’armées « Nord » de la Courlande (partie occidentale de la Lettonie).
Le commandement nazi décida de ne pas abandonner la zone où ces soldats étaient désormais isolés et qu’il croyait être une forteresse imprenable. Il envisageait de la ravitailler par la mer. Jusqu’au printemps 1945, l’Armée rouge ne put faire céder les défenses allemandes. « Le "chaudron de la Courlande" n’est que tranchées. Nous en prenons une et il y en a une autre derrière. On dirait que leur nombre est infini », se désolait Mikhaïl Saltykov, commandant d’une section de mitrailleurs du 8e corps d’infanterie estonien.
À l’automne 1944, en Pologne et en Prusse orientale, l’Armée rouge n’entreprit aucune opération d’envergure. Elle reprenait des forces pour la campagne d’hiver en Tchécoslovaquie et dans les Balkans où l’offensive contre les Allemands se poursuivait. Outre les armées roumaines et bulgares, récemment ralliées, les troupes soviétiques reçurent un soutien considérable des détachements de l’Armée de libération nationale Yougoslave.
En ce même automne 1944 , le IIIe Reich n’avait plus, en Europe, qu’une seule alliée : la Hongrie qu’Adolf Hitler était prête à conserver à n’importe quel prix. Le 26 décembre, les troupes soviétiques parvinrent à encercler dans Budapest 188 000 soldats allemands et hongrois qui refusèrent de se rendre. Les Soviétiques ne purent donc profiter d’un répit à l’occasion de la Nouvelle Année. Dans les premiers jours de janvier 1945, ils durent non seulement mener des combats de rue acharnés pour liquider les occupants allemands et leurs alliés hongrois, mais aussi repousser les assauts des troupes allemandes dépêchées pour briser le siège soviétique de Budapest dans le cadre de l’opération Konrad.
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