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10h10, aérodrome de Tchkalovski, dans la région de Moscou. Deux pilotes se trouvent dans le cockpit de l’avion de chasse à réaction école MiG-15 UTI, dont Iouri Gagarine, le premier homme à avoir effectué un vol dans l’espace. L’ambiance est un peu nerveuse : le décollage prend du retard et tout le monde attend que l’avion précédent accomplisse toutes les tâches confiées.
Les cosmonautes Iouri Gagarine (deuxième à droite) et Alexeï Leonov (à gauche) après un vol à bord d’un MiG
Alexandre Mokletsov/SputnikFinalement, à 10h19, l’appareil s’envole. C’est Gagarine qui assure la communication radio avec la Terre. Sa voix est calme et distincte. Trois minutes après le décollage, il rapporte que l’appareil a atteint son altitude de croisière et demande l’autorisation d’atteindre celle de 4 200 mètres. Au bout d’encore deux minutes, il annonce avoir dépassé le sommet de la couche nuageuse. Six minutes plus tard, avec une voix toujours sereine, il dit avoir accompli la tâche et demande l’autorisation de prendre la route du retour. Ce message surprend les aiguilleurs, seule la moitié du temps alloué au vol s’étant écoulée. Après cela, la communication avec l’équipage n’a plus jamais pu être rétablie.
À 10h29, le chasseur s’est écrasé au sol à 65 km de l’aérodrome. La date de cette catastrophe aérienne reste gravée dans l’histoire avant tout en raison de la disparition du premier cosmonaute de l’histoire. La seconde victime, Vladimir Serioguine, est beaucoup moins souvent mentionnée. Pourtant, le chef du Centre d'entraînement des cosmonautes avait tant insisté sur sa candidature pour accompagner le vol de Gagarine.
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Vladimir Serioguine, copie d’une photo tirée des archives familiales et datant de 1947
SputnikVladimir Serioguine est né dans la famille d’un employé des postes et, une fois ses études terminées, il s’est porté volontaire pour rejoindre les rangs de l’Armée rouge. À l’époque, il n’avait que 18 ans. Sa passion pour l'aviation n'est pas restée inaperçue et il s’est vu envoyer dans une école de pilotage. Diplômé en 1943, il se rend au front de la Seconde Guerre mondiale en tant que pilote militaire.
Déjà au début de 1944, il reçoit sa première décoration – l’ordre de l’Étoile rouge pour deux exploits. Ainsi, aux commandes d’un Il-2, il avait pour mission de mener un raid sur des chars ennemis près du village ukrainien de Marievka. En dépit des tirs de canons antiaériens nazis, il a atteint la cible et détruit deux chars. Le lendemain, évitant les tirs, il a bombardé trois wagons couverts près de Stalindorf.
Vladimir Serioguine en 1964
SputnikParmi ses autres exploits, il convient de mentionner le fait qu’il a sauvé la vie d’un pilote soviétique attaqué par un Focke-Wulf allemand et a lui-même été blessé pendant cette mission.
Au total, au cours des années de la guerre, il a effectué 140 vols de combat et 50 de renseignement. Les as de ce niveau étaient connus au pays comme les « faucons de Staline ». En 1945, il a reçu le titre de Héros de l'Union soviétique.
Après la guerre, Serioguine reste dans l’aviation et, pour enrichir davantage son impressionnante pratique par la théorie, il entre dans une académie de l'armée de l'air. Une fois sa formation terminée, il teste les nouvelles modifications des chasseurs MiG-15 et MiG-17. « A réalisé des vols d’essai de différente complexité, y compris ceux avec les moteurs éteints », est-il écrit dans son dossier.
Au milieu des années 1960, il est nommé commandant d’un régiment d’aviation et, riche d’une grande expérience de vols dans des conditions extrêmes, il se voit confier l’entraînement des cosmonautes, les premiers hommes soviétiques à voler dans l’espace étant initialement pilotes de chasse.
De retour de vol en compagnie de Valentina Terechkova, première femme cosmonaute
SputnikSes collègues ont souvent évoqué son expérience quand, un jour, il est entré à bord d’un chasseur supersonique dans une tempête de neige et a réussi à faire atterrir l’appareil pratiquement à l’aveugle dans des conditions de visibilité presque nulle. Plus tard, cet homme réussira par ailleurs à poser un avion dont les mécanismes de direction s’étaient désintégrés en plein vol.
Le 26 mars 1968, en apprenant que Gagarine s’apprêtait à passer l’examen de technique de pilotage du MiG-17, l’adjoint au commandant de l'armée de l'air soviétique en charge de l’espace, Nikolaï Kamanine, a décidé qu’avant, le premier cosmonaute devrait effectuer un vol d’essai à bord d’un MiG-15 UTI. Et bien que le chef du Centre d’entraînement des cosmonautes en personne, Nikolaï Kouznetsov, ait manifesté la volonté d’accompagner Gagarine durant ce vol, Kamanine a insisté sur la candidature de Serioguine.
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Documents des deux pilotes, retrouvés sur les lieux de la catastrophe
L. Nossov/SputnikLa cause pour laquelle Gagarine, l’homme connu aux quatre coins de la planète grâce à son vol dans l’espace, devait repasser l’examen, était une pause de trois mois liée à la préparation d’un mémoire à l’académie.
« Ce genre de vols sont dans le programme d’entraînement de tous les cosmonautes. Sans eux, il est difficile de rester en forme. Non seulement ils permettent de perfectionner les compétences professionnelles, mais mettent également à l’épreuve la capacité de travailler dans des conditions de surcharge et de bruits », s’en souviendrait Kamanine dans ses mémoires.
Le 29 mars 1968, des Soviétiques lisent le journal Pravda sur la disparition de Gagarine et Serioguine
Valentin Mastioukov/TASSLe vol en compagnie d’un instructeur aussi chevronné que Serioguine n’a suscité la crainte de personne. Et même quand la communication avec l’appareil a été coupée, tout le monde s’attendait à un atterrissage forcé ou, dans le pire des cas, à un catapultage.
Néanmoins, aucun de ces scénarios ne s’est réalisé. L’avion s’est écrasé avec une telle force que ses débris se sont dispersés dans un rayon d’un kilomètre. Les dépouilles des pilotes n’ont été retrouvées que le lendemain matin. L’enquête a débouché sur 29 volumes classés « secret », mais aucune conclusion, même la plus brève, sur les circonstances de la mort de Gagarine et Serioguine n’a été publiée.
Mémorial sur les lieux de la disparition des deux pilotes
V. Kouzmine/SputnikCe n’est qu’en 2011, à base de documents déclassifiés, qu’une manœuvre brutale entreprise par l’un des pilotes (l’on ne sait toujours pas lequel) a été mentionnée comme cause probable de la catastrophe. L'avion serait alors parti en vrille et entré en collision avec une sonde atmosphérique. Une version alternative avance que l'avion de Gagarine et Serioguine aurait volé à proximité dangereuse d'un autre chasseur qui l’aurait pris dans ses turbulences de sillage.
Dans cet autre article, nous vous expliquions pourquoi la combinaison spatiale de Gagarine ne devait pas apparaître sur les photos.
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