Comment la pizza est-elle apparue en Union soviétique?

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Avec ce plat, la Russie a suivi sa propre voie : les premières pizzerias n'offraient pas les traditionnelles Margarita ou Pepperoni, mais développaient des recettes originales. Vous serez surpris en apprenant les ingrédients utilisés, mais ceux qui ont goûté à la pizza soviétique s'en souviennent avec émotion.

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Les premières pizzerias soviétiques n'ont ouvert que dans les années 1980, lorsque la perestroïka a commencé. Certaines, d'ailleurs, fonctionnent toujours. Malgré le fait qu'en URSS, il n'y avait pas de bannières publicitaires vantant les pizzas et bien qu'il fût impossible de commander à domicile comme c'est le cas aujourd'hui, tout le monde était au courant de la nouveauté. Et l’on préparait ce plat italien à la maison selon des recettes russes.

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Vent de changement

Le « rideau de fer » fut incapable de cacher aux citoyens soviétiques la cuisine italienne traditionnelle, qui s’était transformée en star des fast-foods américains. Les premiers restaurants où l'on pouvait déguster le goût de la « vie occidentale » ont commencé à ouvrir à la suite des Jeux olympiques de 1980 à Moscou et dans d'autres grandes villes. Le pays avait besoin d'établissements avec un niveau de service élevé et une cuisine moderne.

Une pizzeria à Moscou, 1982

Ainsi, dans la rue Gorki (aujourd'hui Tverskaïa), une pizzeria a vu le jour. On y proposait des plats « à l’italienne »,  dégustés sur des tables ornées de nappes à carreaux rouges et blancs. En plus des pizzas et des pâtes, du vin mousseux Lambrusco y était également servi.

La pizzeria Capriccio à Moscou, 1983

Se rendre ici, ainsi que dans de nombreux autres endroits « décents » de Moscou, n’était pas offert à tout le monde. La pizza était similaire à une pizza moderne, mais était de petite taille.

À Simferopol (Crimée) au milieu des années 1980, une pizzeria incroyablement authentique a ouvert : il n'y avait ni margarita, ni napolitana ou d'autres plats emblématiques.

À Simferopol, la pizzeria ouverte sous l'URSS fonctionne toujours

Les pizzaïolos de Crimée proposaient aux citoyens soviétiques de véritables expériences culinaires : des pizzas au jambon et aux œufs, au poulet et aux champignons, aux bâtonnets de crabe. Et cela ressemblait à une tarte ouverte sur une pâte épaisse. Ce café fonctionne toujours aujourd'hui, et propose à peu près le même menu. Les critiques sont tout simplement incroyables : « Il est peu probable qu'à l'époque où ce café a été ouvert, quelqu'un imaginait ce qu'était vraiment la pizza, écrit Sergueï de Saint-Pétersbourg, qui a mangé à la pizzeria pendant ses vacances. Malgré ça, elle est sacrément savoureuse. Et l'essentiel : c'est très nourrissant ».

Une pizzeria à Odessa, années 1980

À Odessa, une pizzeria a occupé en 1984 les locaux d'une ancienne crêperie et a été décorée dans des tons rouges et noirs. Les pizzas aux calamars, au bœuf ou aux œufs ne coûtaient pas plus de 50 kopecks (100 roubles, ou moins un peu plus d’un euro selon les prix d'aujourd'hui).

Il y avait des pizzerias proposant des variations sur le thème des pizzas italiennes dans de nombreuses villes : Kiev, Riga, Lvov.

Pizzeria Adazi sur l'autoroute Riga-Tallinn, 1988

Mais la vraie pizza italienne et américaine n'est apparue en URSS qu'à la fin des années 1980, après des négociations entre le secrétaire général du Comité central du PCUS Mikhaïl Gorbatchev et le président américain Ronald Reagan. En 1987, la création de « coentreprises » (joint-venture) a été autorisée, et la restauration rapide étrangère et d'autres produits occidentaux ont afflué dans le pays.

Camion à pizza

Au printemps 1988, un énorme camion orné de drapeaux soviétiques et américains est apparu sur les monts Lénine (aujourd'hui c'est Vorobiovy Gory) à Moscou. Une foule s'est immédiatement rassemblée, et derrière le comptoir, des chefs italo-américains ont montré un tour qui n'était auparavant visible que dans les films : ils jetaient la pâte, l’étiraient en l'air, puis envoyaient des saucisses et du fromage dessus. Ils proposaient ensuite de goûter de vraies pizzas, comme en Amérique. C'était le café-kiosque mobile Astro Pizza, une coentreprise russo-américaine.

Sur le monts Lénine, 1988.

Le prix, bien sûr, était élevé : 1 rouble 25 kopecks pour une part (pas pour une pizza entière !) Selon les normes d'aujourd'hui c’est près de 300 roubles (4 euros). Mais les files d'attente étaient interminables. L'intrigue était que les Moscovites ne savaient jamais où le camion serait la prochaine fois. Astro Pizza vendait 150 à 200 pizzas par jour, ce qui était une activité assez lucrative dans l'ensemble.

Et pourtant, après seulement six mois d’activité, l'entreprise a quitté l'URSS - la forme juridique des coentreprises s'est avérée peu pratique pour les Américains. Il y avait aussi un problème avec la conversion des roubles soviétiques en dollars. Mais par la suite, d'autres « mastodontes » de l'industrie de la restauration ont débarqué sur le marché soviétique.

Déjeuner contre devises étrangères

En 1990, deux restaurants de la chaîne américaine Pizza Hut ouvrent à Moscou à la fois, au centre et à l'ouest de la ville (c'était aussi une joint-venture). Quelques mois plus tard, ils servaient environ 80 000 convives par mois et produisaient 5 000 pizzas par jour ! Les restaurants Pizza Hut de Moscou étaient les plus grands du monde à l'époque et proposaient tous les types de pizzas modernes.

Pizza Hut à Moscou, 1990.

Initialement, la direction de l'entreprise prévoyait d'utiliser principalement des produits soviétiques, mais il s'est avéré qu'il n'y avait tout simplement aucun fournisseur de mozzarella dans le pays et qu'en hiver, il était presque impossible de trouver des légumes frais à l'échelle requise.

De plus, les restaurants Pizza Hut étaient également assez chers pour les habitants et n'étaient pas perçus comme un endroit où manger sur le pouce.

Ici, les roubles étaient acceptés pour le paiement au côté des dollars américains, qui étaient très rares en URSS (ce sont les étrangers qui en possédaient habituellement). Une grande pizza coûtait environ 18 roubles (4 000 roubles actuels) et, en devises étrangères, son coût était presque deux fois plus élevé. Mais les étrangers se rendaient souvent dans les « salles de devises » pour ne pas faire la queue.

Pizza Hut a continué à fonctionner avec beaucoup de succès après l'effondrement de l'URSS. En 1997, Mikhaïl Gorbatchev a lui-même joué dans une publicité de la chaîne, mais l'entreprise n'a pas survécu à la crise de 1998. En 2013, les restaurants Pizza Hut ont rouvert à Moscou, mais ils étaient entre-temps devenus russes de jure et proposaient des pizzas relativement bon marché (600-700 roubles, environ 10 $).

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Fast food selon les normes soviétiques

De nombreux résidents d’URSS n'avaient pas la possibilité d'aller souvent au restaurant, mais cela ne signifiait pas qu'ils ne cuisinaient pas de pizza à la maison. Tout ce qui restait dans le réfrigérateur était utilisé à ces fins et des produits inconnus comme les anchois étaient remplacés par le hareng habituel. « À Riazan, lors de la construction de l'usine de simili cuir, le matériel a été commandé en Italie. Un grand groupe d'Italiens est arrivé pour l’installer et former le personnel, se souvient Konstantin Stepanov. Ils préparaient aussi des pizzas, par l'effet du bouche à oreille les gens ont repris la recette. Ma grand-mère, je me souviens, a essayé d’en faire. »

À la fin des années 1980, l'Institut soviétique du commerce de Leningrad a développé des recettes de pizza que l'on pouvait trouver dans les livres de cuisine de ces années. À la base se trouvait la pâte à levure la plus simple, sur laquelle on proposait d'étaler du coulis de tomate. La recette soviétique permettait d'ajouter en plus de la mayonnaise - l'un des aliments de prédilection à l'époque. Des recettes proposaient de faire des pizzas avec du poisson ou de la viande. Une pizza nécessitait 75 grammes de poisson (le type n'était pas précisé), 10 grammes d'oignons, quelques olives (elles pouvaient être remplacées par des cornichons) et 30 grammes de fromage. On saupoudrait des fins herbes sur le dessus. La pizza à la viande se composait de viande hachée bouillie ou de poulet, d'œufs durs, de fromage, de tomates et d'herbes. Le tout devait être cuit pendant 8 minutes à 300 degrés.

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