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Les droits sur cet article, initialement publié en 2014, sont la stricte propriété du journal Rossiyskaya Gazeta.
Le 5 novembre 1812, un général français blessé a été amené à l'hôpital de son armée dans le village de Krasnoïé, dans la région de Smolensk (Ouest de la Russie actuelle). Les chirurgiens n’ont pas été étonnés de soigner un officier de si haut rang – huit généraux français étaient morts lors de la seule bataille de Borodino quelques mois plus tôt. Cependant, ils ont été surpris de trouver la plume colorée d'une flèche dépassant de sa blessure.
Le général avait été victime de la cavalerie kalmouke, une unité irrégulière de l'armée russe composée de cavaliers originaires des steppes de la basse Volga.
Petits par la taille, redoutables par la réputation, ces combattants étaient les descendants directs des redoutables hordes mongoles de Gengis Khan, et étaient encore largement vêtus et armés comme leurs ancêtres.
Habillés de robes colorées et couronnés de coiffes de fourrure hirsutes dotées de queues de cheval volantes, leur apparition sur les champs de bataille de 1812 a semé la terreur chez les soldats français, qui les ont surnommés « les diables de l'enfer ».
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Malgré le caractère archaïque de leur équipement, celui-ci s'est avéré efficace au combat. L'arc kalmouk était une arme redoutable, enveloppée de crin de cheval et d'écorce de bouleau contre l'humidité. La corde de l'arc en tendon d'animal pouvait tirer une flèche à environ 500 mètres, une portée que les fusils d'infanterie à canon lisse pouvaient à peine atteindre avec précision.
Les flèches des Kalmouks pouvaient également trouver leur chemin dans l'espace étroit séparant les plaques de l’armure des cuirassiers français. Leurs tirs acérés lors de la bataille des Nations à Leipzig en 1813 leur ont même valu un second surnom parmi les Français, celui de « Cupidons orientaux ».
Les cavaliers étaient principalement utilisés pour la reconnaissance, la conduite d'escarmouches d'avant-garde et les raids de guérilla. Cependant, les guerriers de la steppe ont également fait preuve de courage lors d'affrontements frontaux avec l'infanterie française.
Durant la bataille de Fère-Champenoise en 1814, un régiment de cavalerie kalmouke a mis en déroute un carré entier d'infanterie française, capturant environ 1 000 soldats et officiers.
Aux côtés des Kalmouks, combattaient les cavaliers bachkirs des steppes de l'Oural. Ils déconcertaient les Français par des tactiques jusqu'alors inédites.
Tout d'abord, les cavaliers passaient des heures à encercler l'ennemi et à déverser sur lui une pluie de flèches, annihilant souvent les unités françaises.
Comme en a témoigné un officier napoléonien, « ils volaient autour de nos troupes comme un essaim de guêpes, dardant de tous côtés. Il était difficile de les suivre, et les attaques revenaient sans cesse avec les barbares encerclant nos escadrons, tirant des nuées de flèches au son de leurs cris de guerre ».
Lors des assauts directs, un cavalier déplaçait son carquois sur sa poitrine, chargeait son arc de deux flèches et en serrait deux autres entre ses dents. En chevauchant jusqu'à 40 pas de l'ennemi, il tirait les quatre flèches en succession rapide, puis s’emparait de la lance attachée au flanc de sa monture et terminait par une charge. En quelques instants, il pouvait ainsi toucher jusqu'à cinq soldats ennemis.
Étourdis par l'impact de ces techniques anciennes de combat, les forces françaises ont relaté, lors de leur retraite de Russie, des histoires de bêtes sauvages à forme humaine se nourrissant de la chair de leurs ennemis tués.
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Néanmoins, plutôt que des sauvages assoiffés de sang, les habitants des villes allemandes et françaises occupées ont été surpris lorsque les cavaliers de la steppe avançant vers Paris les ont salués amicalement et leur ont fait montre de leurs vêtements et armes.
Dans la ville allemande de Weimar, les Bachkirs ont même été accueillis par le grand poète Goethe. Le vieil Allemand a fait une telle impression sur un commandant bachkir que celui-ci lui a donné son arc et ses flèches. Bien des années plus tard, Goethe était encore fier de présenter à ses invités ce cadeau rare.
Cependant, lorsque l'armée russe a atteint Paris en mars 1814, la garnison française a assisté à un spectacle terrifiant alors qu'elle se préparait à une ultime défense de la cité.
Utilisant la réputation effrayante de la cavalerie qui avait été inculquée à la population par les armées de Napoléon en retraite, le commandement russe a demandé à 500 Kalmouks de se dévêtir jusqu'à la taille et de se badigeonner de sang animal. Ils ont ensuite chevauché à cru vers les murs de Paris, entraînant devant eux des troupeaux de chameaux à bagages dans d’immenses nuages de poussière.
L'effet psychologique a été dévastateur et, visualisant les horreurs d'une défaite aux mains de cette horde souillée de sang, les défenseurs qui leur faisaient face se sont rendus sans condition.
Le 30 mars, les unités kalmoukes de l'armée russe sont entrées dans Paris et ont dressé leur camp sur les Champs-Élysées.
Le site a alors été converti en un immense champ de courses où les cavaliers asiatiques ont impressionné les Parisiens par leurs talents équestres, faisant ainsi preuve de compétences anciennes encore en mesure de faire basculer batailles et guerres.
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