«Chemin de Compostelle russe»: comment j'ai parcouru 120 km à 17 reprises

Tourisme
RUSSIA BEYOND
La Russie a son propre analogue du célèbre chemin de Compostelle. La «ligne d’arrivée» se situe à 120 km à pied de Moscou, dans la Laure de la Trinité-Saint-Serge, où se trouvent les reliques de l'un des saints russes les plus vénérés, Serge de Radonège. Iouna Ioujeva raconte pourquoi elle a déjà parcouru cette distance à 17 reprises.

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Une histoire d’inspiration

Aujourd'hui, cet itinéraire de pèlerinage est un projet de grande envergure. Mais je l’ai découvert à ses balbutiements. J'avais à l’époque regardé le film The Way, la route ensemble avec Martin Sheen, qui parlait du chemin de Compostelle en Espagne - un itinéraire emprunté par les pèlerins se rendant vers le tombeau de l'apôtre Jacques le Majeur dans la ville espagnole de Saint-Jacques-de-Compostelle. J’ai eu envie de le parcourir, au moins en partie. M’étant penchée sur la question, j'ai découvert que l’itinéraire faisait quand même 900 km. Il est divisé en étapes et, pour être considéré comme un pèlerin, vous pouvez ne parcourir que la partie finale, les 100 derniers kilomètres. C'était déjà plus réaliste, et j'ai commencé à planifier mon voyage.

Parallèlement, je me suis demandé si nous avons quelque chose de similaire en Russie. Après tout, il existe beaucoup de hauts lieux de spiritualité dans notre pays. La Laure de la Trinité-Saint-Serge contenant les reliques de Saint Serge de Radonège, par exemple. Les pèlerins s'y rendent en pèlerinage depuis des temps anciens. J'ai commencé à chercher des informations et suis tombée grâce aux réseaux sociaux sur un groupe de passionnés qui organisaient justement un voyage à pied jusqu’à la Laure.

Bien sûr, j’avais peur. Je ne suis pas une randonneuse chevronnée, et en plus c'était l'hiver. Notre parcours, tout comme le chemin de Compostelle, était divisé en étapes, et au moment où j'ai rejoint la troupe, ils se dirigeaient déjà vers la dernière étape, dont le point d’arrivée est la Laure. J'ai décidé de tenter ma chance et je les ai accompagnés. Pas mal de monde avait répondu présent, environ 50 personnes. Beaucoup, comme moi, voulaient juste essayer. Et nous l'avons fait ! Nous avons été chaleureusement accueillis au monastère. La route elle-même m'a fait forte impression. Par la suite, les organisateurs ont rassemblé des gens pour le printemps. J’ai compris que j'avais franchi une étape, que ça m’avait plu, et que je devais désormais essayer de réaliser tout le parcours.

Premières marches en Russie et en Espagne

Pour le printemps, j’avais également prévu de faire le chemin de Compostelle, mais la route de la Laure était prévue avant. C’était une grande randonnée avec 30-40 personnes. Nous avons marché pendant cinq jours à raison de 25-30 km quotidiens. À ce moment-là, je n'étais tout simplement pas prête à cela physiquement, je n'avais pas calculé mes forces. Mais cela n'a rien gâché. Le chemin part de la place Rouge, à partir du « kilomètre zéro », la première étape traverse Moscou. Je me souviens à quel point j'étais étonnée que la capitale, même son centre que je connais si bien, s'ouvre à moi sous un jour totalement nouveau. L'itinéraire est aménagé de telle sorte que vous marchez beaucoup à travers des espaces verts et des parcs, et pas le long d’avenues. Vous découvrez des espaces naturels que vous n'aviez jamais vus auparavant. Par exemple, le magnifique Parc sur la Yaouza. Il s'étend de la station de métro Jardin botanique au périphérique de Moscou (MKAD). Nous avons terminé la première étape dans une ancienne église. Bien sûr, j'étais sur les rotules, mais pleine d’inspiration.

Durant la deuxième étape, les ruisseaux avaient débordé et il fallait passer par la forêt Pirogovski. Les organisateurs avaient écrit qu’il fallait se préparer à ce qu’il y ait de la gadoue et de l’humidité et, par conséquent, seules 17 personnes étaient du voyage. J'ai donc appris à mieux connaître les organisateurs et le parcours.

Ensuite, j’ai fait mon voyage en Espagne. Marcher le long du camino m'a beaucoup marquée et j'ai réalisé que je voulais qu’il y ait quelque chose de semblable chez nous. Afin de sortir chez soi et de pouvoir suivre un chemin balisé. C’est là que j’ai commencé à soutenir activement le projet – de façon entièrement bénévole.

Ce premier printemps le long de la Route était exceptionnellement beau. Je crois que pour la première fois de ma vie j'ai vu la forêt russe au mois de mai et admiré la nature qui s’éveille après l'hiver et reprend vie. Et vous reprenez vie avec elle. Ce périple s’est terminé en été, et j'ai pu observer comment la forêt change : le printemps arrive en force, puis l'été s’épanouit.

L'espace, les champs à perte de vue, une sensation de liberté quand vous respirez à pleins poumons, tout cela fait forte impression sur le citadin. Après tout, nous vivons au quotidien avec un champ de vision très limité, alors qu’ici, il y a des paysages sans fin.

On devient facilement accro à une telle beauté. J'ai ensuite voulu admirer ces paysages en automne et en hiver. Désormais, je ne peux pas imaginer ma vie sans la Route : je la parcours 3-4 fois par an.

La voie de la gratitude

Bien sûr, l’histoire de l’itinéraire est liée au pèlerinage, mais il ne sert pas seulement à relier des lieux religieux. Il traverse également des sites historiques et pittoresques. Vous pouvez le parcourir dans une optique de prière, pour vous retrouver vous-même, ou pour rencontrer la nature et le monde dans son ensemble. Bien sûr, on tombe sur des groupes de pèlerins accompagnés de prêtres qui passent la nuit dans les monastères. Mais aujourd'hui, quiconque peut parcourir le chemin, quel que soit son objectif personnel. Pour moi, par exemple, c'est à chaque fois un itinéraire de gratitude. Une occasion de dire au monde « merci ! » pour la beauté qui nous entoure.

De plus, il s'agit souvent de trouver des réponses à certaines questions personnelles. Je me souviens que, quand j'ai parcouru l’itinéraire pour la première fois, je me sentais mieux intérieurement. Comme si je me reconnectais. Dans la vie de tous les jours, vous avez l'habitude de jouer certains rôles - mère, épouse, membre d’une équipe au travail. Ici, vous vous détendez, rien n'est exigé de vous.

Au fil des ans, j'y suis allée aussi bien seule qu'en groupe, et j'ai réalisé que j’appréciais beaucoup les collectifs de 10-12 personnes. Maintenant, avant de me mettre en marche, je lance un appel sur les réseaux sociaux et je forme un petit groupe. Je ressens chaque fois une forte charge émotionnelle et de la joie de communiquer avec d’autres gens. Tous sont inspirés, chacun a quelque chose à donner. Quelqu'un prépare à manger, une autre personne a une trousse de secours miracle…

Équipement et commodités

Au fil du temps, grâce aux efforts communs, le chemin a commencé à être bien équipé. L'année dernière, des panneaux officiels « Route de la Laure » indiquant la distance jusqu'à destination sont même apparus dans les rues de Moscou. Des activistes défrichent la forêt, placent des revêtements de sol dans les endroits marécageux, installent des ponts. Des marquages ​​sous forme de flèches montrant la direction sont apparus dans les zones forestières. Par analogie avec le « camino », nous avons créé un « passeport de pèlerin », que nous appelons « Lettre de route », avec une carte de l'itinéraire et des pages où vous pouvez apposer des tampons spéciaux lors du passage d'une étape particulière. Le projet dispose d'un site Web informatif où vous pouvez télécharger le tracé de l'itinéraire, qui fonctionne avec maps.me en mode hors ligne. Les curiosités et points de vue y sont également signalés. Il y a des recommandations afin de se rendre au point de départ de chaque étape.

En dehors de Moscou, l’itinéraire est à distance de marche de la ligne de chemin de fer de Iaroslavl, il est donc facile de se rendre à n'importe quelle étape hors de la ville. Aujourd'hui, le sentier est agréable car il y a toutes les conditions pour le parcourir comme bon vous semble. À votre rythme, avec vos objectifs. Quelqu'un mettra un mois, un autre procèdera par petits sauts.

Des infrastructures sont apparues. Des activistes ont ouvert des maisons d'hôtes où vous pouvez passer la nuit pour une modique somme.

En termes d'équipements, des chaussures de trekking de bonne qualité sont importantes. Vous avez également besoin de vêtements confortables, et d'un sac à dos pour avoir les mains libres. Assurez-vous d'apporter de l'eau potable avec vous. Bien sûr, il y a des sources le long du sentier. On trouve également de l’eau dans les monastères. Des bassins sont même installés par endroit, en été, il fait bon s'y rafraîchir.

Désormais, je peux dire avec certitude que ce chemin vous transforme. Ce n'est pas seulement lié à l'effort physique. L’itinéraire est conçu pour vous ressourcer intérieurement. Comme l'a dit Saint Séraphin de Sarov : « Qui vient à moi sera mon hôte. Qui viendra à moi sera mon enfant ».

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