Cérémonie solennelle de levée du drapeau de la Russie par les membres de la Société cosaque militaire du Kouban le Jour de l'Unité nationale sur la place principale de la ville de Krasnodar
Vitali Timkiv/SputnikRussia Beyond désormais sur Telegram ! Pour recevoir nos articles directement sur votre appareil mobile, abonnez-vous gratuitement sur https://t.me/russiabeyond_fr
Parmi les fêtes nationales les plus appréciées, lors desquelles on décrète un jour férié officiel dans tout le pays, figure l'une des plus récentes - la Journée de l'unité nationale. Elle tombe le 4 novembre et souvent les autorités y rajoutent un jour, reportant parfois même le week-end pour obtenir un « pont ». Ainsi, en ce mois de novembre gris et froid, les Russes ont la possibilité de souffler, de voyager dans des régions plus chaudes, ou simplement de s'envelopper dans une couverture à la maison. Mais à quoi renvoie ce jour férié ?
La Journée de l'unité nationale a été officiellement instituée dans le pays en 2005. Malheureusement, même maintenant, tous les Russes ne comprennent pas ce qu’ils célèbrent. Mais la date est profondément ancrée dans l'histoire, et plus précisément dans le début du XVIIe siècle, lorsque le peuple russe s'est uni pour sauver le pays de l'occupation étrangère. Mais reprenons depuis le début…
En 1584, le tsar Ivan le Terrible mourut, ne laissant pour tout héritier que Fiodor Ier, qui était en mauvaise santé et n’avait lui-même pas d'enfants. Après sa mort, la dynastie des Riourikides, qui régnait sur la Russie depuis le IXe siècle, prit fin.
La noblesse russe - les boyards - élut un nouveau tsar. C’était Boris Godounov, le frère de l'épouse de feu Fiodor Ier, qui avait eu une grande influence sur ce dernier. Cependant, après quelques années de règne, un homme proclamant être le véritable héritier d'Ivan le Terrible - le tsarévitch Dmitri -, apparut en Russie, soutenu par l'armée polonaise. Ivan le Terrible, en effet, avait un fils, Dmitri, mais il était mort enfant dans des circonstances troubles.
Portrait du tsarévitch Dmitri par Mikhaïl Nesterov, 1899
Musée Russe/Domaine publicIl y avait parmi le peuple une rumeur selon laquelle Dmitri aurait été tué sur les ordres de Godounov, qui espérait ainsi obtenir un pouvoir sans partage. Cette version a été utilisée par l'imposteur à ses propres fins. Par la suite, elle s'est propagée via la culture populaire (grâce au poète Alexandre Pouchkine et sa tragédie Boris Godounov, d'où est né le célèbre opéra du même nom du compositeur Modeste Moussorgski).
>>> La mystérieuse mort de Dmitri, dernier fils d'Ivan le Terrible
Faux Dmitri – c’est sous ce nom que l'imposteur resterait dans l'histoire – a été reconnu comme l'héritier du trône russe dans la République des deux nations Pologne-Lituanie. Il a convenu avec les Polonais que s'ils soutenaient sa revendication au trône et l’appuyaient militairement, il leur donnerait une partie des terres occidentales de la Russie.
Le début du XVIIe siècle a été l'une des périodes les plus turbulentes de l'histoire de la Russie, connue sous le nom de Temps des troubles. Après la mort de Godounov en Russie, les boyards furent incapables de partager le pouvoir. En conséquence, en 1605, Faux Dmitri, soutenu par les Polonais, a pu entrer à Moscou et occuper le Kremlin. Il a même réussi à organiser un somptueux mariage avec une noble polonaise, Marina Mniszech, et à la couronner tsarine de Russie.
Après un certain temps, les boyards se sont néanmoins soulevés et Faux Dmitri a été tué sans gloire. Le boyard Vassili Chouïski est devenu tsar.
Meurtre du faux Dmitri par Constantin Makovski
Domaine publicCependant, un autre imposteur est immédiatement apparu - Faux Dmitri II, annonçant à nouveau être le fils du tsar ayant survécu miraculeusement. Même Marina Mniszech l'a « reconnu » et les Polonais ont rassemblé une grande armée pour soutenir l'imposteur, prenant les villes russes les unes après les autres. En 1608, le nouveau Faux Dmitri s'est bâti une résidence près de Moscou - à Touchino (d'où son surnom de « voleur de Touchino »). Il n'avait pas encore pris la capitale, mais de vastes territoires se trouvaient de fait sous son pouvoir. Beaucoup de Russes sont passés du côté de Dmitri, croyant qu'il était le fils d'Ivan le Terrible.
Vassili Chouïski a signé un accord d'aide avec les Suédois. Le roi polonais Sigismond III, mécontent, a ouvertement déclaré la guerre à Chouïski. Faux Dmitri s’est livré à diverses manipulations, cherchant à attirer les Tatars et les Turcs à ses côtés, tandis que ses partisans revenaient au service direct du roi de Pologne. En conséquence, en 1610, l'imposteur a été exécuté par une foule en colère ; les Polonais, quant à eux, ont occupé Moscou et le Kremlin, ce qui signifiait qu'ils avaient pris le pouvoir dans le pays. Chouïski a été envoyé dans un monastère, et officiellement un conseil de boyards, les « sept boyards », a été mis en place pour diriger. Les boyards ont signé un traité avec les Polonais, reconnaissant Władysław Vasa, le fils du roi polonais Sigismond III, en tant que tsar russe.
Appel aux Citoyens de Nijni Novgorod par Kouzma Minine, œuvre de Mikhaïl Peskov
Domaine publicPendant la guerre russo-polonaise, le peuple russe pour la première fois a réuni une milice populaire afin de libérer le pays des envahisseurs étrangers sur fond de vide du pouvoir. Ils ont entrepris la première campagne contre Moscou en 1611, mais elle a échoué et les milices ont été brutalement vaincues, beaucoup de ses membres ayant été tués.
>>> Bataille pour Moscou: comment l’État russe a survécu et vaincu en 1612
La deuxième campagne a eu lieu en 1612 et était dirigée par le prince Dmitri Pojarski et le marchand Kouzma Minine. Un monument en bronze dédié à ces héros se dresse aujourd'hui sur la place Rouge à Moscou. Échevin de Nijni Novgorod, Minine utilisa son autorité pour rassembler le peuple, tandis que Pojarski dirigeait le volet militaire. Pour la première fois dans l'histoire de la Russie, le peuple a combattu côte à côte avec la noblesse contre une menace extérieure.
Expulsion des Polonais du Kremlin par Ernst Lissner
Domaine publicRepoussant plusieurs attaques des troupes polonaises, la milice atteint Moscou et entame le siège de Kitaï-Gorod et du Kremlin. Pendant ce long siège, de nombreux Polonais sont morts de faim, les autres se sont rendus. Les Russes ont libéré du Kremlin et gracié une grande partie des assiégés. En savoir plus sur l'exploit de la milice ici.
En 1613, après le Temps des Troubles, la dynastie Romanov monte sur le trône. En 1649, le deuxième tsar Romanov, Alexeï Mikhaïlovitch, ordonne d’instituer le 22 octobre jour de célébration de l'icône de Kazan de la Mère de Dieu en mémoire de la libération de Moscou et de la Russie des Polonais en 1612. Selon le calendrier grégorien, cette date tombe le 4 novembre, et c’est ce jour-là qu’il a été décidé de créer la Journée de l'unité nationale.
Cependant, il existe une autre raison de célébrer la Journée de l'unité nationale en novembre. De 1918 à 1991, l'URSS célébrait le 7 novembre l'anniversaire de la révolution de 1917 (selon l'ancien calendrier, cela s'est produit le 25 octobre). Les gens à travers le pays sont habitués à avoir un jour férié (et une occasion de faire la fête) en novembre. Après la chute de l'Union, il fut décidé d'annuler la célébration et le jour de congé. Il fallait créer pour le nouveau pays un nouveau jour férié, non pas soviétique, mais russe.
Des gens dansent lors de la célébration du Jour de l'Unité nationale, Moscou, 4 novembre 2014
Sergueï Karpoukhine/Reuters>>> Trois facteurs majeurs qui ont contribué à la chute de l'URSS
« [Le nouveau jour férié] est apparu pour un certain nombre de raisons compréhensibles. Premièrement, dans un pays où plus de 160 langues sont parlées, où vivent des dizaines de peuples professant toutes les religions du monde, l'idée d'unité est la seule nécessaire à la coexistence pacifique et au développement de l'État, écrit l'ancien ministre de la Culture de la Russie Mikhaïl Chvydkoï. Deuxièmement, la création d'une nouvelle nation - russe et non soviétique - exigeait de nouveaux symboles. Il fallait trouver un événement dans les environs immédiats du 7 novembre pour créer une fête qui puisse rivaliser avec la tradition soviétique ».
« En Russie, il n'y avait pas un seul jour férié associé aux événements d'avant la Révolution. Ce jour est devenu le jour du nationalisme russe par essence », a déclaré l'un des idéologues de la création de ce jour férié, Vladislav Sourkov.
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