Vacances d’été: comment les Russes s’adaptent aux règles de jeu imposées par la Covid-19?

Lifestyle
IRINA DOUBOVA
Bien qu’après près de trois mois de confinement la vie bouillonne de nouveau dans les agglomérations de Russie, la pandémie de Covid-19 a tout de même eu un impact considérable sur les projets de vacances estivales des citoyens et résidents du pays. Certains voient dans la datcha une solution locale pour se reposer et y passer l’été. Pendant ce temps, le sujet de la deuxième vague divise l’opinion, mais les Russes espèrent en être épargnés pour une rentrée tranquille.

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Le pic de la crise du coronavirus en Russie semble désormais être passé, mais pourtant elle a eu d’importantes conséquences sur les projets estivaux que pouvaient avoir les habitants de ce pays qui a, comme tant d’autres, dû fermer en mars dernier ses frontières dans le souci de faire obstacle à la propagation de la Covid-19. Russia Beyond a contacté quelques citoyens en Russie afin qu’ils nous fassent part de leur ressenti quant à cette difficile période. « Hélas l'épidémie de Covid-19 a eu un impact considérable sur mes projets de vacances. Depuis lors c'est l'incertitude totale. On ne sait pas du tout quand est-ce que les choses vont revenir à la normale, quand est-ce que les frontières seront rouvertes », nous témoigne Freedom Lotiko, cet étudiant tchadien de 24 ans à l’Université russe de l’Amitié des Peuples (RUDN).

Récemment, la date de la reprise des vols internationaux a d’ailleurs été repoussée au 1er août. En même temps, la Russie, troisième pays en termes des cas de contamination, est absente de la liste des États dont les citoyens sont autorisés à se rendre dans l’Union européenne depuis le 1er juillet.

Mais même ceux qui optaient passer leurs vacances sur les plages de la mer Noire ont vu leur projets modifiés.  

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On déplie les bagages 

Ainsi, Freedom, qui songeait se rendre à Saint-Pétersbourg pour y célébrer les fameuses « nuits blanches » attirant fin juin et début juillet des hordes de touristes dans la capitale dite du Nord, a donc « pris la résolution de passer [ses] vacances à Moscou le temps que la situation se temporise ». Et, comme le montrent les statistiques, le cas de ce résident est loin d’être isolé, mais reflète plutôt une tendance générale qui se profile dans le pays.  

En effet, selon un sondage annuel du Centre panrusse d’étude de l'opinion publique (VTsIOM), 29% des Russes auraient cette année changé leurs projets estivaux. Par manque de moyens financiers du fait de la crise ou à cause de la fermeture des frontières et autres complications, 61% des répondants au sondage compteraient passer leurs vacances à la maison, sans voyager. Un Russe sur dix opte cette année pour le tourisme interne et envisage de visiter d’autres villes et agglomérations. Le taux de ceux qui s’apprêtent à effectuer un séjour à l’étranger n’est que de 4%, soit une baisse de 9% par rapport à l’année dernière.

Pour sa part, l’agence Romir, qui a mené une enquête auprès de 40 000 personnes dans 220 villes de Russie, déduit que la proportion de Russes contraints d'abandonner leurs vacances prévues cette été s’élève jusqu’à 50%.

Quand la sûreté prime sur nos envies  

Aliona Podzorova, une étudiante de 18 ans à l’Université des Finances du gouvernement russe, à Moscou, avait prévu cet été de se rendre en Espagne avec ses amis, voyage qui a été annulé du fait de la fermeture des frontières européennes. Comme elle l’explique à Russia Beyond, elle aurait aussi aimé se rendre en République de l’Altaï pour y voir les territoires montagneux ou encore à Saint-Pétersbourg, mais ces voyages dépendront des restrictions imposées par le gouvernement russe, qui encourage à éviter tout déplacement non nécessaire. Aliona comprend pour autant ces mesures de sécurité :  « mon anniversaire est en août, et je voulais me rendre à la mer avec mes amis. Mais après une telle situation tant difficile, nous avons tous besoin de repos ».

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Les projets d’Alexandra Charapova, étudiante moscovite à l’École des hautes études en sciences économiques, interrogée par la rédaction, ont aussi dû être remodelés du fait de l’épidémie. Celle-ci avait prévu de participer à une école estivale de mathématiques à Sotchi, ou encore de voyager en tant que bénévole en Europe. Comme de nombreux étudiants dans les grandes villes russes, elle a choisi de passer le confinement auprès de sa famille : « quand la quarantaine a commencé, j’ai décidé de rentrer en Sibérie auprès de mes parents, car c’était plus sûr qu’à Moscou ». À l’image de la plupart des Russes qui aiment voyager l’été, elle espère que l’Union européenne rouvrira ses frontières à la Russie pour le mois d’août, selon l’avancement de la situation.

Cette situation de doute affecte tout le monde et pas seulement les étudiants, comme Maria, cette mère de deux enfants et professeur d’anglais à l’Université linguistique d’État de Moscou. Comme beaucoup de Russes, avides de Soleil et aimant la mer et ses côtes, elle comptait se rendre en famille cet été en Grèce, en Turquie, en Crimée ou encore à Anapa, dans la région de Krasnodar (Sud de la Russie). Mais le risque de la contamination restant présent, elle préfère garder ses enfants en sécurité loin de ces endroits frappés par le tourisme de masse et où le coronavirus pourrait se diffuser facilement.

La datcha à la rescousse des estivaux 

D’après le même sondage du VtSIOM, près d’un Russe sur trois (31%) projettent de se reposer cet été à la datcha, cette maison de campagne traditionnelle avec un petit jardin potager, contre 26% l’année dernière. Cette résidence secondaire dont la tradition remonte jusqu’à l’Empire russe semble donc être la solution privilégiée des Russes pour profiter des vacances cet été à moindre coût tout en respectant les limitations de déplacement. 

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D’ailleurs la datcha a regagné son attractivité bien avant le début de la période estivale : lorsque le confinement général a été déclaré. Ainsi, le service de presse de la principale plateforme russe de petites annonces a confirmé à l’agence TASS que la demande sur ces résidences avait augmenté de 93,4%. Quitte à rester isolé et pratiquer le télétravail, autant le faire en pleine nature. Des enquêtes menées à Kazan et Nijni Novgorod montrent également que la demande de rénovation, construction ou location de ces chalets en zone rurale a augmenté sur la période d’avril à mai 2020, alors qu’une tendance de désintéressement avait été observée sur ces dernières années. Quitte à rester isolé et pratiquer le télétravail, autant le faire en pleine nature.

Bien que le confinement soit terminé depuis mi-juin, les Russes reposent donc encore sur leur datcha pour y passer des vacances, une alternative au voyage à l’étranger. « Les plans de cet été sont de passer du temps à la datcha », confirme Maria, qui souhaite s’installer dans cette résidence secondaire avec sa famille en cette période de pandémie. 

Vers une seconde vague ?

Malgré toutes ces restrictions de déplacement, la crainte d’une seconde vague de l’épidémie de coronavirus en Russie subsiste. Cependant, nul ne peut garantir qu’elle se produira vraiment. À travers les témoignages donnés à Russia Beyond, on observe que le sujet divise l’opinion. 

Pour Aliona par exemple, malgré les strictes précautions de distanciation sociale respectées par la population russe, la seconde vague serait inévitable. Mais il reste difficile de mesurer, selon les témoignages de nos interlocuteurs, le respect du port du masque ou encore de l’application de gel hydroalcoolique, bien que ces derniers soient obligatoires dans les transports en communs par exemple.

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Alexandra de son côté pense que la Russie sera épargnée d’une seconde vague, ayant confiance en le respect des gestes barrières, mais n’en exclut pas la possibilité. Freedom estime aussi qu’il est « très difficile de dire avec une exactitude si une deuxième vague serait envisageable ou non ». Du point de vue de Maria, la deuxième vague toucherait la Russie « à l’automne, ce [qu’elle] n’espère pas pour autant ». Elle considère que la Russie ne sera pas une exception étant donné qu’aucun pays du monde ne s’est totalement débarrassé du coronavirus.

Pour le moment, la priorité est le retour à un quotidien normal, de manière progressive. Mais cette éventualité d’un rebond de l’épidémie limite toute planification future, tant pour les vacances cet été que d’un point de vue professionnel ou étudiant à la rentrée.

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