« Nous, Nicolas II » ! Aujourd’hui, vous n’entendrez les Russes prononcer cette phrase que dans un contexte ironique. Cependant, il est vrai que les monarques russes se désignaient « nous ».
Ce nous de majesté (pluralis majestatis) plonge ses racines dans le Talnakh. Dans cette Bible hébraïque, le nom de Dieu est utilisé au pluriel pour désigner ainsi sa puissance. Il y est en outre utilisé par les dirigeants :
« Puis, Absalom dit à Ahitofel : "Tenez conseil entre vous. Qu’allons-nous faire ?" » (Deuxième livre de Samuel – chapitre 16).
En ce qui concerne les dirigeants, dans le nous de majesté est placé le sens de la représentation en leur personne du peuple tout entier.
Le premier des dirigeants russes à l’employer fut le grand-prince de Moscou Vassili III, père d’Ivan le Terrible. « Avec la bénédiction divine, nous, le grand souverain Vassili... », c’est ainsi que résonnait son titre officiel.
Dans sa correspondance privée (par exemple dans ses lettres au prince Andreï Kroubski), Ivan le Terrible alternait le « nous » et le « je », ce dernier ayant été utilisé dans les parties les plus émotionnelles de ses missives. Et pourtant, son titre officiel ne comprenait pas le nous de majesté. À partir d’Alexis Ier, le pluralis majestatis est employé dans tous les titres officiels des tsars de la lignée des Romanov.
Une légende bien répandue assure que le « nous » est entré dans l’usage à partir du moment où Ivan et Pierre ont occupé ensemble le trône entre 1682 et 1689. Les deux ont en effet signé pendant cette période des documents officiels, dans lesquels ils sont mentionnés tous les deux, ce qui donnait : « Les tsar et les grands-princes Ivan Alexeïevitch et Pierre Alexeïevitch, souverains de la Grande, Petite et Blanche Russies ». Toutefois, l’expression a existé dans la tradition russe avant comme après eux.
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