Cinq choses inhabituelles que les enfants demandaient au Père Noël soviétique

Alexander Makarov/Sputnik
Ded Moroz («Père Gel», la version soviétique et russe du Père Noël) avait un statut quasi divin en Union soviétique. En ce qui concerne les idées de cadeaux, la plupart des enfants pensaient que Ded Moroz était tout puissant. Mais alors que certains enfants demandaient toutes sortes de cadeaux, d'autres voulaient simplement qu’il tende l'oreille et voie ce qui se passe dans le monde.

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Cadeaux surprise

Au début des années 1920, le père de l'Union soviétique, Vladimir Lénine, rejoignait régulièrement les enfants lors des célébrations de Noël. Pourtant, il y avait des signes qu’un vent de changement soufflait…

Quand il s'agissait des idées de cadeaux de Noël, la plupart des enfants soviétiques pensaient que le ciel était la limite du Père Gel.

Au début, d'ardents partisans du communisme ont tenté de remplacer Noël par une fête liée au Komsomol (organisation de jeunesse soviétique). À la fin des années 1920, lorsque l'athéisme est devenu une partie intégrante de l'idéologie d’État, la grande majorité des fêtes dites traditionnelles ont été annulées en URSS, car considérées comme des vestiges de l'ère tsariste bourgeoise.

Noël, avec sa forte connotation religieuse, a été interdit, tout comme les arbres qui l'accompagnent. « Si vous abattez des sapins, vos journées seront sombres et grises. Si vous vous joignez à la célébration de Noël, vous n'êtes pas un pionnier » : les écoles soviétiques ont volontiers adopté et répandu ce nouveau slogan.

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Cette interdiction générale n'a cependant pas résolu le « problème », et de nombreuses personnes ont continué à célébrer secrètement leur fête préférée, malgré l'interdiction.

Le Père Gel soviétique passe du temps à parler avec les enfants.

« Même si nous n'avions pas de sapin de Noël, je croyais toujours en Ded Moroz, se souvenait le célèbre acteur soviétique Iouri Nikouline dans ses mémoires. Le soir du Nouvel An, je laissais toujours une de mes chaussures à la porte, dans l’espoir que Ded Moroz y poserait un jouet ou une friandise. Je laissais parfois mes deux chaussures dans le hall d'entrée pendant plusieurs jours pour que Ded Moroz en profite… ».

Un matin, Nikouline, qui a eu sept ans en 1928, a repéré un morceau de pain de seigle saupoudré de sucre enveloppé dans une feuille de papier. « Vraiment ? Ded Moroz est devenu fou ou quoi ? », a pensé le garçon, ignorant que ses parents étaient simplement à court d'argent et ne pouvaient même pas acheter un jouet bon marché pour leur fils bien-aimé… Le lendemain, à la stupéfaction et au soulagement de Nikouline, il a trouvé un pain d’épices sculpté en forme de poisson dans sa chaussure. Il était aux anges.

En 1935, Staline a décidé de rendre le sapin festif aux enfants. L’arbre a donc fait son grand retour, salué comme un symbole de bonheur intégré à la réalité socialiste soviétique. La tradition consistant à célébrer l'arrivée du Nouvel An est devenue vitale pour la majorité des gens.

Mandarines

« L'odeur de la vodka, des sapins et de la morue, des mandarines, de la cannelle et des pommes ! » : c’est ainsi que le poète phare et lauréat du prix Nobel Joseph Brodsky a dépeint l’esprit du Nouvel An.

Rien ne décrit mieux Noël que des mandarines sucrées et juteuses. D'abord importées d'Allemagne en Russie dans les années 1870, elles sont devenues près de cent ans plus tard les symboles les plus adorables du début heureux d'une nouvelle année. Au début du XXe siècle, certaines familles moscovites avaient pour tradition de mettre des mandarines sur leurs arbres de Noël. Les fruits étaient souvent emballés à la main dans une feuille d’aluminium.

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Entre les années 1920 et 1960, les mandarines étaient difficiles à trouver en URSS. Seuls ceux qui vivaient dans le sud du pays, sur la côte de la mer Noire du Caucase (comme en Géorgie et en Abkhazie) avaient accès à ces fruits exotiques.

Certains enfants croient encore que le Père Gel, ou Ded Moroz, peut les aider à sauver le monde.

Les choses n’ont changé de l'autre côté du rideau de fer qu'au début des années 1960, lorsque les mandarines sont finalement devenues disponibles dans presque tous les recoins de l'Union soviétique. Un accord révolutionnaire a été conclu entre le Maroc et l'URSS, après quoi ces fruits ont été importés du pays d'Afrique du Nord en échange de tracteurs, de machines agricoles et d'engrais soviétiques. Les mandarines ne coûtaient que 1 rouble 30 kopecks le kilo (l'équivalent d’environ un euro). Le salaire mensuel moyen à l'époque était de 80 roubles.

« Je rêvais d’avoir une boîte de mandarines, raconte Boris, 71 ans. Au milieu des années 50, l'odeur des mandarines à Moscou était aussi rare que celle de la liberté. J'ai écrit plusieurs lettres à Ded Moroz, lui demandant de m'apporter un sac de mandarines. J'ai promis de bien me comporter et d'obtenir les meilleures notes à l'école en échange ».

Assimiler une nouvelle compétence

Dans les années 1960, pendant le dégel de Khrouchtchev, l’atmosphère a tellement changé que certains enfants ont choisi de ne pas déranger Ded Moroz avec des demandes de cadeaux banales comme des trains pour garçons ou des machines à coudre pour filles.

Dans leurs lettres au Père Gel, les enfants soviétiques décrivaient leurs peurs et leurs rêves.

Dans leurs lettres au vieux magiciens, les enfants ont décrit leurs rêves les plus inaccessibles. « Je voulais apprendre à nager, se souvient Natalia, 69 ans. Le problème était que j'avais commencé à soupçonner la réalité sur Ded Moroz. Je n’ai pas complètement perdu ma foi en lui, mais je me suis demandé à plusieurs reprises s’il était réel. Je me souviens comment j'ai décidé de découvrir la vérité en demandant quelque chose de pratiquement impossible. J'ai dit que je voulais apprendre à nager. En fait, c'est l'année où j'ai finalement arrêté de croire au Père Gel, car je n'ai finalement jamais appris à nager. Pendant ce temps, mon camarade de classe et meilleur ami Arseni m'a dit un jour qu'il avait écrit une lettre à Ded Moroz pour lui demander une bonne santé pour sa mère et sa grand-mère. Il avait dit qu'il voulait devenir médecin. De nombreuses années plus tard, son rêve est devenu réalité », note Natalia.

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S’envoler vers les étoiles

Le célèbre cosmonaute soviétique Iouri Gagarine est entré dans les livres d'histoire non seulement en tant que premier homme dans l'espace, mais aussi comme un playboy au sourire charmeur qui a changé le cours de l'histoire. Son vol orbital de 108 minutes, le 12 avril 1961, a lancé l’ère de l'exploration spatiale. Son charisme et sa détermination à en faire toujours plus ont fait de lui un modèle pour des générations d'hommes soviétiques.

Le Père Gel et sa petite-fille Snegourotchka étaient indispensables à toute célébration du Nouvelle An en URSS.

Dmitri avait 7 ans lorsque Gagarine s’est envolé pour l'espace à bord de Vostok 1. « J'ai été tellement impressionné que j'ai perdu l'appétit et suis tombé malade d'une mystérieuse maladie. J'ai manqué plusieurs jours d'école parce que je ne pensais qu'à Iouri Gagarine ! Je demandais sans cesse à mes parents : comment a-t-il fait ? J'ai écrit ma lettre à Ded Moroz huit mois avant la date prévue, je ne pouvais tout simplement pas attendre la nouvelle année ! Je n'ai pas tourné autour du pot, je pense que j'ai même oublié de dire bonjour, en demandant à Ded Moroz de m'aider à voler vers les étoiles dès que possible ». Dmitri dit que tous les garçons de son quartier étaient obsédés par les voyages dans l'espace depuis plusieurs années, espérant qu'un jour ils voleraient vers la Lune.

Sauver le monde

Nina avait 6 ans lorsqu'elle a écrit, en 1979, sa première lettre au « Père Noël soviétique ». Elle a décidé de confier ses inquiétudes et ses peurs, la plus grande étant la crainte d’une guerre entre l'URSS et les États-Unis. Le père de Nina, Victor, un illustrateur talentueux, avait peint à sa fille un sombre tableau de la crise des missiles de Cuba, qui avait presque amené Moscou et Washington au point de non-retour, en d’autres termes, au bord de la guerre nucléaire en 1962.

De nombreux enfants comptaient sur le Père Noël soviétique pour réaliser leurs souhaits.

Nina, terrifiée, a imaginé le monde entier convulsé dans une guerre qui se terminerait par une destruction nucléaire. « Dans ma courte lettre au grand-père Gel, je lui demandais de sauver le monde, se souvient Nina, 47 ans. J'ai souligné qu'à mon humble avis, sa belle assistante Snegourotchka devrait utiliser tous ses charmes pour réconcilier les deux parties. Et je n’étais pas seule à avoir de telles craintes. Certains de mes camarades de classe m'ont dit plus tard qu'ils imaginaient souvent une guerre nucléaire dans leurs pires cauchemars ».

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