À quel lieu se réfère réellement l’expression russe «chez le diable à koulitchki»?

Éducation
SOFIA POLIAKOVA
Si l’on en croit l’une des versions, le diable se trouve tout près du Kremlin de Moscou.

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La langue russe a une expression très imagée et très populaire : « chez le diable sur koulitchki ». C’est ce que l’on dit lorsque l’endroit où l’on doit se rendre est très éloigné et que l’on se sent frustré par le long voyage qui nous attend. Toutefois, le sens littéral de cette expression n’est pas clair pour les Russes eux-mêmes.

Qu’est-ce que cela signifie ?

L’expression « chez le diable sur koulitchki » signifie un endroit inconnu ou très éloigné. « Koulitchki » est une forme déformée du mot « koulijki ». Il s’agit d’un endroit propre, non boisé et plat, ainsi que de zones marécageuses. Selon une version, l’expression phraséologique est apparue en raison de l’attitude superstitieuse à l’égard des marais – selon les croyances populaires, c’est là que vivait les esprits malins, d’où cette mention du diable.

Koulichki (ou Koulijki) est toutefois également le nom d’un quartier historique de Moscou situé près du district de Kitaï-Gorod, non loin du Kremlin. Cependant, cet ancien nom n’est pratiquement plus utilisé, et l’expression « chez le diable » ne lui est plus associée dans la conscience collective, et ce, bien qu’une version très répandue affirme que c’est précisément avec ce quartier que l’origine de l’expression phraséologique est liée.

Hospice de Koulichki

L’historien Ivan Sneguirev a écrit au XIXe siècle le livre Moscou. Description historique et archéologique détaillée de la ville. Il y décrit un incident survenu sous le règne du tsar Alexis Ier : un esprit impur se serait installé dans l’hospice pour orphelins et enfants trouvés de Koulijki, non loin du couvent de Saint-Jean-le-Précurseur de Moscou. Il ne laissait aucun répit aux vieilles femmes travaillant dans cet établissement : il les jetait hors du lit, s’agitait dans les coins et sur les poêles, criait diverses méchancetés et les berçait dans des berceaux pour bébés. La rumeur de ce malheur parvint au tsar, qui ordonna aux prêtres de chasser l’esprit maléfique de l’hospice par des prières.

Cependant, en réponse à ces dernières, le démon se mit à accuser les prêtres eux-mêmes de diverses iniquités, et il fut impossible de s’en débarrasser. C’est alors que l’un des acolytes parla au tsar du moine Hilarion, du monastère de Florichtchi, dans la région de Nijni Novgorod, qui était capable de chasser les mauvais esprits.

Avec deux moines, Hilarion se rendit à Moscou et, pendant sept semaines, lut des prières dans l’hospice. Malgré les manigances du démon, Hilarion réussit bientôt à l’exorciser. Selon Sneguirev, c’est à cette histoire que fait référence l’expression « chez le diable ».

Hilarion lui-même devint plus tard métropolite de Souzdal et de Iouriev-Polski. Le couvent de Saint-Jean-le-Précurseur, à côté duquel se trouvait l’hospice, se dresse toujours au même endroit – il a été reconstruit au XIXe siècle.

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