«Main morte»: cinq questions sur le système de riposte nucléaire russe  

Vitali V. Kouzmine/vitalykuzmin.net
En cas d’attaque contre la Russie, le système peut projeter automatiquement des centaines d'armes nucléaires vers l’ennemi sans recevoir l'ordre d'un humain.

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Les forces militaires russes disposent de 700 « vecteurs » d'armes nucléaires - des bombardiers stratégiques, des sous-marins nucléaires et des silos de missiles balistiques intercontinentaux (missiles placés dans le sol, ndlr).

Cependant, peu de gens savent que certains d'entre eux peuvent opérer de manière autonome et frapper des cibles ennemies potentielles même si l’ensemble du territoire du pays est détruit après une frappe nucléaire.

Ce système est appelé « Main morte ». Mais comment fonctionne-t-il ?

Un missile stratégique

Qu'est-ce que la « Main morte » ?

Le système Périmètre, surnommé aux États-Unis et en Europe « Main morte », est un système de contrôle automatique chargé de réaliser une frappe nucléaire de riposte.

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Pour le dire simplement, si le territoire de la Russie est dévasté après une attaque nucléaire, le système Périmètre frappe automatiquement le territoire de l'ennemi avec ses propres missiles nucléaires.

Pourquoi a-t-il été créé ?

Lancement du missile balistique intercontinental RS-12M Topol (dénomination de l'OTAN: SS-25)

Au lendemain de la guerre froide, le commandement militaire soviétique a compris qu'il suffit d'un seul missile nucléaire pour détruire un poste de commandement exploitant des installations nucléaires.

Il était également clair que les moyens de guerre radio-électronique évolueraient et pourraient potentiellement bloquer les canaux de contrôle standard des forces nucléaires stratégiques.

Pour cette raison, l'armée avait besoin d'un plan de sauvegarde fiable pour garantir une frappe de représailles au moyen de tous les missiles nucléaires intercontinentaux enterrés dans des silos.

Comment fonctionne-t-il ?

Pour accomplir cette tâche, les ingénieurs soviétiques ont décidé de créer un missile balistique intercontinental (ICBM) qui serait utilisé en tant que « centre de commandement volant » : après son lancement, il actionnerait tous les autres silos de projectiles atomiques sur le territoire soviétique et les enverrait vers l'ennemi.

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Le nouveau missile serait placé dans un silo nouvellement construit (pouvant résister à une frappe nucléaire directe) avec des coordonnées de vol préinstallées et des signaux radio qu'il enverrait aux autres missiles pendant son vol.

Comment a-t-il vu le jour ?

Lancement depuis le cosmodrome de Baïkonour du missile balistique intercontinental SS-19 Stiletto

Un UR-100N (un missile balistique intercontinental baptisé SS-19 « Stiletto » par l'Otan) a été choisi comme base pour la nouvelle arme. Spécialement à ces fins, les ingénieurs ont créé une nouvelle ogive dotée d'un puissant équipement de transmission radio.

La construction a commencé au milieu des années 1970 et, à la fin de la décennie, le prototype a été soumis à des essais militaires. Les premiers tests ont montré que le missile était capable de parcourir 4 500 kilomètres à une altitude de 4 000 mètres et d'envoyer avec succès des signaux radio à d'autres sites pendant son vol.

Pendant cinq ans, le commandement militaire a mené des « tests de combat » pour voir si la nouvelle arme était capable ou non d'ouvrir un véritable silo et d'envoyer le missile nucléaire le plus puissant du pays vers un point désigné.

En novembre 1984, la fusée de commandement a été lancée depuis la RSS de Biélorussie et a réussi à transmettre une commande de lancement à un lanceur ensilé près de Baïkonour au Kazakhstan. L'ICBM R-36M qui a décollé du silo (selon la codification de l'Otan, SS-18 « Satan ») a atteint avec succès sa cible dans une zone spécifiée sur le site d'essai de Koura au Kamtchatka après que toutes les étapes aient été testées.

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Ainsi, la nouvelle arme s'est avérée capable de parcourir tout le territoire soviétique, tout en envoyant des commandes opérationnelles sur son chemin à d'autres missiles balistiques intercontinentaux.

En 1985, le nouveau système a été adopté par l'armée et est encore utilisé à ce jour pour protéger le territoire russe.

Le lancement du missile balistique intercontinental RS-28 Sarmat depuis le cosmodrome de Plessetsk

À quoi ressemble la « main morte » aujourd'hui ?

La « Main morte » ne se compose pas seulement de missiles, mais aussi de radars situés le long du territoire de la Russie et de satellites qui recueillent des informations depuis l'espace. Il s'agit d'un système informatique complexe qui analyse en permanence un large éventail de paramètres - activité sismique, niveaux de rayonnement - et surveille les données des systèmes d'alerte aux missiles situés le long du territoire.

« Le système a subi plusieurs modifications au fil de ses années d'exploitation. Tout d'abord, la Russie a intégré dans ses nouveaux moyens de renseignement radioélectrique des radars de classe Voronej capables de détecter des tirs de missiles jusqu'à 7 000 kilomètres. Deuxièmement, les ingénieurs ont modifié son ogive pour le rendre capable de résister aux nouveaux moyens émergents de guerre électronique qui coupent les signaux radio », a déclaré Ivan Konovalov, directeur du développement de la Fondation pour la promotion des technologies du XXIe siècle.

Selon lui, les missiles de la « Main morte » sont en lice pour recevoir des blocs d’accélération de missiles hypersoniques. Ils lui permettront alors de voler à une vitesse de 5 à 7 kilomètres par seconde.

« Les nouveaux missiles seront déployés dans l'armée aux côtés des nouveaux ICBM de classe Sarmat. Ces derniers missiles seront livrés à l'armée au milieu des années 2020. Ainsi, la version hypersonique modifiée des missiles de la Main morte apparaîtra à leurs côtés », a déclaré l'expert.

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