Une famille russe dans une gare de Moscou.
Artyom Geodakyan / TASSLes experts du Comité des initiatives civiles, centre d’études libéral présidé par l’ancien ministre des Finances Alexeï Koudrine, ont rédigé un rapport sur l’émigration de Russie où ils affirment que le nombre des émigrés est monté en flèche au cours des cinq dernières années.
Selon eux, entre 500 000 et 600 000 Russes sont partis pour les pays d’Europe occidentale, les Etats-Unis et Israël. Ce sont dans leur majorité des gens très cultivés, la Russie perdant avec eux « un important capital démographique, social, économique et intellectuel ».
Le rapport critique les statistiques officielles de l’émigration qui citent des chiffres trois ou quatre fois moins importants qu’ils ne le sont en réalité. Mais si les statistiques publient des données minimisées, c’est qu’il est très difficile de dénombrer les émigrés.
Toutefois, les spécialistes s’accordent à dire que même si les statistiques officielles ne sont pas très précises, elles reflètent dans l’ensemble la dynamique des changements dans ce domaine. « Les statistiques enregistrent sinon l’ampleur, du moins la dynamique (de l’émigration) », a déclaré à RBTH Vladimir Moukomel, directeur du Centre des études ethnopolitiques et régionales de l’Institut de sociologie de l'Académie des sciences.
Bien qu’il soit impossible de trouver des données fiables sur le nombre d’émigrés, les spécialistes ne sont pas enclins à dramatiser la situation concernant l’ampleur de l’émigration.
Selon une étude sociologique réalisée l’année dernière, seulement 1,5% des personnes interrogées ont l’intention de quitter la Russie pour toujours. En 2013, elles étaient deux fois plus nombreuses (3,2%). Environ 6% voudraient partir, mais n’en ont pas la possibilité. Ainsi, ceux qui pensent à émigrer ne sont que 7% ou 8%. Quant au rapport du Comité des initiatives civiles, il situe le nombre de ces personnes dans une fourchette comprise entre 8% et 23%.
D’après Vladimir Moukomel, l’affirmation sur une hausse du désir d’émigrer n’est juste que pour les jeunes, et encore, seulement pour une partie. Ces jeunes arguent du manque de justice sociale au sein de la société russe et de l’absence de perspectives personnelles suite à un mauvais fonctionnementdes ascenseurs sociaux pour justifier leur désir de plier bagage.
Toutefois, il s’avère que le désir d’ailleurs n’est pas propre uniquement aux jeunes. Parmi les émigrés, il y a un certain nombre (bien que difficile à préciser) de gens très cultivés entre 30 et 45 ans qui quittent la Russie pour des raisons sociales et économiques : mécontents des salaires trop bas, des impôts élevés et de la corruption. La crise économique de ces dernières années a joué son rôle.
Les experts relèvent dans le même temps une tendance contraire : le retour de ceux qui étaient partis après la chute de l’URSS au début des années 1990.
Les émigrés de Russie choisissent surtout comme destination l’Europe occidentale (essentiellement l’Allemagne), les Etats-Unis et Israël. Les experts font remarquer que la liste de ces destinations « traditionnelles » s’est élargie à des pays qui étaient jusqu’ici exotiques pour les Russes, comme l’Australie et la Nouvelle-Zélande.
La Russie se classe troisième dans le monde d’après le nombre d’immigrés. Selon les Nations unies, ils sont 11,6 millions à habiter actuellement en permanence la Russie.
Vladimir Moukomel affirme que ces données ne sont justes qu’en partie. Ainsi, ces 11,6 millions incluent tous les étrangers qui se trouvent actuellement en Russie : aussi bien les touristes que ceux qui franchissent le territoire en transit. D’après lui, les travailleurs s’expatriant pour des raisons économiques ne sont qu’environ 6,5 millions.Il s’agit essentiellement de ressortissants de trois républiques qui avaient fait partie de l’URSS : l’Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Kirghizistan (ils constituent plus de 70% des nouveaux arrivants en Russie). Il y a également parmi les migrants un grand nombre d’Ukrainiens, ainsi que des Moldaves et des ressortissants des pays de l’Asie du Sud-Est comme, par exemple, le Vietnam.
Il serait erroné de qualifier tous les migrants de gens peu cultivés uniquement parce qu’ils occupent des emplois non qualifiés. Selon une étude réalisée par des spécialistes de la Haute école d'économie de Moscou, environ 17% des migrants possèdent un diplôme d’études supérieures et environ 25% un diplôme d’études secondaires spécialisées ou d’enseignement secondaire professionnel. 75% d’entre eux ont moins de 40 ans.
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