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C’est une véritable vague de chaleur sibérienne qui s’est abattue sur la Bouriatie. Avec 30 degrés, on a l’impression qu’il en fait 50. Les chevaux s’élancent à toute vitesse, il ne reste que quelques secondes avant la ligne d’arrivée. Les spectateurs dans les tribunes se figent. C’est alors que l’un des meneurs de la course, l’étalon Pogrom, lâche son cavalier et s’enfuit dans la vallée. Confusion générale, une ambulance arrive sur le terrain. Toutefois, le cavalier a aussi un tempérament zélé. Il court après le cheval, le ramène sur le parcours et atteint la ligne d’arrivée.
C’est ainsi qu’au début du mois de juillet, en Bouriatie (république russe située sur la rive orientale du lac Baïkal, en Sibérie), se déroule le festival culturel et sportif ancien Naadan-Sourkharbaan. Les meilleurs athlètes s’y affrontent dans des épreuves de lutte traditionnelle, de tir à l’arc, de course de chevaux « mori ourildaan » et de cassage d’os à la main. Vous n’avez certainement jamais rien vu de tel !
Nous sommes à l’hippodrome du datsan (monastère bouddhiste) de Iangajine, à 50 km de la capitale de la Bouriatie, Oulan-Oudé (c’est ici qu’au début du XXe siècle, l’ascète bouddhiste Dachi-Dorjo Itiguelov a exercé les fonctions de moine supérieur).
Malgré l’éloignement de la ville et la chaleur, environ dix mille personnes sont venues assister à la compétition. Aujourd’hui, rivalisent plus de 130 chevaux.
« Ils sont nés en selle », c’est ainsi que les spectateurs admirent les courageux cavaliers. À toute vitesse, ils galopent à travers les vallées de la steppe, se doublant magistralement dans de périlleux virages. Pour apprendre de telles manœuvres, les athlètes montent souvent à cheval dès qu’ils apprennent à marcher.
La particularité des courses est qu’elles réunissent principalement des chevaux de race bouriate, des animaux aborigènes, courts et légers, mais incroyablement résistants. Il y a pour les épreuves 9 distances différentes, de 1 200 mètres à 21 kilomètres.
Les cavaliers sont nerveux. Il fait chaud, le bruit est assourdissant, et les chevaux ont un sacré tempérament : de temps en temps, ils veulent s’enfuir. Le vent dans les champs, c’est eux. Seul un homme littéralement né en selle peut y faire face.
Le festival Naadan-Sourkharbaan a une origine ancienne, où s’affrontaient les meilleurs guerriers nomades. Il se déroule à un moment de l’été où la saison des semailles est terminée, mais où l’on est encore loin de la fenaison. Les habitants locaux disent même que l’été ne commence qu’après Sourkharbaan.
« Naadan » se traduit par « jeux » et « Sourkharbaan » par « tir sur cible ». Les principales compétitions sont le tir à l’arc, la lutte bouriate et les courses de chevaux. La fête s’appelait autrefois « les Trois jeux des maris ». Aujourd’hui, d’autres sports ont été ajoutés, tels que le cassage d’os à mains nues, l’escalade de poteaux de 6 mètres de haut, le jeu d’os « chagaï naadan », les échecs « chatar », ainsi que des démonstrations d’archers à cheval.
Les tribunes du Stade central de la capitale bouriate se remplissent depuis le petit matin. De nombreuses personnes viennent de recoins éloignés pour encourager leurs sportifs.
La lutte bouriate est un véritable art dans le monde du sport. Les participants sont vêtus de shorts courts colorés et portent des ceintures de tissu autour du corps.
Avant le combat, ils exécutent la « Danse de l’aigle » pour intimider l’adversaire. Le combat dure 5 minutes. Le perdant passe sous le bras du champion en signe de respect. Cette année, le premier était Baïr Omoktouïev, champion de Russie, d’Europe et du monde de sambo. Une véritable légende du sport !
Non moins spectaculaire fut la finale où l’on brise un os spinal à mains nues – « khèèr chaalga ». Un os de bovin est pris dans une main et doit être brisé d’un coup sec avec le tranchant de l’autre poing. Le meilleur casseur d’os a été le jeune athlète Valeri Loubsanov, qui participe à la compétition depuis seulement deux ans. Au cours de l’épreuve, il a brisé pas moins de 26 os !
Voici au tour des archers de rentrer dans l’arène : tous vêtus de longues robes brodées et de chapeaux coniques. Cependant, certains d’entre eux portent, comme une trahison, les baskets les plus modernes. La cible se trouve à 45 mètres et il est presque impossible de la distinguer de l’autre côté du stade. Pourtant, les tireurs bouriates ne sont aucunement gênés par cette situation. L’un d’entre eux tire calmement sur la corde de son arc et effectue un tir précis – en plein dans la cible ! « L’essentiel est de bien viser et de s’orienter en fonction de ses sensations », nous confie-t-il.
Il s’avère ensuite qu’il s’agit de l’un des athlètes les plus célèbres de Russie, multiple champion de notre pays et d’Europe, participant aux Jeux olympiques de Sydney et d’Athènes, Baljinima Tsyrempilov. Or, quelques heures plus tard, il a surpassé tous les autres concurrents et est devenu le vainqueur de Sourkharbaan.
Les vainqueurs de la finale reçoivent leurs récompenses des mains des plus belles jeunes femmes de Bouriatie. Elles ont été spécialement sélectionnées pour l’occasion en direct quelques jours avant le début des jeux.
C’est toute une émission de téléréalité qui s’était alors déroulée à la télévision locale ! 25 filles de différents districts de Bouriatie se sont affrontées pour obtenir le droit d’être la première Danguina de Sourkharbaan (« danguina » signifie « beauté »). Elles ont montré leurs talents, parlé de leur lieu d’origine et séduit par leur connaissance des traditions et de la culture. Toutes les filles ont reçu des prix de consolation, tandis que la gagnante a également obtenu une couronne d’argent.
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