Les trois patriarches de l’Église orthodoxe russe les plus connus

Domaine public
Ces hiérarques ne firent pas que diriger l’Église orthodoxe russe. Ils furent également des acteurs politiques incontournables de leur temps, des missionnaires et des réformateurs. Ils laissèrent aussi à ce titre leur nom dans l’histoire de la Russie.

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Philarète (1553/1554-1633, patriarche de 1619 à 1633)

Fiodor Nikititch Romanov était le fils d’un boyard moscovite, lui-même frère d’Anastasia Romanovna Zakharina-Iourieva, la première femme d’Ivan le Terrible. Fiodor Nikitich était donc un des cousins germains du tsar Fiodor Ivanovitch. L’historien du XIXe siècle Nikolaï Kostamarov le décrivait comme un érudit, un excellent cavalier et un homme qui avait du goût pour les vêtements.

Ses liens de parenté avec la famille d’Ivan le Terrible décidèrent de son destin. Le tsar Fiodor Ivanovitch mourut sans héritier, ce qui signifiait la fin de la dynastie des Riourikides. Boris Godounov, le beau-frère de Fiodor Ivanovitch, vit en Fiodor Nikitich l’un de ses concurrents au trône. Il parvint à l’écarter en le contraignant à se faire moine (sous nom de Philarète) et en le reléguant dans un monastère de la région de Kholmogory. Quatre des frères de Fiodor Nikitich connurent le même sort. Sa femme Xénia Chestova, la mère de leur fils Mikhaïl, le futur tsar, fut également tonsurée de force et exilée dans la région du lac Onéga.

Le Ier Faux-Dmitri fit libérer Philarète et le fit consacrer métropolite de Rostov. Il conserva sa chaire sous Vassili Chouïski. Lorsque les troupes du second Faux-Dmitri prirent Rostov, il fut arrêté, emmené au camp de Touchino et obligé d’y jouer le rôle du patriarche. Ermogène, le patriarche en titre, se trouvait alors à Moscou.

Délivré du camp de Touchino au printemps 1610, Philarète fut envoyé à l’automne de la même année en ambassade auprès de Sigismond III pour obtenir la levée du siège de Smolensk. Il échoua dans sa mission et fut emprisonné sur ordre du roi de Pologne pour avoir refusé de tenter de convaincre les habitants de Smolensk de se rendre.

En 1613, pendant que Philarète était aux mains des Polonais, son fils Mikhaïl, alors âgé de 16 ans, fut désigné tsar. Il fut le premier de la dynastie des Romanov.

Philarète rentra à Moscou le 14 juin 1619, à l’occasion d’un échange de prisonniers avec les Polonais. Dix jours plus tard, il était intronisé patriarche de Moscou et de toute la Russie à la suite d’Ermogène mort à Moscou, dans les geôles polonaises, en février 1612. Dans les faits, il co-régna avec son fils. Il parapha même des documents importants qui concernaient les affaires de l’État.

Nikon (1605-1681, patriarche de 1652 à 1666)

Avant de prendre la tonsure au monastère des Solovki à l’âge de trente ans, Nikita Minine avait été prêtre séculier une dizaine d’années dans la région de Nijni-Novgorod. En 1643, il fut désigné higoumène du monastère de l’Annonciation de Kojozéro (entre Kargopol et Arkhangelsk). Trois ans plus tard, à l’occasion d’un voyage à Moscou, il fut présenté au tsar Alexeï Mikhaïlovitch sur qui il fit forte impression. Le tsar le fit alors nommer archimandrite (abbé) du Nouveau monastère du Sauveur de Moscou, où se trouve la nécropole des Romanov.

Nikon occupa ensuite brièvement la chaire de Novgorod puis, à la mort du patriarche Joseph en 1652, fut choisi pour lui succéder.

Le patriarche Nikon lança rapidement une réforme de grande ampleur. Il convainquit le souverain de la nécessité d’unifier l’orthographe des livres ecclésiastiques : par exemple, le nom de Jésus devait désormais systématiquement s’écrire Иисус. L’orthographe Исус était bannie. Nikon imposa également des réformes liturgiques. Par exemple, il ne fallait plus s’incliner en s’agenouillant d’abord et en touchant le sol de son front. Les fidèles devaient rester debout et incliner le buste. Il fut interdit de bénir et de se signer avec deux doigts (comme on le voit sur les icônes peintes avant les réformes de Nikon) ; il fallait le faire avec trois doigts (le nombre de la Trinité).

Les réformes de Nikon provoquèrent un schisme dans l’Église orthodoxe russe. Ceux qui n’acceptèrent pas de se soumettre – les vieux-croyants – furent persécutés. Les nouvelles règles furent loin de faire l’unanimité à la cour de Moscou (on se souviendra ici de la femme du boyard Morozov peinte par Vassili Sourikov). Nikon fut l’objet d’intrigues et de complots et finit par perdre la confiance du tsar Alexeï Mikhaïlovitch. Un concile le priva de sa dignité patriarcale. En 1666, l’hiérarque déchu fut relégué au monastère Saint-Théraponte puis, à partir de 1676 (année de la mort d’Alexeï Mikhaïlovitch) à celui de Saint-Cyrille-du-Lac-Blanc, dans la région de Vologda. 

En 1681, Nikon fut autorisé à passer les derniers jours de sa vie dans sa fondation de la Nouvelle-Jérusalem, près de Moscou. Épuisé, il mourut durant le voyage.

Tikhon (1865-1925, patriarche de 1917 à 1925)

Lorsque Vassili Bellavine faisait ses études à l’Académie Théologique de Saint-Pétersbourg, ses condisciples l’appelaient en plaisantant « le patriarche ». Comment pouvaient-ils se douter que leur ami le deviendrait un jour ? En effet, l’institution du patriarcat avait été supprimée par Pierre le Grand en 1721. Il avait instauré à sa place le Saint-Synode dirigé par un fonctionnaire laïc qui, dans les faits, était un ministre. 

Vassili Bellavine eut un destin hors du commun. Il prit la tonsure en 1891, enseigna au séminaire d’où il commença sa carrière. En 1898, il fut consacré évêque et nommé à la tête de la chaire de l’Alaska et des îles Aléoutiennes. Il poursuivit son activité de missionnaire à la tête de l’évêché de l’Amérique du Nord et des îles Aléoutiennes. Il en transféra la chaire de San Francisco à New York, ouvrit plusieurs églises, séminaires et monastères. Au début de l’année 1907, il fut nommé archevêque de Iaroslavl et Rostov.

Le patriarcat fut rétabli le 28 octobre/11 novembre 1917, quelques jours après la Révolution d’Octobre, par un concile qui siégeait depuis le 15/28 août 1917. Il choisit Tikhon pour patriarche. En 1922, le chef de l’Église orthodoxe russe fut assigné à résidence au monastère Donskoï de Moscou pour avoir ouvertement critiqué le pouvoir soviétique et condamné le bain de sang qu’était la guerre civile. De là, il fut le témoin de la division qui se produisait au sein de l’Église entre ceux qui pensaient qu’il fallait coopérer avec le pouvoir bolchévique et ceux qui s’y refusaient catégoriquement. Tikhon mourut au monastère Donskoï en 1925 et y fut inhumé. L’Église russe hors-frontière le canonisa en 1981 et l’Église orthodoxe russe, en 1989.

Dans cette autre publication, découvrez cinq saints orthodoxes vénérés dans l’Église catholique.

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