Pourquoi beaucoup d’amis de Staline ont péri durant la Grande Terreur

Russia Beyond (Photo: Domaine public)
Des amis proches du «petit père des peuples» ont péri pendant la période de répressions massives qui a fait rage en Union soviétique à la fin des années 1930. Et Staline n’a rien fait pour les sauver.

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Être l’ami du chef de l’État soviétique, l’omnipotent « architecte du communisme » Joseph Staline, pouvait apporter toutes sortes d’avantages et une position élevée dans la hiérarchie du pouvoir. Dans le même temps, de telles relations en ont mené plus d’un à sa perte.

Amis apolitiques

La principale garantie d’une amitié longue et durable avec le dirigeant était un désintérêt total pour la politique. Les exemples de Piotr Kapanadze et des frères Egnatachvili le confirment.

Alexandre Egnatachvili

Iossif Djougachvili (le vrai nom de famille de Staline) a rencontré Kapanadze à l’école théologique orthodoxe de sa ville natale de Gori, en Géorgie. Kapanadze a été l’un des premiers vrais amis du futur dirigeant soviétique.

Kapanadze ne s’est jamais intéressé à la politique et n’a pas occupé de postes de direction, ce qui, à bien des égards, a permis à cette amitié de durer toute sa vie. Staline l’invitait régulièrement à séjourner dans ses datchas et lui fournissait un généreux soutien financier. Ainsi, en 1944, il a envoyé à son « ami Petia » la somme colossale de 40 000 roubles, alors que le salaire moyen dans le pays était d’un peu plus de 400 roubles.

Staline a approuvé la proposition de Kapanadze d’écrire un court livre sur son enfance, mais a personnellement édité le texte, supprimant quelques passages désagréables et compromettants. Le « petit père des peuples » a toujours abordé la publication de ses biographies de façon extrêmement scrupuleuse.

Joseph Staline, sa seconde épouse Nadejda Allilouïeva, Kliment Vorochilov et sa femme Ekaterina et Avel Enoukidzé.

L’amitié de Staline a également été une aubaine pour les frères Alexandre et Vassily Egnatachvili, une famille avec laquelle les Djougachvili étaient très proches. Se tenant également à l’écart de la politique, ils étaient engagés dans le sport professionnel, l’enseignement et la restauration. Lorsque, dans les années 1920, l’État a lancé la nouvelle politique économique (NEP), qui instillait une dose d’économie de marché, les frères ont même organisé une entreprise de restauration.

Peu de temps après la fin de la NEP en 1929, Alexandre, en tant qu’entrepreneur, s’est retrouvé derrière les barreaux. En apprenant cela, Staline l’a immédiatement sorti de prison et l’a introduit dans le cercle de son entourage. Egnatachvili est devenu le chef-goûteur personnel du dirigeant, ce qui était une manifestation de la plus haute confiance de sa part.

Les fidèles

Bien sûr, Staline avait de nombreux amis dans la classe politique, notamment parmi les dirigeants de l’État soviétique. Une telle amitié, cependant, ne résistait à l’épreuve du temps que si ces hommes affichaient une loyauté personnelle sans faille envers Staline, obsédé par le pouvoir.

Staline et Vorochilov

Une personne de ce type était le maréchal de l’Union soviétique Kliment Vorochilov, avec qui le chef de l’État avait fait connaissance pendant la guerre civile. Staline a promu Vorochilov, qui ne brillait pas par ses talents de commandement militaire, mais faisait preuve d’un grand sérieux au poste de commissaire du peuple (ministre) de la Défense.

Au milieu des années 1930, une scission a éclaté dans la haute direction militaire du pays : Vorochilov est entré en conflit avec son adjoint, le maréchal Mikhaïl Toukhatchevski, un homme doué, ambitieux et extrêmement indépendant. Malgré la grande contribution que ce dernier avait apportée à l’amélioration de la capacité de défense de l’État, Staline a soutenu son vieil ami. En 1937, Toukhatchevski a été accusé d’ourdir un coup d’État militaire, arrêté et exécuté avec un certain nombre de responsables militaires qui partageaient ses opinions.

En remerciement, Vorochilov a participé sans objection aux répressions qui ont peu après été lancées contre l’état-major de l’Armée rouge. Il a activement envoyé au NKVD des listes de commandants, appelant à arrêter immédiatement « tous les vauriens ». Au printemps 1939, seuls deux des cinq maréchaux du pays avaient survécu. L’un d’eux était Kliment Vorochilov.

Les rebelles

Alexandre Svanidze

Staline pouvait pardonner à ses amis, mais refusait toute critique ou contestation de ses décisions. Ceux qui doutaient de la justesse des actions du chef l’ont payé très cher.

Le noble géorgien Alexandre Svanidze, avec qui Djougachvili s’est lié d’amitié alors qu’il étudiait au séminaire de Tiflis, était une personne extrêmement polyvalente. Il a travaillé dans les domaines de la politique étrangère et du commerce extérieur, mais était également l’organisateur et le rédacteur en chef de la revue universitaire Bulletin d’histoire ancienne, l’auteur de nombreux ouvrages sur la littérature et un traducteur de talent.

Pendant la Grande Terreur, Svanidze a inlassablement critiqué Staline en raison des répressions en cours. Il a tenté en vain de défendre ses connaissances arrêtées et cherché à convaincre le dirigeant de revenir sur sa politique. Il a ouvertement qualifié le chef de « non révolutionnaire », ce qui a rendu ce dernier fou de rage.

Ekaterina Svanidze

Le 23 décembre 1937, Alexandre Svanidze a été accusé d’avoir participé à une organisation antisoviétique et arrêté. Sa qualité de frère de la première femme de Staline, Ekaterina (Kato) Svanidze, ne l’a pas sauvé.

Selon les mémoires de l’éminent homme politique soviétique Anastase Mikoïan, Svanidze, qui avait été emprisonné, si vit offrir en 1941 la grâce s’il demandait des excuses devant le Comité central du Parti. Ne ressentant aucune culpabilité, ce dernier refusa et fut bientôt exécuté. « Quelle fierté très noble ! », a commenté le dirigeant soviétique à propos de cette décision. 

Avel Enoukidzé, Joseph Staline et Maxime Gorki

Un sort similaire a été partagé par un autre vieil ami de Joseph Staline, le parrain de sa femme Nadejda Allilouïeva, Avel Enoukidzé. Le secrétaire du Présidium du Comité exécutif central de l’URSS, accusé de trahison et d’espionnage, a été fusillé le 16 décembre 1937.

Au cours des interrogatoires, Enoukidzé a expliqué aux enquêteurs la véritable cause de son triste sort : « Mon seul crime est que lorsqu’il m’a dit qu’il voulait organiser un procès et exécuter Kamenev et Zinoviev (rivaux de Staline dans la lutte interne du parti, ndlr), j’ai essayé de l’en dissuader. "Sosso, lui ai-je dit, sans doute t’ont-ils fait du mal, mais ils ont déjà assez souffert pour cela : tu les as chassés du parti, tu les a mis en prison, leurs enfants n’ont rien à manger. Sosso, dis-je, ce sont de vieux bolcheviks comme toi et moi. Tu ne vas pas verser le sang des vieux bolcheviks ! Pense à ce que le monde entier dira de nous !" Il m’a regardé comme si j’avais tué son père, et a dit : "Souviens-toi, Avel : quiconque n’est pas avec moi est contre moi !" » 

Dans cet autre article, nous revenions sur ces tentatives d’assassinat ayant visé Staline.

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