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1ère tentative : un tir raté
Le 4 avril 1866, l'empereur Alexandre II sortait par la porte nord du jardin d'été de Saint-Pétersbourg, lors de sa promenade. Un petit groupe de passants s’est rassemblé spontanément à une distance respectueuse pour voir le tsar marcher vers sa voiture. De cette foule, un coup de feu a été tiré par Dmitri Karakozov, 26 ans. Heureusement, Ossip Komissarov, un paysan de 28 ans qui travaillait comme apprenti chapelier, a sauvé l'empereur in extremis.
« J'ai vu cet homme se précipiter à travers la foule, s’est souvenu Komissarov. Je n'ai pas pu m'empêcher de le regarder, mais ensuite, je l'ai oublié quand l'Empereur est arrivé. Soudain, je vois qu'il a sorti son pistolet et qu'il le vise ». L'empereur s'est arrêté près de sa voiture pour mettre son manteau, et c'est à ce moment-là que Komissarov a frappé la main de Karakozov, faisant dévier le coup de feu qui est parti en l'air – un geste aperçu par Edouard Totleben, un général russe présent dans la foule, qui a ensuite confirmé que Komissarov avait permis d’éviter un drame.
« Je me sentais triste parce que mon peuple était en train de mourir, et j'ai donc décidé d’anéantir ce tsar pervers et de mourir moi-même pour mon cher peuple », stipulait une lettre dans la poche du tireur. Alors qu'il avait été immobilisé par la foule, l'empereur lui a demandé : « Pourquoi avez-vous essayé de me tirer dessus ? ». « Vous avez dupé votre peuple - vous leur avez promis des terres, mais vous ne les leur avez pas données », a répondu Karakozov, faisant référence à l'abolition du servage qui s'était produite en 1861, mais qui avait dans les faits signifié que les paysans devaient racheter leurs terres à l'État. Karakozov s'est avéré être un membre d'un cercle terroriste qui avait prévu de lancer une révolution dans la foulée de ce meurtre.
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Karakozov a été jugé et exécuté en septembre 1866, tandis que le sauveur du tsar, Ossip Komissarov, a obtenu un titre de noblesse héréditaire. Le soir même de son geste héroïque, Komissarov a été honoré au palais d'Hiver, où Alexandre II en personne l’a étreint.
2e tentative : explosion du pistolet
En mai 1867, Alexandre II et ses fils Vladimir et Alexandre (le futur Alexandre III) étaient à Paris pour assister à l'Exposition universelle. Un jour, lorsque l'empereur, ses fils et Napoléon III étaient dans une calèche en sortant de l’hippodrome de Longchamp, un Polonais de 21 ans, Anton Berezowski, a couru vers la voiture et a tiré sur l'empereur à bout portant.
Cependant, le pistolet de Berezowski a explosé, le blessant à la main et projetant la balle sur l’un des chevaux. Berezowski a été immédiatement rattrapé par la foule. Lors d'un interrogatoire, il a pleinement avoué son acte et déclaré qu'il prévoyait de tuer l'empereur au nom de la libération de sa patrie, la Pologne. À l'époque, la Pologne faisait partie de l'Empire, et à peine 4 ans plus tôt, en 1863, une rébellion contre la domination russe y avait été violemment réprimée. La famille de Berezowski ayant été exilée, il voulait prendre sa revanche. Il a purgé 40 ans de travaux forcés et a été libéré en 1906.
3e tentative : attentat en pleine promenade
Le 2 avril 1879, l'empereur Alexandre II a effectué sa promenade quotidienne autour du palais d'Hiver, sans la surveillance de ses gardes. Alexandre avait pris cette habitude de son père Nicolas Ier, qui se promenait presque toujours tout seul dans la capitale. Même après deux tentatives d'assassinat, Alexandre II est resté fidèle à cette habitude.
Sur le quai de la Moïka, l'empereur s’est cependant fait tirer dessus à 12 pas de distance par le noble de 32 ans et fonctionnaire à la retraite Alexandre Soloviev. Il était membre de Zemlia i Volia (« Terre et liberté »), une organisation révolutionnaire qui a par la suite donné naissance au premier cercle terroriste du pays, Narodnaïa Volia. Le premier coup a manqué le tsar, qui a dû courir pour sauver sa vie (c’était la première fois dans l'histoire de la Russie que cela se produisait !).
Soloviev a poursuivi Alexandre II dans la rue et a tiré deux autres coups de feu de plus près. Après le troisième coup, un gendarme a rattrapé Soloviev et l'a frappé avec un sabre si fort que la lame s'est pliée ! Pourtant, Soloviev a réussi à tirer un autre coup et a couru, faisant feu une cinquième fois sur la foule qui le poursuivait, avant d'être finalement mis hors d’état de nuire.
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Dans son témoignage, Alexandre Soloviev a dit avoir agi de manière indépendante, mais « dans l’esprit du programme de son parti ». Il a été pendu trois jours plus tard à Saint-Pétersbourg, une foule d'environ 70 000 personnes ayant observé l'exécution.
4e tentative : un attentat contre un train qui a mal tourné
Les membres de Narodnaïa Volia savaient qu'en novembre 1879, la famille impériale partirait avec sa suite de Crimée, où elle avait passé ses vacances, pour Saint-Pétersbourg en passant par Moscou, et voulaient donc faire sauter leur train. Le convoi ferroviaire de l’empereur voyageait généralement avec 30 minutes de retard par rapport au premier train qui transportait les affaires des souverains et leur entourage : domestiques, dames d’honneur, etc.
Les terroristes ont placé trois bombes sur l’itinéraire : la première près d’Odessa, la deuxième près d’Alexandrovsk dans la région du Zaporojié (Ukraine), le troisième près de Moscou. Cependant, le train a changé de direction et n’est pas passé par Odessa. La deuxième bombe, celle placée à Alexandrovsk, n’a pas explosé.
Plus haut sur l’itinéraire, à Kharkov, le train de l’entourage du tsar a été retardé pour des raisons techniques, alors que le train de l’empereur a continué à avancer - les terroristes l’ignoraient ! Ainsi, ils ont naturellement laissé passer le premier train et visé le second. Le 19 novembre, une bombe a explosé exactement à l’endroit et au moment où les terroristes le voulaient - sous le quatrième wagon du deuxième train. Mais ce n’était par conséquent pas le bon ! Au lieu de la voiture d'Alexandre II, c’est un wagon qui servait à stocker les fruits qui a explosé. Fort heureusement, personne n'a été tué.
5e tentative : une explosion dans le palais qui a raté sa cible
Les membres de Narodnaïa Volia ont finalement tenté de tuer l’empereur directement chez lui, dans le palais d’Hiver. En septembre 1879, avant même l'explosion ratée du train, Stepan Khaltourine, un ancien paysan de 22 ans devenu révolutionnaire chargé de la propagande, a postulé pour un emploi de charpentier au palais, ce qui lui a permis d’obtenir une chambre dans le sous-sol de l’édifice. Passant inaperçu et évitant les contrôles de sécurité, il a amassé environ 32 kilos de dynamite dans le sous-sol en février 1880.
Le 5 de ce mois, Khaltourine a déclenché l'explosion dans sa chambre, deux niveaux sous la salle à manger où l'empereur devait dîner avec le prince Alexandre de Hesse-Darmstadt (ancêtre du prince Philip d’Angleterre et frère de la femme d'Alexandre, l'impératrice Marie). Néanmoins, le prince était en retard d'une demi-heure, ce que Stepan Khaltourine ignorait. L'explosion a donc tué 11 gardes au niveau inférieur de la salle à manger et a blessé 56 autres personnes, mais l'empereur et sa famille n'ont pas été touchés.
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Stepan Khaltourine a réussi à s'échapper et a poursuivi son activité terroriste. Il a été pendu à Odessa en 1882 après avoir participé au meurtre d'un procureur militaire à Kiev. Fait notable, Khaltourine a réussi à masquer son identité secrète jusqu'à la fin.
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Il y a eu deux autres tentatives ratées d'assassinat contre Alexandre II. Lors de la première, une bombe a été placée sous le pont où l’empereur devait passer en voiture, mais le militant qui devait l’allumer s’est trompé dans l’heure et n’était pas là au « bon » moment.
Le dernier attentat a eu lieu le 1er mars 1881 - les terroristes ont créé un passage souterrain sous une rue où la voiture de l’empereur devait passer et voulaient y placer une mine, mais l’itinéraire de la voiture a été modifié. Cette fois, les militants de Narodnaïa Volia en ont été informés et ont décidé d'attaquer l'empereur avec des grenades à main. Cette tentative a malheureusement réussi - en savoir plus ici.
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