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Comme ce fut le cas de nombreux enfants américains qui avaient 10 ans en 1951, la perception qu’avait Bob Dylan de la Russie a été influencée par la propagande de la guerre froide. Dans son autobiographie intitulée Chroniques, le grand chanteur a décrit la façon dont les élèves des écoles primaires des petites villes d'Amérique étaient amenés à percevoir les Russes comme une menace.
« L'une des choses à laquelle nous avons été formés était de nous cacher et de nous mettre à l'abri sous nos bureaux lorsque les sirènes des raids aériens résonnaient, car les Russes pouvaient nous attaquer avec des bombes, a-t-il écrit. On nous disait que les Russes pouvaient à tout moment être parachutés depuis des avions au-dessus de notre ville. C'étaient ces mêmes Russes avec lesquels mes oncles avaient combattu quelques années plus tôt. Maintenant, ils étaient devenus des monstres qui venaient nous trancher la gorge et nous calciner ». Dylan semblait sceptique quant à ces croyances et a déclaré qu'elles « semblaient bizarres », comme relevant d’un « fantasme étrange ».
C’est également à l’apogée de la guerre froide que toute bibliothèque ou collection de livres privés digne de ce nom comportait des œuvres écrites par de grands auteurs russes. Dans les années 1960, alors que Dylan était un artiste qui luttait pour percer à New York, il a trouvé une pièce avec une collection de livres comprenant des romans de Gogol, Balzac, Maupassant, Dickens et Hugo.
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« Les trucs russes sur l'étagère avaient une présence particulièrement sombre, a écrit Dylan. Il y avait des poèmes politiques de Pouchkine, qui était considéré comme révolutionnaire ». Le futur auteur de Blowin’ in the Wind est tombé sur des œuvres de Léon Tolstoï et Fiodor Dostoïevski au même endroit.
« Dostoïevski avait également eu une vie triste et dure, a écrit Dylan, évoquant l’exil de l’écrivain russe en Sibérie pour avoir écrit de la propagande socialiste au XIXe siècle. Il a finalement été gracié et a écrit des histoires pour rembourser ses créanciers. Tout comme au début des années 70, j'ai écrit des albums pour renflouer les miens ».
L'album de Dylan Blood on the Tracks, sorti en 1975, a été inspiré par un autre grand écrivain russe. « Finalement, j’ai enregistré un album entier basé sur des nouvelles de (Anton) Tchekhov - les critiques pensaient que c'était autobiographique - c'était bien », écrit-il dans son autobiographie.
En parlant de Tolstoï, le futur Prix Nobel de Littérature a évoqué sa visite à Moscou et en Union soviétique en 1985. Cette visite, organisée par un célèbre poète russe Andreï Voznessenski, a été largement oubliée dans l'imaginaire populaire.
Dylan, dont la grand-mère était originaire d'Odessa, était ravi à l'idée de visiter l'Union soviétique. Avec le poète américain Allen Ginsburg, Dylan a été invité à participer à une soirée de poésie à la veille du 12e Festival mondial de la jeunesse et des étudiants.
Le chanteur américain a été invité à se produire pour un public restreint au stade Loujniki. La soirée à laquelle participaient Voznessenski et l'éminent poète Evgueni Evtouchenko a tourné au flop, car le public était principalement composé de Komsomols (jeunes communistes).
Selon les récits du musicien russe Andreï Gorokhov, le public, composé de personnes qui ne savaient pas qui était Dylan et ne comprenaient pas l'anglais, n’a pas réagi avec enthousiasme à la musique du chanteur. Dylan, apparemment bouleversé par le concert, a « pleuré » plus tard dans la soirée à la datcha de Voznessenski.
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Le premier voyage de Dylan en Russie s’est quelque peu amélioré après le fiasco de Moscou. Il a réussi à se rendre au domaine de Tolstoï à Iasnaïa Poliana. Dans son autobiographie, Dylan raconte avoir dévoré dans les années 1960 un livre de Tolstoï dans la même pièce susmentionnée de New York où il avait lu les œuvres de Pouchkine et Dostoïevski.
« Il y avait un livre du comte Léon Tolstoï, dont je visiterais le domaine plus de vingt ans plus tard - son domaine familial, dans lequel il éduquait les paysans. Il était situé à l'extérieur de Moscou, et c'est là qu'il est allé plus tard dans sa vie en rejetant tous ses écrits et en renonçant à toute forme de guerre ».
Iasnaïa Poliana
Balabanov/SputnikDans ce qui semble absolument impensable à notre époque, Dylan, qui ne jouissait d'aucune célébrité en Russie, a obtenu un privilège spécial. « Un guide m'a laissé faire du vélo (de Tolstoï) », a écrit le chanteur américain.
Dylan souhaitait visiter la ville d'Odessa, mais s'est vu refuser l'autorisation officielle car la ville était fermée aux citoyens étrangers à l'époque. Il s'est rendu à Tbilissi (Géorgie), où il a reçu un accueil chaleureux de la part du public. Certains récits de cette époque suggèrent que Dylan aurait réussi à se rendre à Odessa à partir de là.
Andreï Gorokhov pendait que Dylan ne reviendrait jamais en Russie après le fiasco de Moscou en 1985, mais le chanteur s'est produit à Saint-Pétersbourg en juin 2008. Dans la « capitale du Nord », il a reçu la reconnaissance tant attendue dans ce pays qui l'avait profondément influencé.
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