Trois générations plus tard, l’escadrille Normandie-Niemen continue de lier Français et Russes

Histoire
ERWANN PENSEC
Le descendant d’un pilote français du légendaire régiment a tenu à rendre hommage à l’«ange gardien» russe de son grand-père, perpétuant l’amitié bilatérale née durant les plus sombres heures de l’histoire.

L’escadrille Normandie-Niemen, née de l’union des forces aériennes de France et d’URSS pour combattre l’Allemagne nazie, est encore aujourd’hui considérée comme l’une des plus brillantes incarnations de l’amitié entre ces deux peuples. Les militaires ayant servi en ses rangs ont alors noué des liens si forts, que même le temps ne semble avoir sur eux aucune incidence.

À 93 ans, Valentin Ogourtsov, l’un des trois vétérans-mécaniciens de ce régiment encore en vie, s’est ainsi aujourd’hui vu remettre un présent des plus symboliques : une épaulette du commandant français Yves Mourier, duquel il avait entretenu l’avion Yak-3 au cours de la Seconde Guerre mondiale. Ce cadeau, remis lors d’une visite de courtoisie à son domicile de Iaroslavl (250 kilomètres au nord-est de Moscou) par Zoya Arrignon, présidente de la Renaissance Française en Russie, n’est autre que celui du petit-fils du défunt pilote.

« Après avoir trouvé deux épaulettes de mon grand-père Yves, je me suis dit que ce serait assez symbolique d’en garder une en France, et que l’autre soit pour vous, Valentin, en Russie », peut-on lire dans la lettre jointe, rédigée par Frédéric Mourier.

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Parmi les objets également remis figurent une photographie d’Yves Mourier arborant une chapka, ainsi qu’une casquette rouge, couleur de l’Armée soviétique, élaborée par l’espace Normandie-Niemen du musée de l'Air et de l'Espace au Bourget et ornée d’un appareil Yakovlev, du nom de famille des deux combattants, ainsi que du nombre 16, identifiant de l’avion par le biais duquel ces deux héros ont œuvré ensemble face à l’ennemi commun.

C’est il y a près de cinq ans, après avoir appris que Valentin Ogourtsov était encore en vie, que Frédéric a décidé de prendre contact. Depuis, les échanges ont été nombreux, qu’ils soient écrits ou téléphoniques, permettant un rapprochement entre les deux familles.

« À l’époque, ils avaient un lien assez proche. Même si c’était en temps de guerre et quelque chose de militaire et d’un peu hiérarchisé, et qu’on ne s’épanchait peut-être pas dans des camaraderies, il y avait quand même un lien humain qui s’était tissé, ce qui fait que j’ai pu apprendre aussi des choses sur cette période-là, et sur mon grand-père en particulier, grâce aux souvenirs de Valentin. Des choses que ni l’armée, ni les familles ne savaient à l’époque et qui sont ressorties comme ça, c’est absolument formidable », confie le descendant du pilote, interrogé par Russia Beyond.

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C’est d’ailleurs avec tout autant d’intérêt qu’il a aussi pris connaissance du fabuleux destin après-guerre de Valentin Ogourtsov, cet « ange gardien », comme les pilotes français appelaient leurs mécaniciens russes. Si aucune rencontre physique avec ce vétéran, décoré, entre autres, de la Légion d’Honneur ainsi que de la médaille d’or de la Renaissance Française, n’a encore eu lieu, Frédéric nourrit l’espoir que ce vœu, qui lui est cher, puisse être exaucé prochainement.

« Et se dire que ce lien, à travers l’histoire, demeure entre les familles et a pu se reconstruire, qu’a pu se renouer une camaraderie, une amitié à distance, je trouve qu’il y a quelque chose d’assez formidable. Et mon grand-père, s’il était vivant, en serait certainement ravi », conclut-il.

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