Panique en l'air: les détournements d'avion les plus marquants de Russie et d'URSS

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Peut-on s’endormir tout en effectuant un détournement d’avion et ce dernier peut-il être orchestré par des enfants de hauts fonctionnaires? Jetons un œil à ces histoires incroyables survenues en Russie et en Union soviétique.

Même dans les pires œuvres cinématographiques ayant pour thème le détournement d’un avion, le malfaiteur ne fait pas ce qu’a réalisé Pavel Chapovalov le mardi 22 janvier de cette année. Il a en effet exigé que l’appareil, qui avait décollé à l’aéroport de Sourgout, en Sibérie, et se dirigeait vers Moscou, soit détourné vers l’Afghanistan. L’homme a ensuite pris place sur un siège, a longuement fixé le hublot, avant de s’endormir.

Le détournement du vol 1515 de la compagnie Aeroflot a fait grand bruit et paraît depuis lors on ne peut plus étrange. Habitant de Sourgout, Chapovalov ne se distinguait initialement pas des autres passagers : il est resté calme à sa place durant les trente premières minutes du vol. Néanmoins, il s’est ensuite levé et a annoncé à l’équipage qu’il était armé et que l’avion devait être détourné vers l’Afghanistan. Il n’avait toutefois pas l’air d’être sous l’emprise de l’alcool ou de drogues, et le personnel de bord l’a donc pris au sérieux. De son côté, Pavel a également fait confiance à l’équipage lorsque celui-ci lui a expliqué que l’appareil devait, pour atteindre une telle destination, se réapprovisionner en fuel dans la ville voisine de Khanty-Mansiïsk.

Durant tout ce temps, aucun des passagers ne s’est douté des événements en cours. Des rumeurs de détournement ne se sont répandues qu’à l’arrivée des forces de l’ordre. Toutefois, Chapovalov dormait déjà à ce moment-là. Par ailleurs, aucun explosif ou arme n’a été trouvé sur lui.

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Au cours de l’interrogatoire, il s’est avéré incapable d’expliquer pourquoi il lui fallait détourner l’avion vers l’Afghanistan. « Honnêtement, je n’avais pas besoin d’aller là-bas », a-t-il assuré, ajoutant mystérieusement : « Tout n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît au premier abord ». Ce que tout cela signifiait, personne ne l’a compris depuis. Cependant, il est évidemment préférable d’assister à un détournement de ce genre, aussi curieux qu’il soit, plutôt qu’à l’un des incidents véritables que nous nous apprêtons à relater.

Jeunesse dorée

L’année 1982 suivait son cours lorsque l’URSS est devenue le théâtre d’un important scandale : des étudiants de 20-25 ans se sont emparés d’un avion et ont lancé un carnage sanguinaire à bord. Or, il s’est avéré que les terroristes n’étaient autres que les enfants des plus influentes familles de Géorgie (qui faisait alors partie de l’URSS). Parmi eux, figuraient par exemple Soso Tsereteli, fils du célèbre scientifique Konstantin Tsereteli, et Tamara Patiachvili, fille du secrétaire du Comité Central de Géorgie.

Cette « jeunesse dorée » avait en effet décidé d’organiser une évasion de l’Union soviétique, en faisant passer ce voyage pour une lune de miel. Tout d’abord, Soso et Tamara se sont mariés, ont invité à leur cérémonie tout le gratin politique géorgien ainsi que les employés de l’aéroport. Puis, ils étaient censés s’envoler pour leur lune de miel, de Tbilissi (capitale de la Géorgie) à Leningrad (actuelle Saint-Pétersbourg). Avec eux, ils ont également amené quelques amis, qui étaient parfaitement au courant du plan. Profitant de leur position, les jeunes gens sont montés à bord de l’appareil par la « salle des députés », c’est-à-dire sans contrôle, ce qui leur a permis d’embarquer munis d’armes dans leurs bagages. À elle seule, Tamara disposait ainsi de trois grenades antichars dans son sac.

L’avion, à bord duquel se trouvaient 57 passagers et 7 membres de l’équipage, a donc paisiblement décollé. Néanmoins, un peu plus tard, l’un des membres du groupe a eu le sentiment qu’au sein des passagers se trouvait un agent des services de sécurité, et s’en est donc pris à lui, lui brisant une bouteille de champagne sur le crâne. C’est à ce moment qu’a débuté le détournement. Deux autres jeunes ont pris en otage une hôtesse de l’air et sont ainsi parvenus à faire irruption dans le cockpit. Ils ont alors exigé de prendre la direction de la Turquie, ce à quoi leur a été adressée la réponse habituelle : « Il est nécessaire de faire le plein ». Pour cela, le mécanicien de bord a cependant reçu plusieurs balles dans la poitrine. Le chef de bord a de son côté également ouvert le feu sur les malfaiteurs, les faisant sortir de la cabine de pilotage et s’y enfermant. Une stewardesse a à son tour été la cible de tirs lors de l’atterrissage, et, voyant que l’appareil était de retour à l’aéroport de Tbilissi, l’un des terroristes s’est suicidé d’une balle dans la tête. D’autres ont alors absorbé des drogues et ont menacé de tuer une personne par heure jusqu’à ce que leur soit ouvert un couloir aérien vers l’étranger.

À noter que les parents des criminels ont quant à eux refusé de prendre part aux négociations avec ces derniers. Une opération des forces spéciales a alors débuté et n’a duré que 4 minutes. S’est ensuivi un procès, à l’issue duquel tous ont été condamnés à la peine de mort, à l’exception de Tamara, qui a écopé d’une peine d’emprisonnement de 14 ans. Pour ce qui est des raisons les ayant poussés à agir de la sorte alors qu’en tant qu’enfants de l’élite ils auraient parfaitement pu se rendre en Turquie au titre de touristes, ils ont expliqué : « Si nous avions fui en Turquie de cette manière, là-bas, on nous aurait pris pour des émigrants lambda. Que valent nos noms, notre influence, et l’argent de nos parents là-bas, à l’étranger ? ». Ils s’étaient alors rappelé une autre histoire de détournement ayant eu lieu 12 ans auparavant : le père et le fils Brazinskas avaient pris le contrôle d’un avion et tué une hôtesse de l’air pour s’enfuir vers la Turquie, leur permettant, après une courte peine de prison, de gagner les États-Unis.

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Capture d’étudiants

Un autre fait de ce genre s’est déroulé en 1973, lorsque quatre étudiants moscovites d’une école technique automobile ont détourné un avion afin de recevoir une rançon. Le plus âgé d’entre eux n’avait alors que 20 ans, tandis que le cadet était âgé de 16 ans. L’appareil effectuait la liaison entre Moscou et Briansk (349 kilomètres au sud-ouest de la capitale), mais dix minutes avant l’atterrissage, les jeunes garçons se sont levés de leur siège, ont extrait de leurs bagages deux armes de chasse, un fusil à canon court ainsi que des couteaux, et se sont lancés à l’assaut du cockpit.

L’attaque s’est achevée par un tir dans le ventre du mécanicien de bord. L’alerte donnée au personnel au sol a alors été accompagnée d’une demande de rançon de 1,5 million de dollars (qui a ensuite été portée à 5 millions) pour la libération des otages. L’avion a été renvoyé vers Moscou, mais la situation météorologique a rendu impossible l’atterrissage, un épais brouillard s’étant levé. Or, les réserves de carburant touchaient à leur fin et l’appareil a donc dû se poser à l’aveugle, en suivant les indications de l’aiguilleur. À l’aéroport de Vnoukovo, était néanmoins déjà arrivé un commando d’opération qui, pour la première fois de l’histoire, allait devoir assaillir un avion contenant des terroristes. Pour cela, il s’est donc discrètement approché du châssis de l’appareil. Après plusieurs heures, il a été annoncé aux criminels que l’argent était prêt. Une valise (renfermant un moulage et non des billets) devait ainsi leur être apportée par un agent du KGB, mais celui-ci a refusé la mission au dernier moment, et l’appât a donc été remis à un policier vêtu d’un uniforme d’employé aéroportuaire. L’un des terroristes a alors ouvert la porte, et a été pris pour cible des tirs des forces de sécurité. Un véhicule de transport des troupes s’est également rendu près de l’avion et a ouvert le feu dessus. 90 trous ont par conséquent été effectués dans la carlingue, mais miraculeusement aucun des passagers n’en a souffert. Une grenade à gaz lacrymogène a ensuite été lancée dans la cabine mais a déclenché un incendie, ayant explosé entre les sièges.

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« J’étais dans une autre dimension. J’ai essayé de respirer à travers une serviette, ça semblait plus facile, a témoigné Ivan Kachine, commandant de l’équipage. J’ai jeté un œil par le hublot, et me regardait une caméra de télévision. L’aiguilleur demande si tout est calme. Je dis que non, qu’ils tirent ». Il a alors regardé derrière lui et a aperçu un homme en sang. Il s’agissait du chef des malfaiteurs, qui s’était tiré une balle après avoir compris que la fin était proche. Le second est mort de ses blessures, tandis que le troisième s’est rendu. « Sauter de deux mètres semblait un peu trop haut pour le dernier, et il s’est donc dirigé vers la passerelle. Là, les passagers se sont jetés sur lui ».

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