Durant l’hiver 1958-1959, un groupe de neuf personnes, à la tête duquel se trouvait Igor Dyatlov, est mort dans des circonstances plus qu’étranges, au beau milieu de nulle part : un sommet du Nord de l’Oural, le mont Kholat Syakhl. Aucun signe de phénomène naturel tel qu’une avalanche, toile de tente découpée depuis l’intérieur, dépouille retrouvée les yeux arrachés, vêtements radioactifs, blessures d’une extrême violence, … Le scénario de ce drame n’a toujours pas été expliqué depuis, 60 ans après.
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Bien évidemment, de par le monde, un nombre incalculable de théories ont été formulées, toutes plus originales les unes que les autres : ovnis, agents secrets américains, tests nucléaires, attaque du peuple mansi habitant la région, bête sauvage, yéti … Aucune version officielle n’ayant été avancée, et des éléments ayant semble-t-il été classés secrets d’État, la curiosité et l’imagination du public n’en ont été qu’attisées.
La tente découverte le 26 février 1959 par les secouristes.
WikipédiaCe qui est surprenant, est qu’il ne s’agissait pas de jeunes gens insouciants ayant décidé de sortir de leur tente en pleine nuit, sans chaussures ni vêtements chauds, afin de s’amuser dans la neige à plusieurs centaines de mètres de là. Ces neuf personnes étaient entrainées pour de telles escapades. Le membre le plus âgé, Semion Zolotariov, 37 ans, avait même participé à la bataille de Stalingrad, et était chevalier de l’ordre de l’Étoile rouge et professeur de sport. Il reste cependant le plus énigmatique du groupe : sa personnalité et sa biographie ont soulevé de nombreuses interrogations.
De troublants détails jalonnent en effet son parcours. Par exemple, il a traversé la guerre sans la moindre blessure, apprend-t-on dans la presse. Suite à la victoire, il n’est pas rentré chez lui mais a intégré l’Institut de sport de Minsk. À maintes reprises, il a, en rédigeant son autobiographie, confondu des événements significatifs de sa vie, se trompant même dans ses distinctions militaires. En outre, Semion ne possédait, selon ses proches, aucun tatouage, tandis que le cadavre lui appartenant prétendument arborait de mystérieux symboles sur ses mains, notamment quelque chose s’apparentant à une betterave ou un cœur ainsi qu’une étrange inscription « DAERMMOUAZOUAÏA ». Le visage de la dépouille était cependant dans un tel état qu’il en était méconnaissable, sa famille n’a donc pu l’identifier de manière certaine.
Ont alors vu le jour des théories selon lesquelles Zolotariov serait lui-même à l’origine de ce massacre, et qu’en réalité il y aurait survécu et aurait fui vers Israël grâce à de faux papiers. On sait même que peu avant leur départ, il aurait déclaré à ses compagnons que « le monde entier parlera de cette randonnée », sans expliquer pourquoi.
Plaque commémorative installée près du lieu de la tragédie.
WikipédiaC’est en raison de ces incohérences que son entourage a il y a peu exigé la réalisation d’une expertise ADN, et s’est appuyé sur le soutien du journal Komsomolskaïa Pravda, qui a cette semaine publié les avancées de l’enquête.
Ainsi, il s’est tout d’abord avéré que Semion ne figurait pas sur la liste des personnes enterrées dans le cimetière d’Ivanovo, dans la ville ouralienne d’Ekaterinbourg. Néanmoins, l’analyse du crâne exhumé a permis d’affirmer qu’il s’agissait bien de celui de la personne représentée sur la photographie ornant la sépulture, en laquelle la famille reconnait catégoriquement leur aïeul disparu.
Une analyse ADN a alors été effectuée sur les restes exhumés ainsi que sur les enfants de la sœur de Zolotariov, qui sont aujourd’hui ses plus proches parents. Mais coup de théâtre, les premiers résultats, concernant la nièce de Semion, Tatiana, montrent qu’il n’y a aucun lien de parenté entre elle et la personne ayant été enterrée ici, apprend-t-on de l'article. Cela laisse donc supposer que le cadavre retrouvé en 1959 dans la montagne ne serait bel et bien pas celui du véritable Semion, et que celui-ci se serait tout simplement volatilisé. La question est donc de savoir quand. Serait-il mort durant la guerre et quelqu'un aurait-il usurpé son identité par la suite? Aurait-il fait passer la dépouille d'une tierce personne pour sienne avant de s'évanouir dans la nature? ...
Sépulture des neuf membres du groupe de l'expédition. Zolotariov se trouve au milieu, à gauche.
WikipédiaL’expert médico-légal Edouard Toumanov, commentant pour Komsomolskaïa Pravda les résultats de l’exhumation, rejette par ailleurs toute implication d’infrason, d’ultrason, de souffle d’explosion, de radiation, ou encore de facteurs psychogènes dans l’apparition des blessures présentées par le corps. Selon lui, il ne peut s’agir que de coups portés à l’aide d’objets durs et contondants. Cet avis était d’ailleurs celui de Boris Vozrojdionny, l’expert ayant mené l’autopsie du groupe en 1959, qui avait affirmé que seule une force considérable serait en mesure d’infliger de tels dégâts.
Trois théories populaires en Russie on ne peut plus fantaisistes
Ces blessures seraient en outre caractéristiques des accidents de la route, ont avancé les spécialistes. Or, comme l’a assuré au journal Moskovski Komsomoletsle touriste Valentin Topolev, qui a suivi l’itinéraire de Dyatlov, il n’y a là-bas « aucun endroit où il est possible de subir de tels traumas ». « Il ne s’agit pas de montagnes escarpées et il est difficile de tomber dans un ravin. Et parler d’automobile est hors de propos, d’où pourrait-elle venir ? De tels dommages sont impossibles à recevoir là-bas, même en essayant fortement », a-t-il insisté.
Ainsi, si les récents éléments de réponse ont permis d’écarter les théories les plus farfelues, elles ont aussi fait émerger de nombreuses interrogations. Le mystère autour de l’affaire du col Dyatlov semble donc loin d’être percé, et de nouvelles investigations seront encore nécessaires pour éclaircir cette obscure histoire.
Membres du groupe de l'expédition.
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