Qu’est-ce que désigne en russe l’expression «une charte de Filka»?

Kira Lisitskaya (Domaine public)
Si vous entendez soudain un «Qu’est-ce que c’est encore que cette charte de Filka [филькина грамота, fil’kina gramata]» indigné, n’ayez pas peur. Il ne s’agit pas de nouvelles règles de la langue russe édictées par un certain Filka.

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Tableau par Iakov Tourlyguine

Selon le dictionnaire explicatif, le terme « Fi’lka » désignait un homme inculte et stupide. Et la « charte de Filka », respectivement, un document plein de fautes grossières. Selon une version, cette expression est apparue à l’époque d’Ivan le Terrible. La raison en était le conflit entre le tsar et le métropolite Philippe II.

L’ecclésiastique s’opposait à l’opritchnina (partie de la Russie sur laquelle le tsar exerçait un pouvoir absolu et tyrannique) et demandait au tsar de l’annuler et d’arrêter les exécutions. Cependant, Ivan IV n’en démordait pas. Or, en 1568, de retour de la campagne de Livonie, il s’est rendu au culte dans la cathédrale de l’Assomption du Kremlin de Moscou. Contre toute attente, Philippe II a refusé de le bénir et lui a reproché publiquement d’avoir versé du sang innocent. Ivan le Terrible était furieux et a promis qu’il « ferait pleurer misère » le métropolite et ses partisans. Néanmoins, Philippe n’était pas de ceux que l’on effrayait facilement. Très vite, ayant vu lors de la procession dans le couvent de Novodievitchi un opritchnik (cavalier aidant Ivan le Terrible à exercer son pouvoir sur l’opritchnina) coiffé d’un couvre-chef rond nommé tafia, que l’Église interdisait de porter, et lui en a fait la remarque. 

Ce fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase. L’offense d’Ivan le Terrible était trop grande. Les opritchniki ont alors fait irruption dans l’église pendant l’office, ont arraché les vêtements du métropolite, l’ont battu et ont annoncé sa déposition. Toutefois, cela ne suffisait pas : les hommes de main du tsar ont tué le neveu de Philippe et ont jeté à ce dernier sa tête coupée.

Dernières minutes du métropolite Philippe II par Alexandre Novoskoltsev

L’ecclésiastique a ensuite été exilé au monastère de l’Assomption Ostrotch de Tver. Cependant, même de là, il a envoyé des lettres au tsar, demandant l’annulation de l’opritchnina. Le souverain s’est montré inflexible, surnommant avec mépris le métropolite « Filka » et qualifiant ses lettres de « chartes de Filka ». Un an plus tard, Philippe II a été retrouvé mort – selon une version, il aurait été étranglé par Maliouta Skouratov, l’un des chefs de l’opritchnina.

Dans cet autre article, découvrez ce que signifie en russe l’expression «battre aux batogui».

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