La seule section de la frontière soviétique qui a toujours résisté aux assauts des Allemands

Des mitrailleurs soviétiques en route vers la ligne de tir

Des mitrailleurs soviétiques en route vers la ligne de tir

Evgueni Khaldeï/MAMM/MDF/russiainphoto.ru
Les troupes allemandes ont facilement traversé la frontière soviétique sur presque toute sa longueur et, en quelques semaines, ont pénétré profondément dans le territoire de l'URSS. Mais dans l'extrême nord du pays, ils n'ont pas avancé d’un iota pendant toute la guerre…

Russia Beyond désormais sur Telegram ! Pour recevoir nos articles directement sur votre appareil mobile, abonnez-vous gratuitement sur https://t.me/russiabeyond_fr

Le début de la guerre contre l'Allemagne nazie a constitué un véritable cauchemar pour l'Union soviétique. Comme un couteau dans du beurre, la Wehrmacht traversait les positions de l'Armée rouge, occupant tout le territoire des États baltes et de la Biélorussie, ainsi qu'une importante partie de l'Ukraine en quelques semaines. Des divisions soviétiques entières tombèrent dans des batailles féroces. Des centaines de milliers de soldats ont été encerclés et ont désespérément tenté de se frayer un chemin vers l’extérieur.

Cependant, l'ennemi n’a pas connu un tel succès sur l’ensemble du front soviéto-allemand. À l'extrême nord du pays, dans la zone de la crête de Mousta-Tountouri près de la frontière de l'État, les Allemands ont été incapables de percer les défenses de l'Armée rouge pendant toute la guerre.

L’offensive

Des soldats soviétiques traversent la crête Mousta-Tountouri

La guerre dans l'Arctique soviétique est arrivée une semaine plus tard que dans le reste de l'Union soviétique. Ce n'est que le 29 juin 1941 que les troupes allemandes et finlandaises franchissent la frontière, développant l’offensive vers Mourmansk et Kandalakcha.

>>> Ce Russe devenu héros du débarquement de Normandie

Le long de la côte de l'océan Arctique, des unités des bataillons de chasseurs de montagne du général Eduard Dietl avançaient. Leur tâche était de capturer les péninsules de Sredny et surtout de Rybatchy, qui, en raison de leur position stratégique, étaient connues en URSS comme le « cuirassé insubmersible de l'Arctique ». « Qui possède Rybatchy et Sredny détient la baie de Kola. La Flotte du Nord ne peut pas exister sans la baie de Kola », a noté l'amiral Arseni Golovko.  

Après avoir écrasé plusieurs avant-postes frontaliers et repoussé les unités du 95e régiment d’infanterie soviétique, les chasseurs allemands atteignirent la crête de Mousta-Tountouri située à 6 km de la frontière, et derrière laquelle se trouve un isthme et une route directe vers les presqu'îles. Les Allemands espéraient prendre cette chaîne de montagnes dans la foulée, mais ils n’étaient pas voués à y parvenir.

Des soldats soviétiques chargés des communications. Péninsule de Rybatchi, Flotte du Nord.

Initialement, le commandement soviétique croyait que l'ennemi frapperait les péninsules depuis la mer et non depuis la terre, de sorte que les forces principales étaient situées sur Rybatchy en prévision d’un débarquement allemand. Lorsque la Wehrmacht a attaqué la crête, les troupes soviétiques qui la défendaient étaient presque cinq fois moins nombreuses.

Néanmoins, jusqu'à l'arrivée des renforts sur Mousta-Tountouri, les soldats de l'Armée rouge ont opposé une résistance farouche aux Allemands. Ils installaient des postes de tir directement sur les rochers, érigeaient des barbelés et posaient des mines. Des combats ont été menés pour chaque mètre, pour chaque abri de pierre.

Là où les troupes allemandes ont néanmoins franchi la crête et commencé à dévaler les pentes en direction de l'isthme, elles ont été frappées par l'artillerie soviétique et les destroyers Ouritski et Kouïbychev, qui s’étaient approchés du rivage. « Nous avons essuyé des tirs nourris de l'artillerie navale russe. Il y a eu des pertes notable dans les bataillons, les infirmiers n’ont pas le temps d'évacuer..., a rapporté le commandant du 136e régiment allemand de chasseurs de montagne. Nous étions près de Koutovaïa, descendant les pentes abruptes à l'est […] Une grêle d'obus s’est abattue sur nous. Je n'ai rien pour riposter. S'ils n'arrêtent pas de tirer, je devrai retirer le régiment ».

Région polaire. Combats sur la péninsule de Rybatchi

Les batailles sanglantes pour Mousta-Tountouri se sont poursuivies jusqu'à la mi-septembre 1941. Ayant subi des échecs à maintes reprises, les Allemands arrêtèrent leurs tentatives d'assaut et commencèrent à creuser des tranchées dans les zones occupées.

Rempart imprenable

« Sur les versants nord de la crête, escarpés dans leur partie centrale et moins pentus à l'ouest et à l'est, nos avant-postes étaient situés en sept points forts. Sur les versants sud, plus doux et plus avantageux, se trouvait l'ennemi. Entre lui et nos bastions, il y avait une bande neutre de seulement 50 à 60 mètres de large, et à certains endroits de 25 à 30 mètres seulement - la distance d’un lancer de grenade à main nue en position couchée ! Des batailles à la grenade se déroulaient quotidiennement. Tout ce qui se fait ici et chez les fascistes est parfaitement audible », a rappelé le lieutenant-général Sergueï Kabanov. 

>>> Combien de citoyens soviétiques sont morts pendant la Seconde Guerre mondiale?

Colonne de chars allemande durant l'offensive sur le chemin de fer de Mourmansk, 1941

Occupant les hauteurs dominantes, les Allemands avaient une bonne vue sur l'arrière des troupes soviétiques. Il était nécessaire de livrer de la nourriture, des munitions et des matériaux de construction pour la construction de fortifications malgré le feu intense de l'ennemi. « Pour chaque poutre livrée à Mousta-Tountouri, les combattants payaient en vies ou en blessures, déplore le sapeur Nikolaï Abramov : Et comment construire une forteresse à cinquante mètres de la ligne de défense ennemie ? Le moindre bruit - et vous vous retrouvez avec un projectile sur la tête »

Des mitrailleurs soviétiques à une position de tir dans la région de Mousta-Tountouri

Les Allemands étaient particulièrement irrités par le panneau frontalier soviétique A-36 situé sur la crête. Avant la guerre soviéto-finlandaise (« guerre d’hiver ») passait ici une frontière d'État, qui avait été déplacée un peu plus à l'ouest en vertu du traité de paix de Moscou de 1940. « Je me souviens avec fierté de l'entêtement avec lequel nous avons défendu notre frontière soviétique, qui est restée sur Mousta-Tountouri. C'était peut-être le seul panneau frontalier non capturé par les nazis. Les Allemands entreprirent de nombreuses tentatives de s'en emparer, mais à chaque fois sans succès. Aigris par ces échecs, les chasseurs tiraient sans pitié sur ses défenseurs. Parfois, l'ennemi réussissait à abattre le panneau, mais les fusiliers le remettaient inlassablement en place », a écrit le capitaine du Corps des fusiliers marins Vassili Kisliakov dans ses mémoires Au-delà du cercle polaire arctique.

Des artilleurs changent de position de tir.

Jusqu'au moment où l'Armée rouge a délogé les Allemands du cercle polaire arctique fin 1944, la crête de Mousta-Tountouri a constitué os en travers de la gorge de la Wehrmacht. Toutes les tentatives de percer les défenses soviétiques se sont soldées par des échecs. Alors que dans d'autres secteurs du front, la Wehrmacht avait avancé sur plusieurs milliers de kilomètres jusqu'à la Volga et au Caucase, elle s'est ici solidement enlisée pratiquement à la frontière même de l'Union soviétique.

Dans cette autre publication découvrez neuf « villes héros » de Russie.

Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.

À ne pas manquer

Ce site utilise des cookies. Cliquez ici pour en savoir plus.

Accepter les cookies