Pourquoi l'hymne russe a-t-il changé à de nombreuses reprises dans l'histoire?

Natalya Nosova
La Russie a subi de nombreux bouleversements politiques tout au long de son histoire et a changé d'hymne national à maintes reprises. Nous présentons ici un bref historique de son évolution au gré des événements.

Lorsque Vladimir Poutine a signé un projet de loi établissant un nouvel hymne national russe en 2000, tous les Russes n'étaient pas satisfaits. Par exemple, le célèbre violoncelliste russe Mstislav Rostropovitch a dit qu'il « n'honorerait jamais cet hymne en se tenant debout quand il serait chanté ». La raison à cela était simple : ce nouvel hymne n'était pas exactement nouveau.

L'hymne choisi en 2000 a la même musique - écrite par Alexander Alexandrov - que l'ancien hymne soviétique, qui a été approuvé par Joseph Staline et était en utilisé entre 1944 et 1991. De plus, bien que les paroles soient nouvelles, elles ont été écrites par le même auteur que l'hymne de 1944 - le poète Sergueï Mikhalkov. En conséquence, toute la chanson rappelle la période soviétique. Comment est-ce arrivé ?

Lire aussi : Pourquoi l'aigle à deux têtes est-il le symbole national de la Russie?

Gloire royale

L'hymne national de la Russie a toujours été le reflet de la société et de la politique du pays. Le premier hymne officiel, intitulé « la Prière des Russes », a été choisi en 1816 par l'empereur Alexandre Ier. Il comportait des paroles en russe glorifiant le tsar et sa mélodie était celle de l'hymne de la Grande-Bretagne « Dieu, sauvez le roi ».

Nicolas Ier, qui a succédé à Alexandre et était célèbre pour son patriotisme russe et son tempérament rude, aurait dit : « La musique britannique que nous écoutons depuis si longtemps m'ennuie ». Un nouvel hymne a donc été écrit immédiatement en 1833. Il a été appelé « Dieu, sauvez le tsar » et ses paroles stipulaient : « Fort souverain, règne pour la gloire, pour notre gloire ! »

Période révolutionnaire

En 1917, la monarchie tomba, et les nouveaux dirigeants russes voulaient de nouvelles mélodies pour le peuple. Ces chansons étaient étroitement liées au symbolisme révolutionnaire — la version russe de la Marseillaise, par exemple, a servi d'hymne de 1917 à 1922. Dans cette chanson, le tsar autrefois « fort et souverain » était qualifié de « vampire », un ennemi contre lequel le peuple devrait s'élever.

Lire aussi : Pourquoi le drapeau russe est-il blanc-bleu-rouge?

Avec sa formation en 1922, l'URSS adopta l'Internationale comme hymne du pays. Bien que n'étant pas officiellement un hymne, cette chanson symbolique du mouvement international des ouvriers était chantée lors de tous les événements et célébrations officiels. La chanson appelle « tous les affamés et les asservis du monde » à se lever et à renverser le capitalisme.

Staline change de disque

Joseph Staline a remplacé la chanson principale de l'Union soviétique en 1944 par quelque chose de complètement nouveau. Sergueï Mikhalkov et Gabriel El-Registan ont écrit les paroles, et la musique a été composée par Alexander Alexandrov. Les motivations de Staline pour ce changement étaient politiques.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, Staline voulait signaler aux alliés occidentaux que l'Union soviétique n'allait plus renverser leurs gouvernements et était prête à coopérer. Le passage à un nouvel hymne et le renoncement à l'internationale était une partie symbolique importante de ce message.

Lire aussi : Cinq raisons d’être fier de ses origines russes

El-Registan, l'un des auteurs de la chanson, a rappelé dans ses mémoires que, « Staline a dit d'ajouter un verset de plus, belliqueux, sur l'Armée rouge, sur la façon dont nous combattons les fascistes et continuerons à le faire... Cela a été reflété dans le vers +Nous avons élevé notre armée dans les batailles, nous allons balayer les vils envahisseurs de la route !+ » Néanmoins, en 1977, l'hymne a été « corrigé » par les autorités. Cela a été fait pour paraître plus pacifique, et on a alors supprimé dans la foulée le nom de Staline.

Un hymne sans paroles

L'hymne soviétique est resté en place jusqu'à ce que le pays lui-même ne cesse d'exister en 1991. Une fois de plus, la Russie avait besoin d'une nouvelle chanson. De 1991 à 2000, l'hymne officieux de la Russie était la Chanson patriotique, une composition peu connue sans texte écrite par Mikhaïl Glinka (1804-1857), l'un des compositeurs les plus célèbres de l'histoire russe.

L'hymne a rencontré des ennuis depuis le début. Le parti communiste a bloqué son approbation en tant qu'hymne national officiel et a exigé que le soviétique soit rétabli. Dans le même temps, beaucoup de gens ont trouvé le choix étrange car il n'y avait pas de paroles pour le chanter. Le gouvernement a même organisé un concours pour les meilleures paroles, mais n'a pas réussi à trouver ou approuver un gagnant.

Lire aussi : Pourquoi les Russes sont (principalement) orthodoxes?

Peu après que Vladimir Poutine a été élu pour son premier mandat présidentiel en 2000, il a proposé un compromis : retour de l'ancien hymne, mais en changeant les paroles de sorte qu'elles louent la Russie plutôt que l'Union soviétique et le communisme. Comme mentionné ci-dessus, certaines personnes s'opposèrent vigoureusement à cette idée, mais une majorité au Parlement a approuvé le projet de loi et depuis 2000, la mélodie bien connue d'Alexandrov est jouée à tous les événements officiels.

Répondant à ceux qui l'accusient d'avoir ramené le symbolisme soviétique, Poutine a déclaré en 2000 : « Si nous sommes d'accord avec le fait que nous ne devrions pas utiliser... les symboles de l'ère soviétique, nous devrions également convenir que toute une génération de nos citoyens, nos mères et nos pères [qui ont vécu en URSS], ont vécu une vie insensée. Et je ne peux pas être d'accord avec ça ».

Pourquoi les Russes ne sourient-ils pas, et qu’est-ce qui est susceptible de leur faire verser quelques larmes ? Dans ce catalogue, vous retrouverez toutes nos publications sur ces questions qui vous taraudent au sujet des habitants de ce vaste pays.

Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.

À ne pas manquer

Ce site utilise des cookies. Cliquez ici pour en savoir plus.

Accepter les cookies