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Peupler la Crimée de Russes venus du Nord était alors impossible dans la mesure où la main-d’œuvre y était déjà insuffisante. Il fut envisagé d’y envoyer les bagnards, mais cela aurait signifié la diminution de la production dans les fabriques de l’Oural.
L’idée de peupler la péninsule de bagnards ne fut cependant pas totalement abandonnée. On songea alors aux prisonniers britanniques. En 1784, la Grande-Bretagne proposa à la Russie d’y envoyer ses bagnards pour faciliter le développement de la péninsule.
En 1776, la guerre d’indépendance américaine s’était conclue pour la Grande-Bretagne par le perte de treize de ses colonies d’Amérique. Jusque-là, elle y avait exilé une grande partie des condamnés au bagne. Après l’indépendance américaine, les bagnards furent envoyés en Afrique mais la plupart attendait la mort sur des bateaux pénitentiaires en Angleterre dans des conditions qui ne pouvaient que faciliter le déclenchement d’épidémies.
La proposition britannique fut accueillie favorablement à Saint-Pétersbourg. Mais elle provoqua l’effroi de Sémion Vorontsov (1744-1832), ambassadeur de Russie à Londres de 1784 à 1806.
Il savait combien les bagnards russes et britanniques étaient différents. Avant d’être condamnés, les Russes étaient généralement paysans ou artisans, alors que les Britanniques étaient des criminels depuis l’enfance.
Le diplomate était soucieux de la question du prestige de l’Empire russe. « Serait-il séant qu’on pense dans le monde que, sous le règne radieux de la grande Catherine, la Russie sert de lieu d’exil [aux bagnards] anglais, ce qui n’est en rien glorieux. Le fait que le grand Georges III estime que condamner ses criminels au bagne en Russie ou sur les côtes d’Afrique se vaut ne l’est pas plus », fit-il savoir à Saint-Pétersbourg.
L’impératrice prêta une oreille attentive aux arguments de Sémion Vorontsov et choisit de favoriser l’installation d’hommes libres en Crimée. Les Britanniques fondèrent, quant à eux, leur première colonie pénitentiaire en Australie en 1788 .
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