Jeanne d’Arc, personnage principal d’un film de l’époque brejnévienne

Culture
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En 1970 sortait sur les grands écrans soviétiques Le Début (Начало – Natchala), long métrage réalisé par Gleb Panfilov (1934-2023). Il s’ouvre sur le procès de Jeanne d’Arc. Cette scène, qui dure six minutes, pourrait faire croire au spectateur qu’il va regarder un film dont le sujet est la Guerre de Cent Ans. Si tel était le cas, il ne se méprendrait pas complètement.

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Ce film en noir et blanc raconte l’histoire de Pacha (le diminutif de Praskovia) Stroganova, jeune ouvrière dans une usine textile d’une petite ville de province. Elle fait du théâtre amateur. Un jour, un réalisateur moscovite à la recherche d’une actrice pour interpréter le rôle de Jeanne d’Arc la remarque dans une pièce où elle tient le rôle de Baba Yaga. Il est séduit par ses grands yeux clairs. Tout comme l'avait été Arkadi, un père de famille qui quitta son foyer pour elle le temps d’un été. Pacha obtient le rôle de la Pucelle d’Orléans et part pour Moscou.

Le montage alterne des scènes de la vie de Pacha et du tournage du film consacré à Jeanne d’Arc. Les tourments vécus par les deux hypostases de l’héroïne se répondent en écho. Pacha puise dans la douleur d’avoir été abandonnée par Arkadi de quoi étoffer son personnage qui, en retour, lui donne la force de surmonter cette tragédie. La démarche de Gleb Panfilov est donc différente de celle de Jean-Luc Godard dans Vivre sa Vie (1962). Son personnage de Nana assiste à une projection de La Passion de Jeanne d’Arc de C.T. Dreyer (1927) et le spectateur ne peut que supposer pourquoi elle pleure.

Le Début est aussi une mise en abyme : un réalisateur filme le tournage d’un film. En contrepoint, Gleb Panfilov donne à voir les désaccords entre le metteur en scène et les acteurs, des moments prosaïques et éloignés de la création artistique et la précarité du métier d’acteur.

Ce film est magistralement servi par des comédiens au talent largement reconnu à la fin des années 1960, dont Inna Tchourikova (1943-2023) dans le rôle de Pacha. Il ne rassembla pourtant que vingt et un millions de spectateurs en salle. Il fut sélectionné pour La Mostra de Venise en 1971, année où aucune récompense ne fut décernée.

En dépit de la reconnaissance internationale qu’il obtint, ce film sur « la puissance de la foi humaine en ce qui doit être accompli, la vocation, le talent et le bonheur » (pour reprendre les mots de la critique de cinéma Maïa Tourovskaïa [1924-2019]) ne fut pas le commencement d’une autre aventure à laquelle tenait Gleb Panfilov : celle d’un film entièrement consacré à Jeanne d’Arc. En ce sens, Le Début dont le titre apparaît uniquement dans le générique à la place du mot « fin » en fut malheureusement une.

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