Qui était ce compositeur russe nommé vingt-deux fois aux Oscars?

Bettmann/Getty Images
Sur le générique d’ouverture des Inglourious Basterds de Quentin Tarantino, les amateurs de cinéma avertis reconnaissent la mélodie mélancolique du thème principal du western Alamo. Peu d’entre eux savent pourtant que l’on doit cette musique au compositeur russe Dmitri Tiomkine.

Suivez Russia Beyond sur Telegram ! Pour recevoir nos articles directement sur votre appareil mobile, abonnez-vous gratuitement sur https://t.me/russiabeyond_fr 

Musicien surdoué fréquentant le café du Chien Errant 

Dmitri Tiomkine avec sa mère

Né dans le gouvernement de Poltava en 1894, Dmitri Tiomkine était un véritable enfant surdoué en musique. Il entra au Conservatoire de Saint-Pétersbourg à l’âge de treize ans seulement. Pendant ses études, il travailla comme pianiste dans les salles de cinéma et comme accompagnateur de la grande ballerine Tamara Karsavina. Il passait ses soirées au célèbre café du Chien Errant, où se retrouvait toute la Bohème littéraire et musicale de l’époque. Dans ses mémoires, Dmitri Tiomkine écrivit que, dans cet établissement, « on recevait une éducation assaisonnée de rire et d’extravagance. Nous découvrions des idées contemporaines et des innovations, nous faisions des expériences ». Ce fut au Chien Errant qu’il fit la connaissance de Sergueï Prokofiev. 

Après la Révolution de 1917, Dmitri Tiomkine se consacra avec passion aux nouvelles formes d’art : il composa la musique de la reconstitution théâtralisée et filmée de la prise du palais d’Hiver à laquelle prirent part six mille artistes et figurants. Le peintre Georges Annenkov se souvenait que « son énergie créatrice et sa puissance d’organisation étaient inépuisables, qu’elles étaient extraordinairement productives, inspirantes pour tous les créateurs et les participants du spectacle ». 

Dmitri Tiomkine ressentit les changements qui transformaient son pays avec plus d’acuité que certains. En 1918, il fut le témoin de l’arrestation d’une de ses connaissances, le général Leonard Skierski, et décida de le visiter à la prison où il avait été incarcéré. Dmitri Tiomkine ne put en ressortir. Il n’avait pas de laissez-passer et la garde qui l’avait laissé entrer avait été remplacée. Il ne dut de pouvoir quitter la prison qu’à l’intervention d’Alexandre Glazounov, l’un de ses enseignants au Conservatoire.  

Musiques de western 

Dmitri Tiomkine quitta la Russie en 1921. Il rejoignit son père à Berlin puis s’établit à Paris. Ce fut là que Fiodor Chaliapine lui donna un conseil qui allait bouleverser sa vie : partir pour l’Amérique. Ce qu’il fit au milieu des années 1920. Il commença à composer des musiques de films à la fin cette même décennie. Sa rencontre avec le réalisateur Frank Capra marqua un tournant dans sa carrière. Il fut sélectionné aux Oscars pour la musique des Horizons Perdus (1937). Cette nomination était la première d’une vingtaine d’autres. 

Dmitri Tiomkine reçoit l'Oscar de la meilleure musique de film Le Vieil Homme et la Mer, le 6 avril 1959

Tous les ans, à la veille de Noël, les Américains ont l’habitude d’écouter une autre musique de Dmitri Tiomkine : le thème principal de la tragicomédie, de Frank Capra également, La Vie est Belle (1946). En une quarantaine d’années de carrière à Hollywood, Dmitri Tiomkine composa avec maestria la musique d’environ cent vingt films : des westerns, des comédies romantiques, des films policiers, des films de guerre, des drames, des films à suspense. Quand on lui demanda comment lui, qui n’était pas né aux États-Unis, parvenait à composer des musiques de westerns, il répondait en souriant : « la steppe est la steppe ».

Dmitri Tiomkine joue du piano sur la plage de Santa Monica

À partir du début des années 1940, Dmitri Tiomkine collabora avec Alfred Hitchcock. On lui doit la musique de L’Ombre d’un Doute (1943), L’Inconnu du Nord-Express (1951) et du Crime était presque parfait (1954). Nombre de films de William Wyler, Howard Hawks, John Wayne ou John Houston n’auraient pas été aussi réussis sans les musiques de Dmitri Tiomkine. En 1953, il reçut deux Oscars pour le western Le Train sifflera trois fois (1952) : l’un pour la musique, l’autre pour la chanson Do Not Forsake Me qu’on y entend. Quelques années plus tard, il obtint une autre statuette pour la musique d’Écrit dans le Ciel (1954) avec John Wayne. En 1959, Hollywood récompensa une nouvelle fois Dmitri Tiomkine pour la musique de l’adaptation du Vieil homme et la Mer (1958). Les critiques acclamèrent cette composition : ils trouvèrent qu’elle avait fait de Spencer Tracy (1900-1967) le soliste d’une symphonie. 

George Stevens (au centre) avec son fils et Dmitri Tiomkine

Musique du film Tchaïkovski 

Les spectateurs soviétiques regardèrent, peut-être sans le savoir, des films auxquels avait participé Dmitri Tiomkine. Par exemple, Toute la Ville Danse (1938) pour laquelle il fit de nouveaux arrangements des œuvres de Johann Strauss fils (1825-1899), à qui le film est consacré. Ou bien encore L’Or des MacKenna (1969), dont il fut un des producteurs. Plus de soixante millions de spectateurs virent ce long métrage à sa sortie en salles en URSS. 

À la fin des années 1960, Dmitri Tiomkine vint en URSS pour collaborer avec les studios Mosfilm. Il composa la musique du film Tchaïkovski (1969) qui lui valut sa dernière nomination aux Oscars.  

Dmitri Tiomkine s’éteignit à Londres en novembre 1979. 

Dans cette autre publication, découvrez les trente meilleurs compositeurs russes de tous les temps.

Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.

À ne pas manquer

Ce site utilise des cookies. Cliquez ici pour en savoir plus.

Accepter les cookies