Des églises en bois aux temples bouddhistes: un Français ayant exploré la Russie en 44 jours raconte

Archives personnelles; Natalia Nosova
L’architecture, les paysages et mêmes les visages changent au fil des kilomètres, tramant le portrait de la Russie dans toute sa diversité: ayant fait en 2019 un aller-retour Kaliningrad-Vladivostok au volant de son fourgon, le Français Tomas Verdier partage son expérience.

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Je viens d’un petit village de l’Ouest de la France. Chauffeur-livreur, je fais à peu près 12 000 ou 13 000 km par mois à l’intérieur de l’Hexagone. Et comme sur la carte déjà il n’y pas trop de choix pour faire une telle distance depuis chez moi et qu’en même temps je voulais venir en Russie depuis déjà longtemps, j’ai décidé d’entreprendre ce voyage et de rejoindre Vladivostok au volant de mon véhicule.

L’idée de visiter la Russie était donc présente depuis longtemps, mais j’avais été auparavant rebuté par toute la sphère administrative - cela me paraissait toujours compliqué. De l’autre côté, j’avais du mal à connaître le budget qu’il me fallait pour ce voyage. Au bout du compte, je me suis dit que si je ne le faisais pas maintenant, je ne le ferai jamais.

Je n’ai pas vraiment préparé mon voyage à part les papiers, le visa et l’entretien de mon véhicule. Pour le reste, j’avais de grandes lignes – il fallait que j’aille à Vladivostok. J’ai pris une carte SIM russe pour avoir accès à Internet et au fur et à mesure je regardais ce qu’il y avait d’intéressant sur la route. Je suis sûrement passé à côté de certains trucs, mais déjà cela m’a permis de voir pas mal de choses.

Je suis entré en Russie la nuit du côté de Narva [Estonie]. Au poste douanier j’ai pris conscience de la difficulté de communiquer, car je ne parle pas russe à part quelques bases et je me suis aperçu qu’il n’y avait pas grand monde qui parlait anglais. J’étais fatigué et ma première impression c’est que j’ai croisé beaucoup de voitures qui avaient un kit antibrouillard sur l’avant... J’étais éblouis, je ne voyais rien, je me suis pris des trous au milieu de la route. Au fur et à mesure on s’y fait, mais le début a été difficile.

Sur le territoire russe, en comptant Kaliningrad, j’ai passé 44 jours. Quelles villes j’ai visitées ? Y en a tellement ! Je suis passé à Kaliningrad, puis monté à Peterhof, après j’ai fait Petrozavodsk, puis je suis redescendu à Semionov, au nord de Nijni Novgorod. Et après toute la route jusqu’à Vladivostok.

C’est vraiment la taille du pays qui m’a surpris. Quand on passe des panneaux et on voit : « Irkoutsk – 2 500 km », pour un Français c’est hallucinant, c’est comme si chez moi on mettait « Marrakech », donc c’est vraiment étonnant.

J’ai beaucoup aimé Peterhof - j’avais entendu par le passé pas mal d’émissions sur les palais qui se trouvent là-bas et j’étais donc très content d’y aller. Ensuite j’ai beaucoup aimé le pogost de l’île Kiji, puis les villes comme Oulan-Oudé qui m’a beaucoup surpris. C’est étonnant, on n’a plus l’impression d’être en Russie et pourtant on est entouré de Russes.

J’ai du mal à vraiment choisir un endroit qui m’a plu, parce que tout est différent et chaque endroit est intéressant. Pour un Français c’est la diversité de paysages et de choses à voir,  c’est impressionnant. La France doit être un vingtième de la Russie et déjà on dit toujours qu’on a une diversité de paysages. Mais ça n’a rien à voir avec la Russie. Là c’est hallucinant ! Déjà la taille du pays m’a impressionné, et c’est étonnant de croiser des orthodoxes, des musulmans, des bouddhistes et tout ça dans un même pays ! On a la sensation de changer de pays en fait au fur et à mesure qu’on avance.

De premier abord, la différence entre les Russes et les Occidentaux d’Europe de l’Ouest, c’est que chez nous on a tendance à avoir le sourire même lorsqu’on n’aime pas les gens, alors qu’en Russie on ne sourit pas forcement, par contre lorsqu’on vous aime, on vous aime. J’ai l’impression que les rapports sont plus vrais et je l’ai beaucoup apprécié. Les gens sont beaucoup plus ouverts. L’an dernier, je me suis retrouvé dans des groupes avec des Russes lors de ma visite du Kirghizstan, je savais donc à peu près comment ils étaient, je m’étais bien entendu avec eux, donc je me doutais qu’en Russie ce serait plus ou moins pareil.

En ce qui concerne la sécurité, je n’ai pas eu de moments particuliers, il n’y a pas eu de moments de pression. Même dans certaines villes, je passais par des quartiers, et on voyait que ce n’étaient pas des quartiers riches, et je ne me suis jamais senti en insécurité. J’ai toujours eu confiance. Il n’y a pas un moment où je me suis senti mal. Comme partout on peut faire une mauvaise rencontre, mais pas plus en Russie qu’ailleurs.

Il y a eu des anecdotes sur la route. Sur le retour, à quelques kilomètres de Tchita [Sibérie orientale], j’ai pris un autostoppeur. Je me suis dit que ça allait durer 20 km, mais j’ai constaté qu’il allait à Krasnoïarsk tout comme moi ! Du coup j’ai passé quatre jours avec lui. Comme il faisait très chaud et que je n’ai pas de climatiseur dans mon véhicule, il m’a d’abord demandé s’il pouvait se mettre torse nu. Je lui dis oui, il n’y a pas de problème. Puis, on essaie de discuter et à un moment il me fait signe, il tape sur son genou et je ne comprends pas. Et quand je ne comprends pas j’ai tendance à dire : « Oui, oui ! » et j’aurais peut-être pas dû : le mec s’est mis en caleçon et il a fait 4 000 km en caleçon assis à côté de moi.

Cela m’a rappelé le sketch de Coluche sur un autostoppeur qui critique toute la voiture, qui dit que ça c’est du plastique, ce n’est pas bien, et là à la fin j’avais l’impression que c’était un peu ça : « Il faut éteindre la ventilation, il faut faire ci, il faut faire ça ». Et puis il me disait : « On va s’arrêter là, on va manger là, on va se baigner là » et à un moment je lui ai dit que c’était un peu mon voyage à moi aussi. [Rires]. Mais c’était assez marrant.

J’ai eu quelques soucis mécaniques sur la route, je me suis arrêté dans un garage et les gens y ont passé entre 2h30 et 3h00 sur mon véhicule et à la fin lorsque j’ai demandé le prix, ils m’ont dit non, c’est gratuit, alors qu’eux ils avaient du travail.

J’ai bien mangé. En général, je suis resté dans les clichés : j’ai eu le droit aux pelmenis, tcheboureks, pirojki... À Kazan j’ai goûté du tchak-tchak, j’ai même mangé un plat d’ours à Petrozavodsk ! Il y a beaucoup de restaurants routiers en Russie et qu’ils sont ouverts 24h/24 et c’est vrai que pour moi c’était pratique. Ce qui est par contre surprenant c’est les toilettes. Il est difficile de trouver sur la route les toilettes dignes de ce nom.

Résumer mon voyage en trois mots, ce serait résumer la Russie : immense, fascinant et puis multiple. Ce qui m’a vraiment surpris c’est la taille. Je n’ai jamais été dans un pays où il y a différents fuseaux horaires et là entre Moscou et Vladivostok il y a 7 heures de décalage ! C’est aussi étonnant de rencontrer des gens si différents... Car vers Oulan-Oudé on se croit en Mongolie, lorsque j’étais au lac Baskountchak [région d’Astrakhan], les gens ressemblent plutôt aux Kazakhs, avec les yeux bridés, et c’est marrant parce que, chez nous, il n’y a pas cette diversité. Et ici, les gens sont différents mais tous parlent la même langue, ont le même président, c’est étonnant.

Je conseille aux voyageurs de ne pas être rebutés par les démarches administratives - avec les agences ça se passe relativement bien et vite - et de ne pas être rebutés par la langue. Il faudrait cependant apprendre au moins l’alphabet cyrillique et puis quelques bases car comme dans tous les pays les gens apprécient quand on fait au moins des efforts dans leur langue. Je conseille d‘aller au-delà des préjugés. Il ne faut pas avoir peur des gens.

J’espère retourner en Russie rapidement parce ça m’a beaucoup plu et j’espère encore apprendre le russe - ce n’est pas gagné !

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Propos recueillis par Maria Sokolovskaïa

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