Les Maris, ce petit peuple de Russie encore adepte des rites sacrificiels païens

Fiodor Telkov
Lorsque l'on évoque les pratiques sacrificielles, l'on se laisse aisément à penser qu'il s'agit de rites révolus, de cérémonies barbares de temps anciens. Pourtant, quelque part au fin fond de la Russie, le peuple des Maris s'y adonne encore de nos jours afin d'exprimer son adoration aux dieux de la nature. Immersion chez ces païens du XXIe siècle.

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Les Maris, un peuple ouralien aux racines finno-ougriennes, même persécuté par les gouvernements tsariste et soviétique, et sous la puissante influence de l'orthodoxie, de l'islam et de l'athéisme, ont continué à prier secrètement dans leurs bosquets sacrés.
Le XVIe siècle a vu le début de la migration de « Maris des prés » vers le nord-est à cause du processus de christianisation forcée. Ces « Maris de l'Est » se sont installés dans le Sud-Ouest de la région de Sverdlovsk, dans le Sud-Est de celle de Perm et dans le Nord de la République de Bachkirie.
Les prières des Maris peuvent être divisées en trois groupes : communautaires, occasionnelles et familiales. Lors des prières, la position de la Lune est toujours prise en compte. Avant de procéder aux rites religieux, les participants préparent un pain spécial.
La première et la dernière partie de la cérémonie se déroulent au domicile familial des « initiateurs » des prières. Les karts (prêtres maris) portent des coiffes en feutre blanc épais. L'ensemble de la région de Sverdlovsk est desservi par trois karts seulement, dont l'un est dit « à la retraite ».
L'habileté du kart réside principalement dans l'ampleur et la portée de ses supplications aux dieux. Les prières elles-mêmes sont délivrées sous forme libre, sans canons spéciaux, mais elles doivent venir du cœur.
Le dieu suprême de la religion marie est Och Kougou Ioumo (« Grand dieu blanc »). C'est à lui que l'on fait le sacrifice et par lequel le kart supplie d'autres dieux. Aujourd'hui encore, les Maris sont principalement paysans, ce qui explique que leur activité dépende des esprits de la nature.
Les lieux où les Maris accomplissent leurs rituels sont appelés « bosquets sacrés » ou, dans certains cas, « montagnes sacrées » (les Maris se divisant en deux groupes ethniques, les Maris des prés et les Maris des montagnes), qui sont protégés par les forces de la nature.

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La République de Mari El, la patrie traditionnelle du peuple mari, compte environ 500 de ces lieux. Leur profanation est très sévèrement punie par les dieux. Une montagne sacrée est divisée en plusieurs « niveaux » distincts, chacun d'eux étant le sanctuaire d'un dieu particulier.
Selon certains témoignages, les bosquets sacrés sont des zones dites d’anomalies, où se produisent des phénomènes étranges, mais pour les Maris, il s’agit aussi de lieux où ils peuvent se recharger en énergie positive et se détendre.
Avant de gravir une montagne sacrée, les Maris doivent se laver avec de l'eau d'une source sacrée et revêtir des vêtements propres. Dans ces zones forestières, il est interdit d'abattre des arbres vivants, de jurer, de crier, de jeter des déchets, d’y faire ses besoins ou de consommer de l'alcool.
Les Maris de l'Oural procèdent régulièrement à des sacrifices, principalement d’un bélier à poil blanc, sexuellement mature, sain et sans défaut. Certains rites maris sont toutefois dédiés aux forces obscures, pour lesquelles on utilise un animal à la peau noire.
Les karts découpent les organes vitaux de l'animal, les enfilent sur une corde et les jettent dans un chaudron rempli d'autres aliments. La viande et le boudin sont bouillis dans de grandes marmites pour être servis aux participants et pour remercier les dieux de leur miséricorde.
Les karts implorent les dieux pour que le peuple connaisse la prospérité, une récolte abondante, la sobriété et l'abstinence de drogues, ainsi que des décisions judicieuses de la part des autorités. Pendant que les prêtres lisent leurs supplications aux dieux, les croyants doivent s'agenouiller.
Selon la légende, rien de superflu ne doit être laissé sur la montagne sacrée, ce qui signifie que tous les restes du bélier sacrifié sont brûlés et que les participants emportent chez eux les produits sanctifiés. Ils sont obligés de les offrir en repas à leurs amis et proches.
Ce n'est que dans les années 1990 que de tels rites de masse ont de nouveau été officiellement permis par les autorités. Aujourd'hui, bien sûr, certains Maris sont des chrétiens orthodoxes, tandis que d'autres ont adopté l'islam et parlent la langue tatare.

Cet article est la propriété de Rossiyskaya Gazeta.

Dans cet autre article, assistez à un autre rite sacrificiel, cette fois pratiqué par des Tchouvaches païens.

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