En visite à Moscou, une Française achète sur un marché aux puces un vieil appareil photo à l’intérieur duquel elle découvre une pellicule oubliée. Sur les photos qu’elle développe, elle voit apparaître le visage d’un écolier soviétique d’à peine 7 ans qu’elle se décide de retrouver pour lui restituer les clichés et avec eux les souvenirs liés aux moments immortalisés par cette pellicule. La théorie des « six degrés de séparation » fait son effet et elle le retrouve. Ressemblant plutôt au sujet d’un roman ou au scénario d’un film, cette histoire est pourtant bel et bien vraie.
Elle est arrivée à Elisabeth Blanchet, photographe et journaliste récemment installée à Marseille. Connaissant déjà la Russie, elle voulait y retourner depuis longtemps. L’occasion s’est offerte cet été - ayant plusieurs sujets à rédiger sur la Russie, Elisabeth y est partie en compagnie de son amie de lycée. Et c’est cette dernière qui lui a proposé d’aller au marché aux puces d’Izmaïlovo.
C’est là que l’appareil photo argentique - un Elikon 35C - comportant la pellicule avec des clichés pris au crépuscule de l’ère soviétique a été acheté.
« Je ne m’imaginais même pas qu’il y avait encore quelque chose sur le film. J’ai ouvert l’appareil et je pensais avoir voilé une partie de la pellicule. Quant à l’autre, je pensais que le temps s’en était chargé », avoue-t-elle à Russia Beyond.
Pourtant, le temps a épargné la pellicule et Elisabeth a découvert d’émouvants clichés tournant autour d’un petit garçon : le voilà entouré de ses proches et avec un gros bouquet à la main le jour de la rentrée scolaire ou en train de jouer au milieu du salon.
« Je me suis dit que c’était un moment important de sa vie, que les photos lui appartenaient, qu’il fallait les lui donner. Franchement, j’ai aussi un peu lancé l’avis de recherche comme un jeu. Je voulais aussi tester le pouvoir des médias sociaux », relate Elisabeth, avouant qu’elle ne pensait pas qu’elle allait le retrouver. « Comme le dit très bien Dmitri, tout cela relève du miracle ! », ajoute-t-elle.
Aujourd’hui âgé de 33 ans, le Moscovite Dmitri Kretov est à présent un homme d’affaires père de deux enfants. Il était en voyage d’affaires et attendait son vol à l’aéroport lorsqu’une de ses connaissances lui a adressé une capture d’écran montrant une photo de lui, puis le lien vers d’autres clichés accompagnés d’un avis de recherche.
« Qui est l’auteur de cette blague bien organisée ? » : telle a été la première réaction de Dmitri. Ce n'est que plus tard qu’il a réalisé que ce n’était pas un gag, ce qui l’a d’ailleurs surpris davantage.
« C’est en 1990, ma première rentrée à l’école. Je me souviens très bien de ce jour-là - j’étais accompagné par mes parents et ma grand-mère. Ce dont je ne me souviens pas pourtant c’est de l’appareil photo », nous explique Dimitri qui compare à un flash-back l’effet produit par ces photos. Il ne comprend pas en outre pourquoi c’est sur l'appareil de son oncle et non sur le Zenit de ses parents que ces clichés ont été pris.
« Est-ce que j'accorde un sens particulier à cette histoire ? Je pense que oui - si avant je ne croyais pas aux miracles, aujourd’hui je constate que dans la vie tout est possible », affirme Dimitri qui avoue être très reconnaissant envers Elisabeth Blanchet pour le respect qu’elle accorde aux souvenirs d’autrui.
Cette histoire les a rapprochés : Dimitri et Elisabeth sont devenus amis et communiquent régulièrement via les réseaux sociaux. Ils ont même prévu de célébrer le Nouvel An ensemble, en Russie. Qui plus est, Elisabeth veut faire de cette incroyable histoire un film documentaire. Dmitri lui a donné son accord et elle travaille à l’écriture du scénario.