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Les premières tentatives pour faire pousser des bananes en Russie datent du milieu du XVIIIe siècle. En 1754, un pied de bananier obtenu en Europe fut planté dans l’orangerie du comte Piotr Chouvalov à Saint-Pétersbourg. L’année suivante, la plante atteignait déjà deux mètres et demi de haut et donnait ses premiers fruits.
Reproduction du tableau «Ananas et bananes» de l'artiste Ilia Machkov provenant des collections de la Galerie nationale Tretiakov
SputnikCet arbre exotique fut alors rapidement planté dans les jardins de la couronne. Des bananes étaient servies à la table de l’impératrice Elisabeth (1709-1761). De riches familles de l’aristocratie voulurent suivre l’exemple donné par la tsarine et se mirent aussi à cultiver des bananiers. Mais, les résultats ne furent pas à la hauteur de leurs espérances. Au cours du siècle suivant, les bananes restèrent des fruits exotiques rares, même pour la noblesse fortunée.
Au milieu du XIXe siècle, l’écrivain Ivan Gontcharov fit un voyage à Madère où il vit un fruit qu’il ne connaissait pas. Il voulut y goûter et fut déçu. Dans son récit La Frégate Pallas, il écrivait : « J’ai goûté [des bananes - ndlr]. Cela ne m’a pas plu : c’est fade, parfois sucré. C’est mou et douçâtre. Elles ont un goût farineux. Elles ressemblent un peu à la fois aux pommes de terre et aux melons. Elles sont toutefois moins sucrées que les melons. Soit elles n’ont pas d’arôme, soit il rappelle celui d’un bouquet de fleurs un peu grossier. C’est plus un légume qu’un fruit. La banane est une parvenu[e] [en français dans le texte - ndlr] dans l’ordre des fruits ».
Jardin de la ville de Yalta, Crimée
Auteur inconnu/MAMM/MDFAu début du XXe siècle, les bananes étaient importées d’Europe et d’Amérique sur des navires frigorifiques. Leur prix baissa et de plus en plus de Pétersbourgeois purent se permettre d’en acheter. Les restaurants se livrèrent à des expériences culinaires et proposèrent, entre autres, un punch à la banane.
De la Révolution de 1917 à la fin de la Seconde Guerre mondiale, les Russes puis les Soviétiques avaient d’autres préoccupations que celles de manger des fruits exotiques. Après la fin de la Grande Guerre patriotique, l’URSS se mit à importer des bananes de Chine et du Vietnam. En échange de ces fruits, l’URSS fournissait au Vietnam du matériel militaire et une aide financière. Les bananes arrivaient en URSS encore vertes. On les laissait mûrir avant de les proposer sur les étals. Joseph Staline aimait, paraît-il, beaucoup les bananes. Juste après la guerre, elles étaient réservées aux fonctionnaires de haut rang et aux meilleurs ouvriers qui les recevaient en récompense de leur travail.
Odessa, 1961-1964
Sigismond Kropivnitski/MAMM/MDFÀ la fin des années 1960, en raison de la Guerre du Vietnam et de la détérioration des relations entre l’URSS et la Chine, l’importation de bananes en provenance d’Asie cessa. Dans les années 1970 et 1980, sous Leonid Brejnev, les bananes venaient de Guinée, de Colombie et d’Équateur. Elles étaient d’un prix abordable mais étaient toujours considérées comme des fruits exotiques. C’est pourquoi les Moscovites et Léningradiens n’hésitaient pas à faire de longues queues pour en acheter.
Au début des années 1980, les taxes d’importation sur les fruits exotiques furent levées, ce qui entraîna une baisse importante des prix et la saturation du marché. Aujourd’hui, en Russie, on trouve des bananes dans n’importe quel magasin d’alimentation.
Dans cette autre publication, découvrez huit fruits et légumes poussant en Russie contre toute attente.
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