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Un jean américain étaient le rêve de presque chaque Soviétique. Pendant longtemps, ce rêve était presqu’impossible à réaliser.
Festival mondial de la jeunesse et des étudiants à Moscou, 1957
Sovfoto/Universal Images Group via Getty ImagesLes habitants de l’URSS ont vu pour la première fois des jeans à la fin des années 1950 : environ 34 000 étrangers ont afflué dans le pays pour le Festival mondial de la jeunesse. Depuis lors, selon l’historienne de la mode Megan Virtanen, ce n’était pas seulement un produit occidental prestigieux aux yeux des Russes, mais un objet de désir ultime.
Voici quelques exemples de ce que les Russes étaient prêts à faire pour ces pantalons.
Les étudiants étaient prêts à travailler de nuit à décharger des wagons pour les obtenir : un jean Levi’s, Lee, Wrangler ou Montana coûtaient alors de 150 à 300 roubles (quatre mois de salaire pour ce type de travail).
Porter des jeans en URSS pouvait déboucher sur un licenciement ou une exclusion de l’université. Et on ne vous laissait pas entrer à l’école si vous en portiez – et pourtant, les gens prenaient de gros risques. Après avoir acheté un jean, certains les portaient tous les jours pendant 3 à 4 ans et les jours de lavage, leurs propriétaires ne quittaient tout simplement pas leur domicile.
Il y a eu aussi des épisodes tragiques : à la fin des années 1970, la Gazette littéraire rapportait des cas d’adolescents qui se sont suicidés car ils ne parvenaient pas à obtenir cet objet à la mode.
Étudiants des années 1970
Alexandre Bounkine/Archives d'Alexandre Bounkine/russiainphoto.ruPendant longtemps, le pays a lutté officiellement contre les jeans : le denim original américain était banni des rayons. Les fartsovchtchiki – ces marchands qui vendaient sous le manteau avec une marge de 300% – étaient poursuivis en tant que spéculateurs (la spéculation était un délit).
Néanmoins, plus le « rideau de fer » s’ouvrait, plus il était difficile pour l’appareil d’État de contrer la popularité de ce produit occidental. Finalement, les autorités soviétiques ont décidé de tourner cette demande à leur avantage.
Dans les années 1980, l’industrie légère soviétique a décidé de produire indépendamment ce vêtement populaire sous licence occidentale. Mais il n’était pas possible de s’entendre avec des marques connues. Les autorités se sont alors tournées vers l’italien Jesus Jeans. Sous licence et avec son équipement, l’URSS a commencé en 1983 à confectionner ses premiers jeans sous les marques Tver et Vereïa. La production était énorme : 1,2 million de paires par an.
Théodosie, 1980
Collection d'Anton Potapov/russiainphoto.ruCertes, il y avait un problème : bien qu’ils soient qualifiés de jeans, ils ne ressemblaient à l’original que par leur couleur. Ils n’étaient pas cousus à partir de vrai denim, mais de coton dense de mauvaise qualité cherchant à l’imiter. Ce tissu ne vieillissait pas comme le denim – avec des marques d’usure caractéristiques –, et après à peine 10 lavages, le pantalon perdait simplement sa couleur ou se déchirait.
République socialiste soviétique moldave, 1989
Anatoli Semekhine, Alexeï Chtchoukine/TASS>>> Comment le magazine Burda a-t-il bouleversé la morne réalité des femmes soviétiques?
Malgré cela, les jeans soviétiques s’arrachaient dans les magasins. Et pour qu’ils ressemblent un tant soit peu aux modèles importés, on les faisait vieillir artificiellement à l’aide de pierre ponce (cela faisait des marques d’usure, comme sur le vrai denim). Un morceau de pierre ponce était jeté dans la machine à laver avec un jean et on la mettait en marche.
Commerce de jeans belges sur la place près du TSOUM (« Magasin Central Universel »). Moscou, 1989
Alexeï Antonov/TASSDans les années 1980, les jeans délavés étaient à la mode en Occident, ce qui a beaucoup plu au peuple soviétique entreprenant. Après tout, les citoyens du pays des Soviets savaient comment imiter cet effet. C’est alors qu’on a commencé à faire bouillir des jeans en masse.
La recette était efficace et nécessitait une approche créative. Avant de faire bouillir le jean, on le tordait et l’étirait, en le fixant dans cette position avec des clips. La méthode de serrage influait sur la forme des traces obtenues.
Ensuite, une grande casserole d’eau était chauffée et de l’eau de javel y était ajoutée généreusement (environ 1:5). Les jeans torsadés étaient placés dans la casserole et bouillis pendant 15 à 20 minutes, en remuant avec une longue cuillère. Après cela, le pantalon était soigneusement rincé. On obtenait ainsi des taches blanchies rappelant l’original. En URSS, ces jeans étaient appelés « varenki » (« bouillis »).
Dans cette autre publication, découvrez comment fonctionnait le marché noir de produits étrangers en URSS.
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