Comment des anciens du KGB, de l’armée et de la police ont organisé le plus grand casse d’URSS

Histoire
NIKOLAÏ CHEVTCHENKO
Six personnes sont mortes lors de ce braquage perpétré dans la capitale soviétique.

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Tard dans la soirée du 14 novembre 1986, un camion de transport de fonds s’arrête devant un grand magasin chic sur la chaussée de Mojaïsk, à Moscou. Laissant ses deux collègues dans le camion, le troisième convoyeur franchit le seuil du magasin pour récupérer l’argent qui s’y était accumulé à la fin de la journée. L’homme n’avait plus que quelques minutes à vivre.

La fusillade

Le grand magasin Molodiojny était un lieu de shoping prisé de la capitale soviétique. Parfois, il proposait à ses clients des biens très difficiles à trouver en URSS. Sans surprise, d’importantes sommes d’argent s’y accumulaient à la fin de la journée de travail.

La soirée du 14 novembre 1986 ne faisait pas exception. Les caissiers avaient collecté plus de 330 000 roubles, une somme énorme quand on sait que le salaire mensuel moyen en URSS à l’époque variait entre 180 et 250 roubles.

À 21h10, un camion de transport de fonds s’est arrêté devant l’entrée principale du magasin. Deux convoyeurs sont restés dans le véhicule, tandis que le troisième – portant le nom de famille de Novikov – est entré dans l’établissement. Beaucoup de gens entraient et sortaient du magasin, et personne n’a prêté attention à un homme en uniforme de police avec une mallette à la main posté près de l’entrée. Les convoyeurs n’ont pas remarqué non plus un homme en civil qui attendait près de la porte d’entrée du magasin, et un officier avec un sac volumineux entre les mains.

Quelques minutes plus tard, Novikov sort du magasin avec l’argent. Il se dirige vers le camion et ouvre la porte. À ce moment précis, une balle l’atteint.

Une violente fusillade éclate dans la rue. Les deux hommes en uniforme de police et militaire ont ouvert le feu sans discernement sur les gardes, ne laissant aucun survivant. L’homme en civil avec le sac est resté cloué sur place, comme s’il hésitait à poursuivre son rôle dans le vol.

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Une policière nommée Vera Alfimova, qui n’était pas en service et se trouvait à proximité lorsque la fusillade a éclaté, s’est précipitée vers les voleurs. L’un d’eux l’a tuée de quatre balles.

Le silence s’est installé alors que la fusillade venait de prendre fin. Les agresseurs se sont emparés de l’argent et sont repartis à pied.

La course-poursuite

Cherchant à brouiller leur piste, les voleurs - Igor Kniguine et Valeri Fineïev - se sont précipités dans la cour intérieure d’un immeuble voisin où un autre membre du gang - Konstantin Goloubkov - les attendait dans une autre voiture.

L’homme en civil qui se tenait près de l’entrée avec un sac était le quatrième larron, Evgueni Soubatchev. Il était censé lancer plusieurs cocktails Molotov à l’entrée du magasin pour semer la panique et retenir la police. Cependant, Soubatchev a abandonné son poste lors de la fusillade et s’est réfugié chez lui.

La plupart des voleurs avaient une formation militaire ou policière. Kniguine était un ex-policier limogé pour malversation ; Fineïev était lui aussi un ancien flic reconnu coupable d’avoir passé à tabac un suspect lors d’un interrogatoire, raison pour laquelle il avait été condamné à trois ans de prison ; Soubatchev avait été expulsé du Parti communiste en lien avec une affaire inconnue. Enfin, le chauffeur nommé Konstantin Goloubkov était un ancien du KGB.

En montant dans la voiture, les voleurs ont réalisé qu’il y avait un témoin : un riverain promenait son chien et avait vu les hommes en train de courir et leur voiture. Ils ont essayé de le tuer, mais, heureusement pour l’innocent, les assaillants avaient vidé leurs chargeurs pendant la fusillade : ils ont donc dû renoncer à leur dessein et partir.

La voiture est partie en trombe, son conducteur essayant désespérément de semer les policiers. Cependant, le témoin avait déjà transmis le signalement de la voiture et décrit les deux suspects à la police. Désormais, tous les officiers de Moscou étaient aux trousses de la Lada bleue.

Bientôt, l’une des voitures de patrouille a repéré un véhicule similaire. Les agents lui ont intimé l’ordre de s’arrêter et le conducteur a immédiatement obtempéré. Le conducteur est sorti du véhicule, mais il ne correspondait pas à la description qu’ils avaient. Soudain, depuis l’intérieur de la voiture, Kniguine et Fineïev ont ouvert le feu sur les policiers, blessant l’un d’eux, avant de reprendre leur cavale.

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Quelque temps plus tard, le véhicule a été retrouvé abandonné dans un chantier de Moscou. Goloubkov - le conducteur - avait été blessé d’une balle lors de la fusillade avec la police et a été achevé par les membres de gang. Son cadavre a été laissé dans la voiture avec l’argent. On ignore pourquoi les voleurs ont laissé les fonds avec leur compère décédé.

Face à la justice

Les criminels se séparent alors. Cerné par la police, Kniguine a d’abord pris un otage, mais s’est ensuite suicidé après en réalisant qu’il n’avait aucune chance.

Soubatchev, le criminel qui avait renoncé à sa mission et se cachait désormais, a été compromis par des documents trouvés dans la voiture abandonnée. Il a été interpellé à son domicile. Les enquêteurs ont obtenu ses aveux, ont appris tous les détails et, une quinzaine d’heures plus tard, ils appréhendaient Valeri Fineïev, le dernier suspect.

L’enquêteur en chef Issa Kostoïev – qui deviendrait célèbre quelques années plus tard pour l’arrestation de l’un des tueurs en série les plus terrifiants de l’histoire, Andreï Tchikatilo - a renvoyé l’affaire devant un tribunal militaire à l’automne 1987.

Le tribunal a condamné Soubatchev à 10 ans et Fineïev – qui avait avoué deux autres meurtres sans lien avec l’affaire – à la peine de mort sur le peloton d’exécution.

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