Comment des héros de l'Empire russe sont devenus des héros de l'Union soviétique

Konstantin Nedoroubov

Konstantin Nedoroubov

Iouri Somov/Sputnik
Certains d'entre eux portaient ouvertement sur leur poitrine des récompenses tsaristes et soviétiques, bien qu'aucune autorisation officielle des autorités n'ait été donnée pour cela.

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De nombreux militaires de l'armée tsariste, qui ont traversé les champs de bataille de la Grande Guerre, ont ensuite participé à la Seconde Guerre mondiale. Il s'est avéré que pour leur bravoure, ils ont reçu des récompenses de l'Empire russe - la croix de Saint-Georges de l'un des quatre degrés existants - ainsi que des ordres et médailles soviétiques.

Dans le même temps, certains ont réussi à s’illustrer et à obtenir les récompenses impériales et soviétiques les plus prestigieuses. Au cours de la Première Guerre mondiale, après avoir reçu les croix de Saint-Georges des quatre degrés, ils sont devenus des chevaliers de Saint-Georges à part entière et, pour la bravoure démontrée dans la guerre contre l'Allemagne nazie, ils ont reçu le titre de héros de l'Union soviétique.

Ivan Tioulenev

« De taille moyenne, exceptionnellement fort et bien bâti, Ivan Vladimirovitch, en selle, se transformait en un véritable centaure, comme s'il se fondait avec son cheval » - cette description du cavalier du 5e régiment de dragons de Kargopol Ivan Tioulenev a été fournie par un de ses camarades d’armes. 

Ivan Tioulenev a reçu sa première croix de Saint-Georges du 4e degré, le plus bas niveau, pour avoir, le 14 juillet 1915, avec deux camarades, attaqué une patrouille allemande supérieure en nombre, abattu 11 soldats ennemis et a fait trois prisonniers. D'autres batailles lui ont valu trois autres croix de Saint-Georges et le grade de sous-officier.

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Au début de l'invasion de l'Union soviétique par la Wehrmacht, le général d'armée Ivan Tioulenev commandait les troupes du front sud. Comme tous les chefs militaires soviétiques, la période initiale de la guerre fut un désastre pour lui. « Il ne sait pas attaquer, mais il ne sait pas non plus retirer ses troupes. Il a perdu deux armées d'une manière dont on ne perd même pas des régiments », a écrit Staline de façon peu flatteuse au sujet de Tioulenev à l'époque. 

Ivan Tioulenev a été envoyé dans l'Oural pour former des divisions de réserve, avec lesquelles il s’est illustré. Le point culminant de sa carrière militaire a été le commandement des troupes du Front transcaucasien, qui a empêché l'ennemi de s'emparer du Caucase et de pénétrer dans les champs pétrolifères de la région de Bakou et de Grozny.

Malgré ses mérites, Tioulenev n'a pas reçu le titre de héros pendant longtemps. « Probablement, il aurait fallu livrer le Caucase puis le libérer. Alors l'évaluation des activités du commandement du front aurait été plus élevée », a déploré Ivan Tioulenev. En 1978, soit quelques mois seulement avant sa mort, Tioulenev, 86 ans, a finalement été honoré de la plus haute récompense.

Konstantin Nedoroubov

Par une claire journée d'août au tout début de la Première Guerre mondiale, un groupe de Cosaques du Don, sous un ouragan de tirs d'artillerie ennemie, a fait irruption à l'emplacement d’une batterie autrichienne et l'a capturée avec ses servants et les munitions. C’est ainsi que le sergent Konstantin Nedoroubov, qui le commandait, remporta sa première croix de Saint-Georges.

À l'avenir, trois autres croix lui seraient attribuées : pour la capture de 52 soldats autrichiens avec un officier, ainsi que pour la prise d’un quartier général allemand avec de la documentation importante. Le commandement n'a en outre pas ignoré le courage et la bravoure dont Konstantin Nedoroubov a fait preuve lors d’une opération à grande échelle de l'armée russe en 1916 – l’offensive Broussilov.

Il est curieux de noter que pendant la guerre civile en Russie, le futur héros de l'Union soviétique s’est battu (comme une partie importante des Cosaques du Don) pour les Blancs. Cependant, ayant été capturé par les rouges, il est passé de leur côté. Bientôt, Nedoroubov a de nouveau été fait prisonnier – cette fois par les Blancs. Le destin lui était favorable : compte tenu de ses mérites militaires, ils n'ont pas abattu ce cavalier détenteur de toutes les croix de Saint-Georges possibles.

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Au tout début de la guerre entre l'URSS et l'Allemagne nazie, Konstantin Nedoroubov a tenté de s'enrôler dans des unités actives, mais a été refusé en raison de son âge avancé - il avait déjà la soixantaine. « Les jeunes soldats meurent par milliers parce qu'ils sont inexpérimentés. Moi j'ai eu quatre "Saint-Georges" dans la guerre avec les Allemands. Donc je sais comment les combattre », a réagi Nedoroubov avec émotion. 

Finalement, à l'automne de la même année, il réussit à rejoindre la Division de cavalerie des Cosaques du Don, au sein de laquelle il devint le commandant d'escadron.

Cavalier expérimenté, Nedoroubov a transformé son unité en force de combat soudée, aussi efficace en défense qu’à l’attaque. Le nombre de soldats et d'officiers ennemis tués par l'escadron se comptait par centaines. Durant une bataille près du village de Maratouki, Konstantin Nedoroubov a à lui seul éliminé 70 Allemands.

En 1943, Konstantin Nedoroubov a reçu le titre de héros de l'Union soviétique. Il a survécu à la guerre et est mort à l'âge vénérable de 89 ans en 1978.

Grigori Agueïev

Quand, en 1915, Grigori Agueïev s'enfuit vers le front pour « combattre l'Allemand », il n'avait pas encore quatorze ans. Son jeune âge ne l'a pas empêché de devenir bientôt chevalier à part entière de la croix de Saint-Georges.

Agueïev a reçu sa première croix pour s'être faufilé dans une tranchée allemande, avoir volé une mitrailleuse avec des munitions et l'avoir traînée jusque dans son camp. À l'avenir, Grigori Agueïev a invariablement fait preuve de courage et de dévouement au front, en tant que membre d'une équipe de mitrailleurs, passant six mois sans interruption dans des batailles. Agueïev a terminé la guerre en tant que sous-officier supérieur avec quatre croix de Saint-Georges sur la poitrine.

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Pendant la Seconde Guerre mondiale, Agueïev est devenu l'un des fondateurs des bataillons de chasse de la milice populaire de Toula. Ces formations de volontaires étaient composées de citoyens soviétiques qui n'étaient pas soumis à la conscription prioritaire et étaient engagés à l'arrière dans la lutte contre les saboteurs et les espions ennemis, ainsi que la capture des déserteurs et des maraudeurs. Le 26 octobre 1941, les bataillons furent regroupés au sein d’une seule force appelée Régiment ouvrier de Toula.

Toula, située au sud de Moscou, a joué un rôle crucial dans la défense de Moscou à l'automne 1941. C'est à travers cette ville que la 2e Panzerarmee de Heinz Guderian fonça vers la capitale, avec l'intention de refermer l'encerclement de Moscou par le sud-est.

Lors des batailles pour la ville, Agueïev, devenu commissaire du régiment ouvrier, était toujours en première ligne. Il soutenait les nouveaux-venus qui n'étaient pas encore formés, motivait les combattants à passer à l'attaque et participa à la couverture de la retraite d’unités de la 50e armée vers de nouveaux lieux de déploiement. Cependant, Grigori Agueïev n'était pas destiné à se battre longtemps - le 30 octobre, il a été abattu par une rafale de mitrailleuse.

« La mort du commissaire a profondément marqué tout le régiment, s’est souvenu le commandant de la 50e armée, le général Ivan Boldine : Le petit bosquet dans lequel reposait son corps était déjà de l'autre côté du front. Comment le récupérer pour l'enterrer avec les honneurs militaires ? Trois casse-cou ont rampé dans le bosquet capturé par l'ennemi et, au péril de leur vie, littéralement à la barde des nazis, ont dérobé le cadavre d’Agueïev et l'ont amené à Toula ».

Le titre de Héros de l'Union soviétique a été décerné à Grigori Agueïev à titre posthume à la veille du 20e anniversaire de la Victoire, le 8 mai 1965.

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