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Ils vivaient selon leurs propres lois dans les terres libres du Sud de la Russie. Ils étaient l'une des forces militaires les plus fiables de l'Empire russe, mais également un casse-tête constant pour les tsars russes qui désiraient les gouverner et les contrôler.
Le nombre de cosaques, les statistiques les concernant et leurs lieux de résidence ne peuvent être définis avec précision. Historiquement, ce mot même désignait une vaste congrégation de personnes libres dans les terres russes.
Le mot même de cosaque (« казак », « kazak » en russe) vient du turc et signifie homme libre, vagabond, chercheur de fortune. En Russie, il désignait des personnes qui n’étaient pas liées à leurs maîtres ou à leurs propriétaires.
Les premiers cosaques étaient des gens qui vivaient à la périphérie des principautés russes, principalement dans le Sud, approximativement à partir des XIV-XVème siècles. Ils résidaient dans des lieux fortifiés mis en place pour protéger les principautés des tribus nomades qui erraient dans la région appelée « le Champ sauvage », entre les terres de la principauté de Vladimir-Souzdal et les mers Caspienne et Noire.
Ces communautés étaient remplies de gens ayant privilégié la liberté et le danger à la vie relativement sûre et dépendante en Russie centrale. Alors que le servage, les impôts et le gouvernement centralisé commençaient à apparaître en Russie, les terres des cosaques se sont mises à accepter des serfs en fuite, des gens qui avaient des problèmes avec la loi, et quiconque choisissait d’y trouver refuge.
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Dès que le premier gouvernement centralisé est apparu dans la principauté de Moscou (vers le XVe siècle), ses dirigeants ont essayé de mettre les cosaques à leur service. Des formations militaires cosaques ont ainsi participé aux batailles des princes de Moscou contre les Tatars nomades. Sous Ivan le Terrible, les cosaques vivant dans le Sud (le long du Don, du Dniepr et ailleurs) étaient en partie gouvernés par ses prikazes (institutions d'État qui précédaient les ministères). Les cosaques servaient et montaient la garde contre les ennemis de Moscou dans les villes frontalières, en partie soutenus par le gouvernement et commandés par des militaires officiels non cosaques envoyés de la région centrale.
Au XVIIe siècle, un prikaze cosaque distinct a été organisé pour contrôler les cosaques, mais ceux-ci vivaient encore largement dans la liberté – attaquant les voisins de la Russie (l'Empire ottoman en particulier), les dérangeant par leurs raids même lorsque le gouvernement essayait de maintenir la paix entre les pays.
Fort cosaque de Ialoutorovsk, en Sibérie
Maksim Sloutski/TASSL’on comptait plus de 20 armées cosaques différentes situées dans différentes parties de l'Empire russe. Jusqu'à la fin du XIXe siècle, elles ont conservé leur statut relativement libre. L'armée cosaque du Don (située autour du bassin du Don, sur le territoire de l'Ukraine actuelle) était la plus grande et la plus ancienne d'entre elles. Ce qui les distinguait de l'armée régulière était qu'en période de paix, les armées cosaques se dissolvaient facilement et les cosaques individuels retrouvaient leur mode de vie habituel en échangeant des biens et des marchandises, en buvant, en faisant la fête, et en vivant simplement leur liberté dans les steppes. Ils étaient exempts de l'impôt sur le capital, de celui sur le recrutement et d'autres taxes, mais ils étaient strictement obligés de se présenter au moindre appel de l'administration centrale, armés et à cheval.
Stepan Razine, par le peintre Sergueï Kirillov
Sergueï KirillovAux XVIIe et XVIIIe siècles, les régions traditionnellement habitées par les cosaques sont devenues des parties de la Russie. En 1667-1671, la politique du Tsarat de Moscou a provoqué un soulèvement des cosaques du Don connu sous le nom de guerre paysanne de Stepan Razine. Le leader, Stepan Razine, a finalement été livré aux fonctionnaires du tsar par ses compagnons cosaques, car ces derniers voulaient conserver leur autonomie. Cependant, au début du XVIIIe siècle, les cosaques du Don ont été soumis par Pierre le Grand et leurs terres intégrées à l'Empire.
Sous le règne de Catherine II, il s'est passé à peu près la même chose : alors que l'Empire russe commençait à conquérir les terres de la Malorossia (les actuelles Ukraine et Biélorussie), la rébellion d'Emelian Pougatchev a eu lieu en 1773-1775. Pougatchev, également cosaque, a conduit ses hommes et ses paysans en Russie centrale, mais a été écrasé par l'armée impériale russe. Après cela, les cosaques du Don ont été fermement obligés de servir l'État. Le terme cosaque est alors devenu une dénomination au sein du peuple russe, impliquant certains privilèges et responsabilités.
Emelian Pougatchev
Domaine publicAu milieu du XVIIe siècle, l'État russe a été rejoint par une autre grande armée cosaque – les zaporogues. Installés dans la vallée du Dniepr, sur les territoires de l'Ukraine centrale, ils étaient politiquement dépendants de l'État polono-lituanien, défendant ses frontières sud et est contre les Tatars de Crimée, les Ottomans, et même les tsars de Moscou. Cependant, comme leurs relations avec les Polonais laissaient à désirer, des soulèvements et des guerres de libération se produisaient en permanence. Au cours de l'une d'entre elles, menée par Bogdan Khmelnitski, les cosaques zaporogues ont demandé l'aide des Russes et se sont déplacés sous la protection et la domination de Moscou – événement considéré en Russie et en URSS comme la « réunification de l'Ukraine et de la Russie ».
"Les cosaques zaporogues écrivant une lettre au sultan de Turquie" par Ilia Répine
Ilia RépineL'existence de l’armée zaporogue dans l'État russe a duré un peu plus d'un siècle. En raison de l'extension (due aux guerres russo-ottomanes) des frontières de l'Empire vers le sud, les cosaques zaporogues ont ensuite vu leur territoire laissé loin à l’arrière, et ont par conséquent abandonné leur rôle principal qui était initialement celui de défenseurs des frontières nationales. Lorsqu'en 1775, l'impératrice russe Catherine II a dissous l'armée zaporogue, certains cosaques ont choisi de servir le sultan ottoman, tandis que les autres se sont installés sur les territoires de l'actuelle région du Kouban, dans le Sud de la Russie. Ils sont devenus les ancêtres de ceux que nous connaissons aujourd'hui sous le nom de cosaques du Kouban.
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"Expédition de Semion Dejnev", par Klavdi Lebedev
Klavdi LebedevErmak, qui a soumis le khanat de Sibérie, Semion Dejnev, qui a découvert ce qui est aujourd'hui le détroit de Béring, et de nombreux autres explorateurs russes des XVIIe et XVIIIe siècles ont été appelés cosaques parce qu'ils servaient à la périphérie du territoire russe, protégeaient ses frontières et étendaient son influence vers l'extérieur. Semion Dejnev a même servi officiellement comme cosaque dans la ville sibérienne de Tobolsk. Cependant, ces cosaques sibériens n'étaient pas comme les cosaques de la région du Don – ils n'étaient pas unis en armées, mais étaient plutôt comme des gardes-frontières.
Les cosaques n'appartenaient à aucune ethnie particulière. La plupart des cosaques du Don avaient une ascendance mixte – en partie de Russie centrale, en partie du Sud, avec de fortes influences tatare et polonaise, donc nous ne pouvons pas les définir ethniquement.
La plupart des cosaques étaient des orthodoxes russes et des vieux croyants russes. Leur foi chrétienne les définissait plus que leur ethnie ou leur lieu de vie ; de plus, les principes et le mode de vie des cosaques unissaient des personnes très différentes qui s'identifiaient comme tels.
Portrait d'une famille cosaque
russiainphoto.ruCe qui frappe immédiatement chez les cosaques, ce sont leurs coiffures, leurs moustaches et leurs vêtements colorés, qui ressemblent fortement à l’habillement des peuples du Caucase du Nord – en grande partie parce que ce sont les vêtements des cavaliers professionnels de guerre qui vivent dans des climats chauds.
Les garçons cosaques apprenaient à monter à cheval, à utiliser une épée et à tirer avec un fusil dès l'âge de 10 ans. L'éducation cosaque était rude. Les enfants travaillaient dans les champs aux côtés de leurs parents, et même leurs jeux étaient militaires. Le chant et la danse étaient également des éléments importants de l'éducation des enfants, car un cosaque se devait d’être non seulement sans peur, mais aussi joyeux.
Participants d'une reconstitution historique
Sergueï Pivovarov/SputnikC'est très difficile à dire, car les cosaques ne payaient pas d'impôts et ne participaient pas au recensement. Nous ne disposons donc que de chiffres approximatifs pour la fin du XIXe – début du XXe siècle.
Le recensement de 1897, le premier qui a avancé un nombre de cosaques, a estimé qu'il y en avait environ trois millions (1 448 382 hommes et 1 480 460 femmes). Cependant, leur nombre réel était bien plus important, estimé à environ cinq millions dans tout l'Empire.
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Des cosaques de l'Armée rouge profitant d'un moment de repos pour s'adonner à une danse traditionnelle
Getty ImagesPendant l'époque soviétique, de nombreux cosaques ont subi des répressions, car la plupart d'entre eux s'opposaient farouchement aux bolcheviks. Le gouvernement a alors adopté une politique de décosaquisation. En 1918-1924, un grand nombre de cosaques ont été exécutés et un nombre encore plus élevé a été déporté. En 1917, la région de l’armée des cosaques du Don était habitée par environ 4,5 millions de personnes, dont la moitié était identifiée comme cosaques ; en 1921, il n’y restait déjà plus qu'environ 2,2 millions de personnes.
Cependant, l’on trouvait des formations militaires cosaques dans l'armée soviétique, bien que leur nombre ne puisse être comparé à celui des armées cosaques de l'Empire russe. Les cosaques soviétiques de la Seconde Guerre mondiale n'étaient pas très efficaces, la cavalerie pouvant difficilement rivaliser face aux chars et avions.
Actuellement, les personnes qui s'identifient comme cosaques, ou qui déclarent être d'origine cosaque, vivent sur les territoires de la Russie, du Kazakhstan, de l'Ukraine, et dans différentes parties du monde (de nombreux cosaques ont émigré de Russie après la Révolution bolchévique de 1917).
En 1989, le Soviet suprême de l'Union soviétique a officiellement reconnu les répressions injustes exercées contre les cosaques et a confirmé leur droit à être officiellement réhabilités politiquement. En 1994, le gouvernement de la Fédération de Russie a déclaré que « le renouveau du service d'État russe traditionnel des cosaques est l'un des éléments de la formation d'un nouvel État russe ».
Actuellement, il existe une formation paramilitaire russe appelée « Cosaques enregistrés de la Fédération de Russie ». Elle réunit une hiérarchie de sociétés cosaques russes contemporaines dans différentes parties du pays. L’on trouve également un Conseil des affaires des cosaques sous l'égide du président de la Fédération de Russie. Il y a environ 140 000 cosaques (membres des sociétés cosaques) actuellement en Russie, et 11 grandes sociétés cosaques enregistrées, mais le nombre de descendants de cosaques s’avère beaucoup plus important.
Dans cet autre article, nous vous expliquons comment les cosaques russes ont combattu pour et contre Hitler.
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