Journal de l’Altaï: sur les routes de Sibérie méridionale

Journal de l’Altaï.

Journal de l’Altaï.

Anton Petrov
L’équipe Siberia: Joining the Dots – comprenant la journaliste Anna Grouzdeva, le photographe et lama du monastère bouddhiste (datsan) Aguinski Daba Dabaïev ainsi que le reporter photo Anton Petrov – a parcouru en vélo et en auto le sud de la République de l’Altaï (Sibérie occidentale) pour visiter pendant deux étés de suite les steppes et les montagnes, connaître la vie des nomades et se faire des amis parmi les Sibériens.

Les routes. L’Altaï et l’Arizona

Dans la chaleur de l’été, la steppe de Tchouïsk (dans le sud de l’Altaï) rappelle les terres arides de l’Arizona, avec une route au revêtement idéal traversant la plaine semée de rares buissons secs et animée des crissements d’insectes.

Crédit : Anton Petrov

Dans l’air chauffé qui semble onduler, les paysages d’un bel ocre se transforment en tableaux impressionnistes qui prennent vie. Seule la crête Tchikhatchov où commence la République du Touva et la chaîne de Tchouïsk scintillante de neige, derrière laquelle s’esquisse la Mongolie, retiennent le regard.

Ici, on ne rencontre personne par hasard. Dans le district de Koch-Agatch, les chercheurs d’aventure et les photographes, les ethnographes et les archéologues, les auto-stoppeurs et les motards viennent se fondre dans la vie exotique de la steppe.

Crédit : Anton Petrov

Nous les rencontrons pour la deuxième année consécutive dans le camping de yourtes de Tyd-Touyaryk, au 871ème kilomètre de la route de Tchouïsk. Et à chaque rencontre, nous vivons quelque chose ensemble – un concert de conteurs de l’Altaï autour d’un feu de bois ou un petit déjeuner à base de fromages dans une yourte – avant de nous séparer et de nous disperser sur les routes.

Les gens. L’été, l’automne, l’hiver, le printemps et de nouveau l’été

Lors de notre premier voyage dans l’Altaï, nous sommes allés à la rencontre des bergers et des nomades de la vallée de la rivière Youstyd, à la frontière entre la Russie et la Mongolie. Pour nous, incorrigibles citadins, chaque jour était particulier avec son rythme de vie qui nous semblait nonchalant.

Crédit : Anton Petrov

Nous sommes rapidement devenus amis avec ces gens qui s’occupaient du ménage, cuisinaient et emmenaient paître leurs troupeaux de moutons, de chèvres, de chevaux, de yaks et de vaches. Le ciel nocturne au dessus de la Youstyd était pur et étoilé, les cimes de la crête Tchikhatchov blanchissaient au loin : la vague de froid a transformé la pluie d’hier en neige.

Vers dix heures du soir, les bergers étaient rentrés dans leurs yourtes et seul le murmure de la rivière venait rompre le silence. Aïjanat Assanova, maîtresse de l’une des familles kazakhes voisines, a insisté pour faire goûter à notre équipe de tournage du fromage fait maison que les Kazakhs appellent ryntchik.

Crédit : Anton Petrov

La yourte était baignée d’une faible lueur provenant d’un petit poêle installé au centre. Tous les enfants, exception faite pour l’aînée, dormaient, tandis que le chef de famille, Serikbol, était sorti dans la cour pour détacher les chevaux et les laisser partir paître dans la vallée.

Les Assanov. Crédit : Anton PetrovLes Assanov. Crédit : Anton Petrov

Aïjanat ne parlait presque pas russe et n’a pas pu nous raconter la vie nomade de la famille : les Assanov vivent tout au long de l’année dans leur yourte qu’ils emmènent avec eux en allant de pâturage en pâturage.

Elle a posé, comme presque tous les jours, une grande casserole sur le feu pour faire bouillir du lait de vache et en fabriquer par la suite du fromage. Quelques heures plus tard, elle et sa fille ont filtré le lait à travers un linge, ont ajouté du levain et ont placé le produit dans un endroit frais à l’abri de la lumière. Le silence et la tiède odeur de lait mélangés à notre fatigue flottaient dans la yourte. Serikbol est rentré et est allé se coucher.

Un jeune en vêtements traditionnels. Crédit : Anton PetrovUn jeune en vêtements traditionnels. Crédit : Anton Petrov

Quand je quittais la yourte douillette à destination de notre tente froide, je me sentais gênée: Aïjanat devra se lever comme toujours à cinq heures du matin pour traire les vaches, mais je savais qu’elle allait s’occuper encore longtemps de notre fromage. Pourtant elle m’a souri gentiment et m’a souhaité une bonne nuit.

Le matin, ses enfants nous ont apporté un grand morceau de fromage crémeux, blanc et délicieux qui nous a servi pendant plusieurs jours de déjeuner et de dîner durant notre voyage dans l’Altaï.

« Merci pour les photos ! ». A l’automne j’avais envoyé aux Assanov les clichés pris en été. « Comment vont les parents ? Quel temps fait-il ? »« Nous sommes au village, à l’école. Nos parents sont à l’aire de stationnement. Il fait environ –40°C degrés » : voici des extraits de notre échange de mails.

Du fromage local. Crédit : Anton PetrovDu fromage local. Crédit : Anton Petrov

« Nous reviendrons en juillet ! Chouette ! » : un texto envoyé au printemps. L’été dernier, je quittais Youstyd en emportant dans mes bagages un morceau de fromage fait maison et la certitude que parmi toutes les régions sibériennes, l’Altaï n’était plus étranger pour moi.

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