Les troupes américaines du 5e bataillon du 7e régiment de défense antiaérienne lors d'un essai à Sochaczew, en Pologne, le 21 mars 2015, dans le cadre des exercices militaires de l'Otan.
APLe Pentagone entame l’élaboration de mesures visant à développer les systèmes de défense antiaérienne (DCA) en Europe. Cette décision intervient sur fond de nombreuses accusations réciproques entre Washington et la Russie concernant la violation présumée du Traité FNI sur les forces nucléaires à portée intermédiaire qui prévoit une réduction progressive de leur nombre.
Le sous-secrétaire américain à la Défense, Brian McKeon, a déclaré le 13 avril devant la commission des forces armées du Sénat américain : « Suite aux violations du traité FNI par la Russie, nous élaborons et mettons en pratique une stratégie de riposte aux actes hostiles russes, ce qui prévoit la modification et l’élargissement du système de défense antiaérienne afin de faire face au potentiel offensif de la Russie ».
Selon Viktor Litovkine, observateur militaire de l’agence TASS et ancien membre de la Commission militaro-industrielle de Russie, les Etats-Unis comptent développer et « imposer » leurs systèmes militaires à l’Europe. « Washington continue d’intimider la région avec une supposée menace russe et de promouvoir son matériel auprès des pays (de l’Otan). Ce sont des recettes pour le budget américain et des leviers supplémentaires de pression politique », a-t-il fait remarquer.Il a rappelé que les Américains avaient l’intention de livrer à l’Europe des batteries antimissile Patriot PAC-3, un « homologue » du système de défense antiaérien russe S-300. « Ces batteries viendront compléter le système de défense antimissile en construction en Pologne et en Roumanie », a souligné Viktor Litovkine.
Accusations de Washington
Le Pentagone affirme que les missiles de croisière R-500 utilisant les batteries tactiques Iskander-M sont capables d’atteindre des cibles situées à plus de 500 km. Les Etats-Unis prétendent également que le nouveau missile balistique intercontinental RS-26 Roubej est concerné par le traité FNI, car il peut être utilisé contre des cibles à moins de 5 500 km. Un tel rayon d’action n’est pas conforme aux normes de ce document.
Moscou dément ces affirmations et indique qu’il n’a reçu aucune accusation ni preuve officielle de la part de Washington. Les diplomates russes déclarent que ces accusations sont gratuites.
« Ils se contentent de dire : « Vous avez testé un missile, vous savez très bien de quoi il s’agit ». Ce n’est pas très sérieux », a noté le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, lors d’une conférence de presse en juin 2015.
Le ministère russe souligne que les responsables politiques et militaires du pays sont ouverts au travail bilatéral sur les forces nucléaires intermédiaires.
Néanmoins, fin 2015, les Etats-Unis ont annoncé qu’ils pourraient éventuellement introduire de nouvelles sanctions économiques contre Moscou en raison de violations présumées de ce traité.
Moscou contre-attaque
Moscou redoute que le bouclier antimissile américain en Europe orientale, en principe un système défensif, ne soit transformé en complexe offensif, a fait observer Alexandre Khramtchikhine, directeur adjoint de l’Institut des analyses politiques et militaires.« Le système américain de défense antimissile peut être adpaté afin de placer des missiles de croisière dans des silos », a-t-il expliqué. Ainsi, les sites de lancement des intercepteurs Standard SM-3 peuvent servir à tirer des missiles de croisière stratégiques Tomahawk.
« La Russie déclare que le traité FNI concerne également les missiles-cibles mis au point aux Etats-Unis pour tester les systèmes de défense antimissile. En fait, ce sont des missiles à portée moyenne qui ne sont tout simplement pas dotés de charges. Toutefois, les Américains ne le reconnaissent pas », a-t-il souligné.
Selon les experts militaires russes, le traité FNI doit s’étendre également aux drones de combat américains. En effet, les caractéristiques tactiques et techniques de ces appareils sont comparables à celles des missiles de croisière basés au sol, qui sont concernés par le traité.
Faut-il résilier le traité ?
Toutefois, malgré leurs différends, Moscou et Washington déclarent leur attachement à la poursuite des activités communes dans le cadre du traité FNI.
« Nous sommes ouverts à un dialogue sincère, s’il est concret et pas vide de sens, afin de lever toute préoccupation », a indiqué au cours d’une conférence de presse Sergueï Lavrov en juin 2015. La Maison Blanche soutient elle aussi l’idée de préserver cet accord entre les deux pays.
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