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Si l’Union soviétique a obtenu la victoire face à l’Allemagne nazie, c’est en partie grâce à lui. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le maréchal Joukov a en effet participé au développement de plusieurs opérations clés pour l’Armée rouge. Les soldats disaient d’ailleurs que « La victoire se trouve là où est Joukov ».
Gueorgui Joukov a fait ses premiers pas sur le champ de bataille pendant la Première Guerre mondiale, pendant laquelle il a reçu le grade de commandant et a été décoré deux fois de la Croix de Saint-Georges. Il a rejoint les bolcheviks en 1917, puis a pris part à la guerre civile. Ses débuts en tant que commandant militaire majeur ont eu lieu beaucoup plus tard, à l’été 1939, lors de la Bataille de Khalkhin Gol contre l’armée impériale japonaise.
Il dirigeait la première armée, qui avait du mal à retenir les Japonais qui s’étaient introduits sur le territoire de la Mongolie, alliée de l’URSS. Joukov a pratiquement transformé la défaite en victoire : il a non seulement réussi à empêcher les Japonais de frapper ses troupes par l’arrière, comme ils le souhaitaient, mais il a aussi pu les encercler et les anéantir. « La bataille de Khalkhin Gol a été une formidable expérience de combat pour nos soldats, les commandants de formations et d’unités, et moi-même, a-t-il rapporté à Staline. Je pense que les Japonais vont maintenant mieux estimer la force et les capacités de l’Armée rouge ». Il ne se trompait pas : après cette défaite, le Japon est devenu beaucoup plus méfiant dans ses plans d’attaque contre l’Union soviétique.
« Selon moi, Joukov est un homme d’une volonté et d’une détermination impressionnantes, doué de toutes les qualités nécessaires pour être un bon commandant militaire », disait un autre chef militaire illustre, Constantin Rokossovski. Joukov n’a jamais eu peur d’agir avec courage et détermination, savait évaluer correctement les situations stratégiques complexes et prenait les bonnes décisions dans les situations critiques. Il a été l’un des premiers commandants soviétiques à réaliser l’importance de la mécanique dans la guerre moderne et a donc appris à l’utiliser efficacement.
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Lorsque les Allemands ont envahi l’Union soviétique, Joukov s’est retrouvé au premier plan. Il était non-seulement membre permanent du commandement suprême et adjoint du commandant suprême Joseph Staline, mais il a aussi commandé à différents moments de la guerre cinq cinq fronts. Il a toujours été dépêché sur les zones les plus dangereuses, face aux adversaires de l’Union soviétique.
En septembre 1941, il est arrivé à Léningrad, alors au bord de la catastrophe. Là, il a donné l’ordre de fusiller tout soldat ou commandant qui abandonnerait les lignes de défense de la ville. « Un seul soldat qui paniquait pouvait causer la perte d’une unité entière, et les lâches ont causé de grandes pertes aux unités et aux pelotons. C’est ce à quoi nous avons survécu lors de la bataille de Léningrad. C’est pour cela que je peux affirmer avec certitude que les ordres de Joukov nous ont menés à la victoire », se souvient Piotr Mouchtakov, qui a participé à la défense de Léningrad. Finalement, en mobilisant les faibles ressources de la ville, Joukov a stabilisé le front, et empêché la prise de la cité et l’alliance des armées allemandes et finlandaises.
En octobre, Joukov est ensuite envoyé à Moscou pour faire face à « l’opération Typhon » menée par les Allemands pour prendre la capitale. Sous son commandement, les soldats du front de l’Ouest soviétique ont résisté aux plus grosses frappes ennemies et ont épuisé et anéanti les Allemands. La contre-attaque de l’Armée rouge a débuté le 5 décembre, et c’est entre autres Joukov qui l’a élaborée. En conséquence, la Wehrmacht est repoussée à bonne distance de la capitale. « Au plus fort des batailles, je devais dormir environ 2h par nuit, et encore, par à-coups..., s’est souvenu Joukov. Quand l’étape critique de la bataille de Moscou était du passé, je me suis endormi tellement profondément que personne n’a pu me réveiller pendant un long moment. À ce moment-là, Staline a essayé de m’appeler deux fois. On lui a répondu : "Joukov dort, et on n’arrive pas à le réveiller”. Staline a alors dit : “Laissez-le tranquille tant qu’il ne se réveillera pas lui-même” ».
Une rumeur concernant Joukov s’est propagée pendant la période postsoviétique : il aurait été un véritable « boucher » et un « braconnier du peuple russe », qui n’épargnait pas les soldats et recouvrait les routes de cadavres ennemis. L’historien Alexeï Issaïev a répondu à ces rumeurs : « Joukov se distingue des autres pas les faibles pertes qu’il a subies. Si on regarde en termes de pourcentage de ses troupes, il en a perdu bien moins que les autres chefs de guerre comme Koniev et Malinovski. C’est pour ça que le million de soldats au front lui a fait confiance, ils savaient tous qu’il pourrait faire tourner le conflit à leur avantage et qu’il subirait seulement des pertes modérées, car c’était vraiment un expert de la plus grande classe ».
Joukov a cependant connu un échec cuisant : la seconde offensive de Rjev-Sytchiovka (ou opération Mars), menée sous son commandement. Elle a débuté le 25 novembre 1942, une semaine après le début de l’offensive des troupes soviétiques à Stalingrad. L’opération Mars a échoué, mais a tout de même eu un effet positif : épuisé, le groupe d'armées « Centre » n’a pas pu envoyer de renforts à la 6e armée allemande de Friedrich Paulus, encerclée à Stalingrad.
C’est également Joukov qui a donné la victoire à l’Armée rouge lors de la bataille de Koursk, à l’été 1943, après laquelle les Allemands ont perdu l’avantage face à l’URSS. C’est lui qui a conseillé au commandement suprême de ne pas mener une attaque à grande échelle, mais plutôt de se concentrer sur la défense. Il écrivait dans son rapport : « C’est mieux si on fatigue l’ennemi sur nos défenses et détruisons ses chars. Ensuite, avec d’autres soldats, nous passerons à l’offensive contre le gros des troupes de l’ennemi et nous l’achèverons ».
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Devenu maréchal de l’Union soviétique en 1943, Joukov a continué à mener des attaques d’envergure qui ont littéralement mis l’ennemi à terre. À propos de l’offensive Vistule-Oder, lors de laquelle le 1er front biélorusse de Joukov a vaincu 35 divisions allemandes et réussi à approcher Berlin, le général allemand Friedrich Wilhelm von Mellenthin écrivait : « L’avancée russe derrière la Vistule se développait avec une force et une rapidité sans précédent, au point qu’il m’est impossible de décrire toute ce qu’il s’est passé entre la Vistule et l’Oder début 1945. C’était une tragédie comme je n’en avais jamais vue. L’Europe n’avait rien connu de tel depuis la chute de l’Empire romain ».
Il n’est pas surprenant que Staline ait chargé Joukov de prendre la capitale du Troisième Reich et de diriger le défilé de la Victoire sur la place Rouge, le 24 juin. Après la guerre, Joukov est tombé plusieurs fois en disgrâce suite à des conflits avec Staline et son successeur Nikita Khrouchtchev, mais le peuple l’a toujours apprécié et l’a même surnommé le « maréchal de la Victoire ». Il écrivait dans ses mémoires : « Pour moi, le plus important était de servir ma Patrie et mon peuple. Et c’est avec la conscience tranquille que je peux affirmer que j’ai tout fait pour accomplir ce devoir ».
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