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Ilia Répine (1844-1930) peignit les Bateliers de la Volga entre 1870 et 1873 . Cette toile suscita l’émotion parce qu’on y voit des haleurs (бурлаки / bourlaki) en haillons et à bout de force tirer le long d’une berge de la Volga une raschiva, un bateau à fond plat et à un mat de transport de matières premières ou de marchandises . À l’arrière-plan, on aperçoit un bateau-remorqueur qui semble neuf : c’est une humiliation supplémentaire pour ces misérables qui produisent des efforts surhumains pour faire avancer des embarcations sur le fleuve.
Les haleurs tiraient les bateaux à contre-courant, en particulier sur les berges où il était impossible de faire travailler des bêtes de trait. Des équipes d’hommes s’attelaient par une corde au navire pour le tirer depuis la rive. Elle était recrutée selon l’estimation suivante : 8 jambes pour tirer 1 000 pouds, soit quatre hommes pour tirer 16, 38 tonnes !
Pourquoi Ilia Répine choisit-il ce sujet ? Alors qu’il était encore étudiant à l’Académie des Beaux-Arts, il fit un voyage d’étude sur un bateau à vapeur jusqu’à Oust-Ijora (au confluent de l’Ijora et de la Néva ). Il y vit des haleurs qui, à côté des voyageurs qui se reposaient, avaient l’air sauvage et renfrogné. Le jeune peintre fut saisi par ce contraste et décida de peindre ces damnés de la terre. Sur le conseil d’un ami, il fit un séjour sur la Volga durant lequel il fit des esquisses, alla à la rencontre des haleurs, les regarda travailler.
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Ilia Répine affirmait franchement que sa première intention était de montrer le contraste. « Je dois reconnaître honnêtement que la question du mode de vie et des rapports sociaux entre les haleurs et leurs maîtres ne m’intéressait nullement. Je discutai avec eux uniquement pour donner plus d’assise à mon travail. Que sont donc tous les romans et toutes les nouvelles devant ce personnage ! Mon Dieu, comme ce morceau de tissu est enroulé autour de cette tête, comme ces cheveux frisés tombent sur ce cou et, le plus important, quel teint ! », écrivait-il dans son journal.
Ilia Répine ne s’attendait pas à ce que son travail soit accueilli de cette façon : les uns le critiquèrent durement, d’autres encensèrent le réalisme de la toile. Un acheteur se fit connaître, et quel acheteur ! Le grand-prince Vladimir Alexandrovitch acquit ce tableau pour 3 000 roubles et le fit accrocher dans la salle de billard du palais Vladimir (à Saint-Pétersbourg) . Il décrivait volontiers les personnages à ses invités et s’amusait de l’effet produit.
Les Bateliers de la Volga restèrent dans la résidence princière jusqu’en 1918, année où ils rejoignirent les collections du Musée Russe auxquelles ils appartiennent toujours.
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