Récolte de blé près du village de Talniki, près de Krasnoïarsk (Sibérie), le 27 août 2015.
ReutersÀ la mi-août 2016, le Département de l’Agriculture des Etats-Unis (USDA), dont le service analytique fait autorité dans le monde, a annoncé une nouvelle qui a fait sensation : au début de l’année agricole 2016/2017, « nous prévoyons que la Russie sera le première exportateur mondial pour la toute première fois ». Selon l’institution, ce remarquable résultat a pu être atteint grâce à « des conditions idéales, telles qu’une météo optimale pour le chargement, une gestion efficace du mouvement du grain par les ports et des fournitures régulières tout au long de l’année.
Un pronostic record
Selon l’USDA, la Russie pourrait vendre 30 millions de tonnes de blé sur le marché mondial, dépassant les 28 pays de l’Union européenne réunis. La mauvaise récolte ayant frappé l’UE cette année ouvre à la Russie de nouveaux marchés commerciaux. « La Russie a le fret et les avantages logistiques pour exploiter les marchés d’Afrique du Nord, d’Afrique subsaharienne et du Moyen-Orient, et pourra facilement faire augmenter sa part de marché dans ces régions pour remplacer une partie des exportations en berne de l’UE », affirme le rapport.
Au total, selon l’USDA, 72 millions de tonnes de blé seront récoltées cette année en Russie. Le ministère russe de l’Agriculture table sur 73 millions de tonnes de blé, car cette institution prend aussi en compte la moisson récoltée en Crimée.
« Pour la deuxième année consécutive, la Russie bat son propre record historique d’exportation de céréales », a déclaré à RBTH Arkady Zlochevski, président de l’Union céréalière de Russie. Selon le ministère de l’Agriculture russe, la Russie avait exporté un record de 34 millions de tonnes de céréales durant la dernière année agricole, y compris 25 millions de tonnes de blé. « Cette année, la Russie devrait vendre de 37 à 40 millions de tonnes de céréales », commente M. Zlochevski.
La Russie n’est pas le seul pays à enregistrer des moissons record cette année. Les leaders agricoles incluent l’Australie, le Canada, le Kazakhstan, l’Ukraine et les Etats-Unis, selon le rapport de l’USDA. « Cette production record de blé a entraîné la chute des prix sur le marché international », explique Arkady Zlochevski.
Principales entraves
Les prix bas empêchent les exportateurs de blé de réaliser un bénéfice record. Du 1er juin au 26 août 2016, selon l’Union nationale des producteurs de céréales, le prix du blé de 4ème classe (principale catégorie à l’exportation) a baissé de 33%, à 138$ la tonne. « La croissance de la demande ne suit pas la croissance de la production, il y a donc un risque certain de ne pas parvenir à vendre tout le volume prévu pour l’exportation », s’inquiète M. Zlochevski.
En plus des prix bas, l’exportation de blé est freinée par la politique limitative introduite en Russie en 2014. « À cause de la chute du rouble, l’exportation est devenue très attractive. Pour empêcher une hausse des exportations et du prix du blé et du pain sur le marché intérieur, le gouvernement a introduit une taxe à l’exportation sur le blé », explique Natalia Chagaïda, du Centre de politique agricole de l’Académie russe de l'économie nationale.
Ces mesures restrictives dans un contexte de baisse du cours du rouble ont placé les producteurs en difficulté en réduisant leurs revenus. « Les agriculteurs ont été forcés de dépenser plus en carburant, pesticides, technologies importées, car tout ceci avait suivi les variations du cours de la devise nationale », explique Natalia Chagaïda.
De plus, la taxe a poussé les exportateurs à passer à des contrats à court terme (moins de 2 ou 3 mois) et à cesser de constituer des réserves, ce qui se répercute également sur les prix du blé, ajoute M. Zlochevsky.
Craignant une baisse des ventes, le ministère russe de l’Agriculture a demandé le 1er août 2016 au gouvernement d’annuler la taxe à l’exportation du blé. Cependant, le gouvernement n’a pas encore répondu à la demande du ministère.
« À l’heure actuelle, le cours du rouble s’est stabilisé, ce qui réduit le risque de flambée des prix des céréales. Par conséquent, l’annulation de la taxe serait logique et attendue », commente Mme Chagaïda.
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