Gazprom entre dans la lutte pour le marché européen

Reuters
Gazprom se lance dans une bataille pour les consommateurs européens de gaz et augmente ses ventes à l’Union européenne. Outre la Norvège, son concurrent traditionnel sur le marché européen, Gazprom devra affronter les fournisseurs de la CEI et les Etats-Unis. Qui est le mieux placé pour gagner ?

« I’ll be back » : c’est par une citation de Terminator qu’Alexandre Medvedev, vice-président de Gazprom, a commencé son discours devant les investisseurs américains. Une délégation du monopole gazier russe a rencontré les investisseurs le 1er février 2016 à New York. Selon M. Medvedev, « une grande part des financements de Gazprom » vient des Etats-Unis et la compagnie est prête à poursuivre sa collaboration avec les investisseurs américains.

Auparavant, en 2015, Gazprom avait démonstrativement annulé ses réunions à New York et à Londres, mais a fait des présentations à Hong Kong et à Singapour. Cependant, en 2016, la compagnie a repris le dialogue avec les investisseurs américains. Ces derniers voulaient principalement savoir si la compagnie russe serait capable de concurrencer le gaz naturel liquéfié (GNL) américain qui devrait prochainement arriver sur le marché européen.

Hausse des ventes

En 2015, Gazprom est parvenu à accroître sa part sur le marché européen, qui est ainsi passé de 30% à 31%. La hausse des exportations par pays se présente comme suit :

En Allemagne

+ 17%

En Italie

+ 12,6%

En France

+ 37%

En Grande-Bretagne

+ 10%

 

« Gazprom a partiellement récupéré les parts perdues par l’Algérie et la Lybie. La production africaine est en baisse, car les investissements se contractent sur fond de prix faibles et de situation politique instable. Actuellement, on y produit 30% de moins qu’il y a cinq ans », décrypte Gueorgui Vachtchenko, chef du département des opérations à la bourse russe chez Freedom Finance. Il précise que la part de Gazprom sur le marché européen a atteint son plus haut niveau en dix ans. Par ailleurs, la Norvège n’est pas en mesure d’accroître considérablement ses volumes, ajoute M. Vachtchenko.

Pourtant, les positions de Gazprom sur certains marchés européens s’affaiblissent. Ainsi, en novembre 2014, la Lituanie a ouvert un terminal dédié au gaz naturel liquéfié (GNL) norvégien à Klaipeda, ville située sur la côte est de la mer Baltique. En outre, selon le gouvernement lituanien, en 2016, la part norvégienne sur marché gazier lituanien supplantera, pour la première fois, celle de la Russie pour atteindre 50%.

Pour les experts, c’est le GNL américain qui constituera à l’avenir la principale menace pour les ventes du gaz russe en Europe. Une étude menée par la compagnie américaine Wood Mackenzie indique clairement que l’Union européenne pourrait devenir le principal acheteur du GNL américain. Pis, d’ici 2020, jusque 55% du GNL américain, soit 32 millions de tonnes par ans, seraient exportés en Europe, ont déclaré les représentants de la compagnie à l’agence Bloomberg.

Concurrence avec le GNL

En janvier 2016, le pétrolier Energy Atlantic devait quitter le terminal Sabine Pass, situé dans l’Etat de Louisiane, pour livrer son premier lot de GNL en Europe. Cependant, pour des raisons techniques, la livraison a été repoussée à fin février-début mars 2016. La majeure partie de ce gaz, 3,5 millions de tonnes, a été affrétée par la compagnie britannique BG Group. Outre Sabine Pass, quatre nouveaux terminaux GNL devraient être prochainement mis en service aux Etats-Unis.

Pour le moment, Gazprom ne craint pas la concurrence du GNL américain. Selon les études de la compagnie, le GNL américain revient actuellement plus cher aux consommateurs que le gaz russe livré par les gazoducs. « Le coût total du GNL américain en 2016 est supérieur aux prix des hubs européens. Le prix comprend le transport aux Etats-Unis, la liquéfaction, le transport maritime et la regazéification en Grande-Bretagne », indique Gazprom dans sa présentation aux investisseurs.

Les faibles prix du gaz sont également un atout pour la compagnie russe. Actuellement, Gazprom envisage une baisse éventuelle du prix moyen du gaz vendu à l’Europe : le tarif pourrait passer de 199 dollars, le chiffre inscrit dans le budget de la compagnie, à 169 dollars pour 1 000 m3. À titre de comparaison, le géant russe vendait en 2015 son gaz aux pays d’Europe occidentale au prix moyen de 243 dollars les 1 000 m3.

Selon l’analyste de Premier Serguei Ilyine, « les faibles prix du gaz sont un avantage pour Gazprom, car ses coûts sont inférieurs à ceux du GNL » : l’acheminement du GNL est plus onéreux que le transport par gazoducs. Ainsi, la compagnie russe peut baisser ses prix sans trop de peine. Cependant, en cas de hausse des prix, le monopole russe perdra cet avantage. Le prix du gaz est rattaché à celui du pétrole et, en période de prix élevés des hydrocarbures, la consommation du gaz en Europe a chuté de près de 50 milliards de m3 en raison de la concurrence avec le charbon.

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