Russie, États-Unis: dialogue de sourds dans le ciel syrien

Un Su-35 dans la ville de Lattaquié, Syrie.

Un Su-35 dans la ville de Lattaquié, Syrie.

Valery Sharifuline / TASS
Les pilotes américains se plaignent des difficultés créées par les pilotes russes en Syrie : ils effectuent des manœuvres dangereuses près des appareils de l’Otan, ne réagissent pas aux appels radio et forcent les Américains à éviter des collisions en vol. Selon des experts, les pilotes russes ne parlent majoritairement pas anglais, et de tels incidents pourraient être évités si le Pentagone décidait de coopérer totalement avec le ministère russe de la Défense.

Les pilotes russes compliquent l’activité de l’aviation américaine en Syrie, a déploré Charles Corcorian, commandant du 380ème Groupe aérien expéditionnaire au Wall Street Journal

« Les pilotes russes ne réagissent que rarement aux appels à s’identifier, ou bien ne réagissent pas du tout. Ils changent brutalement de cap ou n’en changent pas du tout. Nous évitons les collisions. Nous ne savons pas ce qu’ils voient et ne voient pas et nous ne voulons pas qu’ils percutent l’un des nôtres », a déclaré l’officier américain (citation traduite par l’agence TASS d’après The Wall Street Journal).

Incidents aériens

Les incidents décrits par Corcorian au Wall Street Journal se sont produits vers le milieu de l’année dernière.

Selon lui, des chasseurs russes et américains ont failli entrer en collision dans le ciel syrien pendant la nuit. L’équipage d’un Su-35 russe n’a pas réagi aux signaux d’un appareil de l’Otan, envoyés sur une fréquence radio d’urgence utilisée par les pilotes du monde entier en cas d’incident.

Finalement, les avions ont évité la collision de justesse, et le chasseur russe est passé sous le nez de l’américain, créant des turbulences et désorientant son électronique embarquée.

Selon Corcorian, les pilotes russes n’ont brisé qu’une seule fois leur silence, lorsqu’ils ont été contactés par une jeune femme contrôleuse aérienne depuis une base aérienne américaine.

Les pilotes russes ont marqué une courte pause et répondu dans un mauvais anglais avec un fort accent russe : « Vous avez une jolie voie lady. Bonsoir. ».

Le colonel de réserve et expert militaire de l’agence TASS Viktor Litovkine a déclaré à RBTH que les pilotes russes ne parlent pas anglais et comprennent pas ce que leur disent les Américains lorsqu’ils s’efforcent d’établir le contact dans les airs. La question pourrait être résolue par une coopération plus poussée entre le ministère russe de la Défense et le Pentagone dans la lutte contre les combattants de l’EI en Syrie et au nord de l’Irak.

« Le commandement pourrait coordonner les actions et assigner des missions précises aux pilotes sur chaque front de la guerre contre les terroristes », souligne l’expert.

Des mécanismes pour éviter les incidents

Les deux parties ont conclu un mémorandum le 20 octobre 2015 afin d’éviter tout malentendu dans le ciel syrien.

Selon le Wall Street Journal, ce document a créé pour les pilotes américains une nouvelle « règle de trois » :

  • maintenir une distance de trois milles marins (environ 5,5km) avec les avions russes ;
  • se trouver au moins un kilomètre plus haut ou plus bas que les avions russes ;
  • si les avions sont plus proches, se déplacer soi-même pour respecter les distances données.

De plus, les Américains ont affecté un officier russophone de leur base aérienne au Qatar à la coopération avec les forces aériennes russes et à la prévention des incidents.

Pavel Zolotarev, général-major à la retraite et vice-directeur de l’Institut des États-Unis et du Canada de l’Académie russe des sciences a confirmé cette information à RBTH. Cependant, selon l’expert, ces discussions ne sont pas permanentes.

« Nous n’avons pas de +hotline+ avec les Américains. Cela a causé une tragédie en septembre 2016, lorsque près de 60 soldats de l’armée syrienne ont été tués par un bombardier américain à Deir Ez-Zor. Nous n’avions alors pas pu contacter nos partenaires américains : la personne n’était tout simplement pas à son poste », ajoute Konovalov.

Tous les efforts de l’ancien secrétaire d’État américain John Kerry et du ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov furent alors réduits à néant, et la coopération russo-américaine en Syrie a été abandonnée.

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