Borodino, musée d'une bataille historique

Crédit photos : Elena Potchetova

Crédit photos : Elena Potchetova

Un musée rénové relance le débat sur la célèbre bataille qui ouvrit la voie de Moscou... et scella le destin de la Grande Armée de Napoléon

La fresque réalisée par le peintre Franz Roubaud en 1902 détaille toute l’ampleur de la confrontation qui porte aussi le nom de bataille de la Moskova et qui, comme le panorama mural en forme de boucle, semble sans issue concrète. Le musée, construit en 1962 et tout récemment rénové, offre aux visiteurs une vision de  « Borodino » qui fait revivre l’histoire et relance le débat : 200 ans après le combat, la question du vainqueur et du vaincu est loin d’être résolue.

Dans le musée, les avis fusent. Romain, un jeune Suisse romand venu en Russie avec son grand-père Sylvestre, est sceptique : « Ils présentent ça comme une grande victoire… Ce n’est pas tout à fait ce qu’on a appris à l’école ».  Pour Sylvestre, il s’agit surtout d’une « grande boucherie ». En effet les pertes humaines sont estimées  à environ 30 000 morts du côté français (sur 130 000 soldats) et à près de 45 000 du côté russe (sur 112 000 combattants).

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Au soir du 7 septembre, les deux armées revendiquent la victoire. Car d’un côté, la bataille de la Moskova ouvre la voie de Moscou que Napoléon prend le 14 septembre, mais le repli de l’armée russe permet à cette dernière de contre-attaquer quelques semaines plus tard et de faire reculer la Grande Armée. « Au final, c’est le maréchal Hiver qui l’a emporté », conclut Sylvestre, imputant au froid l’échec ultime de Napoléon concrétisé par la désastreuse retraite de Russie.

Un guide du musée insuffle aux enfants des valeurs patriotiques, en s’arrêtant devant de flamboyants costumes que l’armée russe portait en 1812. « Eh bien, les enfants, vous préférez notre armée ou l’armée française ? ». « La nôtre ! », répondent les jeunes en chœur. 

La fresque retraçant l’épique bataille est elle-même gigantesque (15 mètres sur 115). Commandée par le tsar Nicolas II pour le centenaire de la bataille, elle a été réalisée en neuf mois. Le peintre, Franz Roubaud (1856–1928), né à Odessa dans la famille d’un commerçant français, s’est toujours revendiqué  « artiste russe peignant des tableaux russes ». « La bataille de Borodino », son troisième panorama, est considéré comme l’apogée de son œuvre. Les origines de Roubaud ne sont pas la seule chose qui lie cette fresque à la France. En effet, le gouvernement de Nicolas II, pour ne pas raviver de vieilles querelles avec la France, demande à Roubaud de s’inspirer du panorama « La bataille de la Moskova » du peintre français Jean-Charles Langlois.

La biographie de Franz Roubaud (signée O. Fedorova) affirme que le but de l’ œuvre de Roubaud était de montrer « l’esprit du combattant russe », tandis que celle de Langlois dépeignait « la force des Français »La récente modernisation du musée inclut des écrans tactiles aidant le visiteur à identifier les troupes, sans quoi, trouver Napoléon (qui est sur sa monture) ou Koutouzov (qui est à pied) reviendrait à chercher une aiguille dans une botte de foin.

Devant la partie du panorama représentant un régiment polonais, deux visiteurs français se sont arrêtés. Bernard et Véronique sont à Moscou pour la reconstitution de Borodino. Celle-ci se déroule chaque année en septembre sur les lieux de l’affrontement avec cavaliers en costumes d’époque. Les deux Français monteront des chevaux russes afin de jouer le rôle des cavaliers-lanciers polonais, engagés par Napoléon dès 1807.

Ces deux cavaliers-acteurs en ces années de bicentenaires des victoires et défaites napoléoniennes passent leur temps sur des champs de bataille à rejouer l’histoire. Durant le combat fictif, la question du vainqueur et du vaincu n’est plus d’actualité ; seule compte la commémoration de la vaillance des combattants russes et français. 

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