Iouri Bachmet: «Il faut faire de Sotchi la capitale culturelle de la Russie»

Yuri Bashmet and Chamber Orchestra Soloists of Moscow in Sochi.

Yuri Bashmet and Chamber Orchestra Soloists of Moscow in Sochi.

Alexei Molchanovsky / Press photo
Alors que le 10e Festival international des arts d’hiver bat son plein sur les côtes russes de la mer Noire, RBTH a rencontré son directeur artistique, le célèbre altiste Iouri Bachmet.

Iouri Bachmet à Sotchi. Crédit : Alexeï Molchanovsky / Photo de presseIouri Bachmet à Sotchi. Crédit : Alexeï Molchanovsky / Photo de presse

Voilà déjà dix ans d’affilée que la ville de Sotchi, au sud de la Russie, accueille le Festival international des arts d’hiver, inspiré et fondé par le légendaire chef d’orchestre et altiste Iouri Bachmet avant même que la cité  n’eût été sélectionnée pour organiser les Jeux olympiques d’hiver 2014. Anatoly Pakhomov, le maire de la ville, est très reconnaissant à Iouri Bachmet, qui a selon lui « ressuscité la ville après une longue hibernation et lancé les olympiades culturelles de Sotchi ».

Cette année, le festival de Sotchi a préparé un programme regroupant les meilleurs spectacles de ces dix dernières années, mais présentera également plusieurs premières mondiales, de la musique classique au jazz et au rock, avec des concerts à la fois à Sotchi et, pour la première fois, dans une nouvelle salle de concert située en plein cœur du domaine skiable de Rosa Khoutor.

Parmi les invités du festival, on trouve des musiciens reconnus dans le monde entier, tels que le violoniste italien Massimo Quarta, le pianiste finlandais Olli Mustonen, le bassoniste japonais Rie Koyama, mais aussi des stars russes : l’orchestre de chambre Les solistes de Moscou, l’orchestre symphonique d’État Novaya Rossia (La Nouvelle Russie), et le grand pianiste Denis Matsuev.

RBTH: Pourquoi avez-vous préféré Sotchi à Moscou ou d’autres villes pour votre festival ?

Iouri Bachmet: Nous venions de partir en tournée dans différents pays, et l’un des concerts avait lieu à Sotchi. Après le spectacle, la mairie m’a contacté. Ils ont dit que le concert avait été un grand succès et voulaient savoir si je pouvais donner plusieurs concerts la fois suivante. Donc, l’année d’après, nous avons donné trois concerts, et ils ont eux aussi été couronnés de succès. Alors nous avons commencé à organiser un festival de plus en plus grand.

Quels sont les positions artistiques que vous vouliez exprimer avec cette édition du festival ? Est-ce vous qui avez composé l’ensemble du programme ? Quels étaient ses idées principales ?

Oui, c’est moi qui ai élaboré le programme. Il ne suffit pas de faire dix concerts en dix jours pour pouvoir appeler cela un festival, il faut un visage et une idée : nous sommes un festival de la culture, nous pouvons faire des choses très différentes. J’avais l’idée de combiner différents genres pour créer un nouveau type de spectacle. Par exemple, tout le monde n’est pas capable d’écouter un opéra entier de bout en bout.

Iouri Bachmet avec l&rsquo;acteur russe Konstantin Khabenski lors d&#39;une performance Ne quitte pas ta plan&egrave;te&nbsp;bas&eacute;e sur Le Petit Prince&nbsp;&agrave; Sotchi.nCr&eacute;dit : Alexe&iuml; Molchanovsky / Photo de presse<p>Iouri Bachmet avec l&rsquo;acteur russe Konstantin Khabenski lors d&#39;une performance <em>Ne quitte pas ta plan&egrave;te</em>&nbsp;bas&eacute;e sur <em>Le Petit Prince</em>&nbsp;&agrave; Sotchi.</p>n
Iouri Bachmet dirige&nbsp;l&rsquo;orchestre de chambre Les solistes de Moscou au cours de la 10&egrave;me &eacute;dition du Festival international des arts d&rsquo;hiver &agrave; Sotchi.nCr&eacute;dit : Alexe&iuml; Molchanovsky / Photo de presse<p>Iouri Bachmet dirige&nbsp;l&rsquo;orchestre de chambre Les solistes de Moscou au cours de la 10&egrave;me &eacute;dition du Festival international des arts d&rsquo;hiver &agrave; Sotchi.</p>n
 
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C’est ainsi que nous avons créé un spectacle basé sur Eugène Onéguine. C’est un poème magnifique écrit par Pouchkine, les acteurs lisent le texte original pendant trois ou quatre minutes pour que les spectateurs comprennent qui sont les personnages, qui a tué qui et ce qui se passe d’une manière générale. Ensuite, ils écoutent les arias de l’opéra original : c’est facile à écouter, et le spectacle est beaucoup plus court.

Avec Carmen, je voulais aller plus loin : nous avons combiné l’opéra, l’art dramatique et le ballet. Le thème du festival est la combinaison de genres complètement différents. Nous avons aussi du jazz, car j’aime beaucoup le jazz, et du rock car j’ai moi-même joué dans un groupe de rock.

À part la musique, où puisez-vous votre inspiration ?

De beaucoup de choses : la nature, la beauté, la vie elle-même, qui est le meilleur des livres. Si vous regardez autour de vous avec attention, vous avez beaucoup à apprendre de la vie. Parfois, nous agissons comme si nous étions en pilotage automatique, et nous ne voyons pas ce qui se trouve autour de nous. Mais quand mes yeux sont ouverts, je me sens heureux. Sotchi est un mélange de cultures et de traditions diverses, à la frontière de l’Abkhazie (ancienne république géorgienne située dans le Caucase, ndlr). D’une manière générale, la côte de la mer

Noire abrite de très nombreuses ethnies. Votre festival reflète-t-il ce mélange ?

Lors de mon premier voyage au Japon, il y a des années, j’étais sous le choc ! Là-bas, on peut entendre partout du Mozart et beaucoup de Tchaïkovski. Et j’ai joué pour les Japonais des morceaux du compositeur chinois Tan Dun qui ont été bien accueillis. Ici, à Sotchi, de nombreuses ethnies coexistent : arméniens, géorgiens, ossètes… Ils ont leur propre culture, mais quand ils font partie du public tout cela n’a pas n’importance : ce qui unit les gens, c’est le rire, la colère, la vérité, le mensonge. La musique classique parle aux gens.

 Crédit : Alexeï Molchanovsky / Photo de presse Crédit : Alexeï Molchanovsky / Photo de presse

Vous savez, en Europe, quand vous êtes en tournée en Allemagne et que vous vous rapprochez de la France, les noms des villes deviennent de plus en plus français, puis quand vous passez de la France à l’Italie, de plus en plus italiens. Ces frontières n’existent que sur le papier.

Vous avez donné des concerts dans le monde entier. Quelle est votre salle de concert préférée ?

C’est difficile à dire, comment choisir une salle préférée ? Quand j’ai joué le premier solo de viole de l’histoire au Conservatoire de Moscou, je m’étais beaucoup préparé et j’ai finalement pu le jouer, malgré tous ceux qui me disaient que la viole n’est pas un instrument pouvant être joué en solo. J’étais inquiet, je craignais que personne ne vienne au concert. Mais finalement, cela a été un franc succès, et j’ai pu rejouer un autre concert un an plus tard, puis un autre l’année d’après.

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