La statue de Levcha, personnage littéraire qui parvint à mettre des fers à une puce, devant le musée des armes de Toula.
Lori/Legion MediaAvec près de mille ans d’histoire, Toula est l’une des plus célèbres villes d’artisanat russe. A moins de 200 km de Moscou, c’est ici que se trouve Iasnaïa Poliana, domaine où l’écrivain Léon Tolstoï naquit et où il vécut l’essentiel de sa vie. La ville ne compte que 500 000 habitants. Le temps y passe lentement : tout autour, vous trouverez de vieilles maisons de marchands, des enseignes simples et fades, et des immeubles de cinq étages maximum.
Toula est célèbre comme la capitale des armuriers russes. Un monument spécial vous accueille devant le musée des armes de Toula – celui du maître Levcha qui parvint à mettre des fers à une puce mécanique anglaise. C’est un personnage littéraire, mais selon certains historiens, il avait un modèle réel.
Cette année, l’usine d’armes de Toula fête son 137e anniversaire. C’est l’une des plus grandes entreprises du complexe militaro-industriel russe. L’usine a déjà connu 40 dynasties d’ouvriers. Pendant la Seconde Guerre mondiale, la manufacture fabriquait des armes pour le front : la légendaire mitrailleuse Maxime, la mitrailleuse pour avions ShKAS, des canons aériens et des mortiers.
Le complexe antiaérien Palma. Crédit : Edouard Bazhatkov
Aujourd’hui, la manufacture fabrique notamment les complexes antiaériens Kashtan et Palma, ainsi que le système antiaérien Pantsir S-1. Ces machines sont actuellement déployées en Syrie autour de la base aérienne de Hmeimim. Au total, la manufacture de Toula a fourni cette année 11 types d’armes pour l’opération syrienne.
Par ailleurs, la manufacture a récemment fabriqué 15 luges de hockey sur luge paralympique. Auparavant, il fallait les commander au Canada. Les nouvelles luges sont finalement plus résistantes et plus légères.
Le système antiaérien Pantsir S-1. Crédit : Edouard Bazhatkov
Le Kremlin de Toula se trouve dans le centre-ville. En 500 ans d’histoire, ses murs se sont affaissés de 3 mètres. La flèche est ornée d’un symbole du folklore russe, l’oiseau Gamaïoun. La cathédrale dorée de l’Assomption et son clocher trônent au cœur du complexe. Un peu plus loin, on trouve des galeries marchandes où les habitants présentent leurs produits : pain d’épice, guimauve à la pomme et samovars.
Crédit : Edouard Bazhatkov
Aujourd’hui, les quatre fabriques de pain d’épice produisent jusqu’à 7 tonnes de pain d’épice par jour. Elles n’emploient que des femmes, comme le veut la tradition. La technologie est tenue secrète.
Fin XIXe - début XXe, le pain d’épice de Toula remportait régulièrement des médailles aux foires de Leipzig, Paris, Londres et Rome. Les locaux disent qu’un jour, un marchand débrouillard décida de lancer la production dans la capitale française. Il avait beau essayer, ses pains d’épice n’étaient pas les mêmes qu’à Toula.
Il importait son blé et même l’eau de Toula, la recette était scrupuleusement respectée : en vain. Le marchand décida alors que l’air local était un élément crucial pour la préparation du pain d’épice de Toula.
Le pain d’épice de Toula, même industriel, est fabriqué à l’ancienne, avec des planches spéciales, en bois mou - du poirier ou du tilleul. La planche est soigneusement huilée, on y dépose la moitié de la pâte, puis de la gelée ou de la confiture de lait, puis on la recouvre d’une deuxième planche. Les figures ainsi obtenues sont cuites au four pendant 10 à 15 minutes, puis recouvertes de glaçage en sucre.
Début avril, Toula a accueilli une étape de Startup Tour, la Tournée panrusse des startups, organisé par Skolkovo dans le but d’identifier les meilleures startups régionales russes, qui se tient aussi dans 11 villes de Russie. « Je me réjouis que le pétrole ne coûte pas 200 dollars le baril. C’est ce qui pousse la Russie à chercher des opportunités dans les secteurs des hautes technologies », ma rtèle le conseilleur du président du fonds Skolkovo, l’investisseur finnois Pekka Viliakainen, qui s’est rendu à Toula pour les sélections.
Près de 200 projets innovants ont été présentés à Toula. Parmi les concurrents, on compte 40 habitants de Toula et de nombreux projets dans le secteur informatique. Par exemple, VR Travel Lab travaille sur des projets de réalité virtuelle ou augmentée. Les lunettes de réalité augmentée, développées par la startup, peuvent être fabriquées chez soi grâce à une imprimante 3D : sur leur site, les créateurs ont publié le modèle de base qu’on peut télécharger.
Crédit : Edouard Bazhatkov
Parmi les autres projets – une canne à ultrason pour malvoyants, des lingettes humides cicatrisantes, une station de recharge pour voitures électriques alimentée par des sources d’énergie renouvelable, et même des vaccins éternels pour animaux – le vaccin est transmis de génération en génération.
« Imaginez, vous faites un vaccin à l’hôpital, puis vous rentrez chez vous et votre famille est vaccinée automatiquement. Les virus passent d’un animal à l’autre, alors nous les utilisons comme vecteur de transmission pour vacciner le cheptel », nous explique Alexandre Molodovkine, concepteur du projet Vaccin éternel, originaire de la ville de Pokrov (105 km de Moscou).
Au total, plus de 500 participants du District fédéral du Centre ont pris part à l’étape de sélection à Toula. 15 projets ont été sélectionnés pour participer à la finale de Startup Village, qui se tiendra à Moscou en juin.
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