Le YotaPhone : russe et innovant

L’écran e-ink du YotaPhone peut aussi servir à d’autres tâches : lire des messages SMS, suivre son fil d’actualités sur Facebook, consulter des cartes, chercher des informations, etc. Source : www.yotaphone.com

L’écran e-ink du YotaPhone peut aussi servir à d’autres tâches : lire des messages SMS, suivre son fil d’actualités sur Facebook, consulter des cartes, chercher des informations, etc. Source : www.yotaphone.com

Le téléphone d’une entreprise russe encore inconnue a gagné le prix du « meilleur appareil électronique grand public » au Consumer Electronics Show de CNET.com. Même s’il n’est pas encore disponible à la vente, ce mobile se démarque déjà de ses concurrents grâce à ses deux écrans. En décernant la récompense, CNET.com a indiqué que cette spécificité permettait à l’utilisateur de tirer « le meilleur de deux mondes ».

Le YotaPhone est basé sur une idée originale et un peu folle : placer deux écrans sur un appareil, l’un destiné au e-ink et usant peu de batterie afin de lire des livres ou des longs articles, et l’autre LCD entièrement en couleur pour regarder des émissions télévisées ou parcourir des albums photos.

Tous les smartphones étant plus ou moins similaires en ce qui concerne la lecture, la taille et la qualité de l’écran sont des éléments importants. Et le YotaPhone bénéficie d’un avantage clair dans ce domaine. Lorsque l’utilisateur se sert de l’écran e-ink, ses yeux se fatiguent évidemment, mais le texte est d’aussi bonne qualité que s’il avait été imprimé sur papier.   

L’écran e-ink du YotaPhone peut aussi servir à d’autres tâches : lire des messages SMS, suivre son fil d’actualités sur Facebook, consulter des cartes, chercher des informations, etc. Et un tas d’applications sont adaptées au e-ink. De plus, si la batterie de l’écran couleur du YotaPhone devient faible après 24 ou 36 heures d’utilisation active (comme n’importe quel autre smartphone), le e-ink peut le remplacer. Un YotaPhone entièrement chargé peut ainsi tenir plusieurs journées entières. 

L’appareil russe est un Android Jelly Bean de 139 grammes et d’un centimètre d’épaisseur disposant du processeur dual-core Snapdragon 1,5 G conçu par Qualcomm. Il est doté du « Long Term Evolution » de quatrième génération et de la communication en champ proche intégrée. Le YotaPhone possède une mémoire active de 2 GB et une mémoire vive de 32 à 64 GB qui permet de sauvegarder des données. Le principal écran couleur mesure 10,9 centimètres et offre une résolution de 1280 x 720 pixels, alors que le second a la même taille. En plus des deux moniteurs, le YotaPhone propose également un système unique de contrôle gestuel de la navigation.

Le YotaPhone est fabriqué par Yota Devices, entreprise privée installée à Moscou et Saint-Pétersbourg. Il a été développé pendant deux ans par une équipe de cinquante personnes, composée notamment d’anciens ingénieurs de Nokia et RIM (fabriquant du Blackberry), ainsi que d’authentiques talents russes.

Durant le Consumer Electronics Show (CES) en janvier dernier, CNET a décerné au Yotaphone le prix du « meilleur appareil électrique grand public » dans la catégorie des téléphones portables. Le CES, qui se déroule chaque année à Las Vegas, est le principal forum international dans le secteur des dernières technologies grand public. L’exposition attire près de 150 mille visiteurs pour environ trois mille vendeurs, couvrant des domaines aussi divers que la télévision, les home cinémas, les équipements audio, les appareils photographiques, l’électronique automobile, la domotique, les téléphones mobiles ou les tablettes Internet.

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« Lors du salon de Las Vegas, nous avons pour la première fois présenté notre projet à un large public », explique Vladislav Martynov, directeur général et fondateur de Yota Devices. « Je suis extrêmement satisfait car il semble vraiment plaire aux gens ».

On peut dire que l’entreprise a eu un peu de chance au CES. Il est en effet de plus en plus fréquent que les grandes entreprises choisissent de ne pas montrer leurs meilleurs produits lors d’expositions, préférant le faire de leur côté à l’approche de la haute saison. Le YotaPhone n’avait donc virtuellement aucun concurrent cette année. Les seuls autres produits intéressants appartenaient à Sony, mais ce dernier n’a exposé que des smartphones classiques alors que le YotaPhone proposait un format complètement nouveau et expérimental.

« Le secteur des smartphones n’est pas très innovant ces dernières années », indique Martynov. « Il possède toutefois une grande marge de progression. De notre côté, nous nous concentrons sur le ressenti de l’utilisateur en visant à améliorer cet aspect ».

Interrogé sur le fait que son produit avait remporté le prix sans avoir été présenté durant le salon, Martynov précise que l’entreprise avait arrangé une série d’entretiens avec la presse le premier jour et que le mot s’était répandu comme une traînée de poudre par la suite.

Yota souhaite être distribué dans le monde entier et travaille déjà sur un produit de seconde génération avec ce que Martynov décrit comme « des nouvelles technologies plutôt intéressantes ». L’entreprise n’exclut pas les marques blanches (c’est-à-dire passer par un revendeur) à l’étranger, mais gardera la marque YotaPhone en Russie.

La véritable question est de savoir si le premier smartphone russe pourra gagner le cœur des consommateurs russes et étrangers.

« C’est une bonne idée. J’ai hâte ! » ; « ça a l’air génial. J’y jetterai sûrement un œil » ; « je le veux, je ne peux plus attendre! »,sont les types de commentaires que YotaPhone reçoit sur les plus grands sites Internet anglophones destinés aux fans de technologies de l’information et de gadgets.Les commentaires des consommateurs russes sont cela dit différents : « je l’ai vu : il est de mauvaise qualité, vieillot et un peu "cheap" »; « pourquoi ne pas ajouter un taille-crayon, ça le rendrait vraiment chouette », « le design est ridicule, tout comme son prix », « je ne comprends personnellement pas ce qui est supposé être russe là-dedans ». 

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Bien sûr, les consommateurs anglophones ne sont pas tous unanimes au sujet du YotaPhone, tout comme les fans de technologies russes n’ont pas que des choses négatives à dire. Ces commentaires semblent néanmoins illustrer la tendance générale. Il faut également souligner que les Russes n’ont pas de préjugés envers le YotaPhone juste parce qu’il s’agit d’un produit russe. 

Il y a deux ans, Sergueï Tchemezov, directeur général de l’entreprise publique Russian Technologies, avait présenté le modèle d’un nouvel « iPhone killer » au président de l’époque Dmitri Medvedev. Une courte vidéo de la rencontre s’est immédiatement propagée sur le Web : les internautes ont ri et discuté du dernier gadget russe, l’événement ayant accouché d’une souris devant le président et l’ensemble du pays. Il était visiblement à l’image des industries russes, incapables de créer quelque chose d’innovant et n’achetant que des produits finis en Chine ou à Taiwan.

L’annonce prématurée du lancement d’un prototype dépassé a provoqué en Russie une vague de critiques à l’encontre du YotaPhone, et ce scepticisme n’était pas infondé. Il y a deux ans, on montrait au président Medvedev une pièce en plastique au design étrange et rudimentaire en lui disant qu’elle « aurait également deux écrans ». Cela a terni la confiance des gens en ce produit, empêchant ainsi l’entreprise Skartel (qui commercialise la marque Yota) d’espérer attirer des investisseurs sérieux en Russie. La seule solution pour le groupe était de solliciter l’aide de l’État. Dans le même temps, Skartel (les développeurs se sont depuis séparés de l’entreprise et portent le nom de Yota Devices) ont essayé de rendre leur modèle plus fonctionnel, et ce afin de prouver qu’il n’était simplement un sujet de railleries. Et à la surprise générale, la société y est parvenue.

Le YotaPhone n’est évidemment pas la solution ultime : nous n’avons pas tous besoin d’un smartphone avec deux écrans. Quoi qu’il en soit, le produit a un gros potentiel, et pourrait faire figure de pionnier parmi les nouveaux smartphones tout en servant de modèle, à l’instar de la reconnaissance vocale, des smartphones QWERTY ou de beaucoup d’autres produits en leur temps. Le YotaPhone est intéressant et inhabituel, et les arguments de vente ne seront pas difficiles à trouver. La demande est en effet importante. Les gens voudront toujours lire des livres et surfer sur le Web. Cela sera désormais possible grâce à un écran spécialement conçu pour rendre la lecture facile et confortable pour les yeux, le tout alimenté par une batterie longue durée.  

Yota Devices prévoit de lancer la vente de ses appareils en Russie au troisième trimestre 2013, vers septembre. Le prix initial est fixé à 490 euros. Les représentants de l’entreprise soulignent que leur objectif n’est pas de fabriquer et de vendre le plus d’appareils possible pour réaliser des profits immédiats, mais de développer le produit afin de maximiser son potentiel. Le groupe désire observer la réaction des consommateurs réels en vue d’apporter des améliorations. Yota Devices souhaite ainsi avant tout démontrer que ce concept a du sens en créant un produit achevé et sans défauts. 

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