La princesse qui a conquis Sotchi

  Personne ne s’attendait à ce qu’Adelina décroche la médaille d’or dans l’épreuve individuelle, en dépassant ses concurrentes italienne et sud-coréenne à l’issue des deux programmes. Crédit : Photoshot / Vostock-Photo

Personne ne s’attendait à ce qu’Adelina décroche la médaille d’or dans l’épreuve individuelle, en dépassant ses concurrentes italienne et sud-coréenne à l’issue des deux programmes. Crédit : Photoshot / Vostock-Photo

Adelina Sotnikova est devenue l’une des héroïnes des Jeux olympiques de Sotchi, l’une de celles à l’origine d’une percée pour les sports d’hiver russes. Pour la première fois de l’histoire du patinage artistique féminin, la patineuse russe a remporté la médaille d’or pour le compte de la Russie. Cette victoire a d’une part déclenché une tempête de joie chez le public russe et de l’autre, suscité une vague de controverses et de débats en Occident.

Adelina Sotnikova (Moscou, 1996) n’était pas la principale favorite de l’épreuve de patinage artistique individuel à Sotchi. L’on s’attendait à ce que la médaille d’or revienne à l’athlète sud-coréenne chevronnée Kim Yu-na, (championne olympique à Vancouver en 2010), de grands espoirs avaient également été placés en l’Italienne Carolina Kostner (actuelle championne du monde), pour laquelle les Jeux olympiques constituaient le chapitre final de sa carrière. Ses deux concurrentes étaient venues à Sotchi avec l’intention de remporter la médaille d’or. L’une des principales compétitrices d’Adelina était en outre une autre patineuse artistique russe, la très jeune Ioulia Lipnitskaïa, 15 ans, révélation des JO ayant remporté l’or lors de l’épreuve par équipes.

Personne ne s’attendait à ce qu’Adelina décroche la médaille d’or dans l’épreuve individuelle, en dépassant ses concurrentes italienne et sud-coréenne à l’issue des deux programmes. Ioulia Lipnitskaïa, victime d’une chute lors d’un saut, s’est classée 5ème.

Kim Yu-na et Adelina Sotnikova ont terminé sur des scores serrés, la Russe finissant toutefois devant la Coréenne grâce à son programme plus complexe, de sauts et pirouettes plus difficiles et mieux exécutés, lesquels ont d’ailleurs fait l’objet d’analyses détaillés de la part des professionnels et des médias (le New-York Times a par exemple analysé point par point les raisons de sa victoire).

L’argent a toujours été un souci pressant pour la famille d’Adelina : sa sœur cadette Macha est née atteinte d’une maladie héréditaire grave. Adelina Sotnikova a confié dans plusieurs de ses interviews que le patinage artistique était loin d’être une passion, mais constituait pour elle plutôt un travail. Elle devait ainsi exceller dans son activité, car les possibilités de soigner sa sœur en dépendaient. Au cours des dernières années, Macha a subi trois opérations très coûteuses en Allemagne, au terme desquelles les médecins ont prévenu la famille qu’ils n’étaient pas en mesure de prévoir combien de fois la jeune fille devrait encore passer par la table d’opération.

Adelina est ensuite tombée amoureuse du patinage artistique. Elle a réalisé qu’elle ne pouvait s’imaginer vivre sans pratiquer ce sport. Répondant à Sotchi à des journalistes  cherchant à savoir ce qui la poussait à travailler de manière aussi obsessionnelle et à atteindre ses objectifs, cette dernière a déclaré : « Ma famille. Tout ce que je fais, je le fais pour mes proches que j’aime profondément. Je voulais que mon père, ma mère et ma petite soeur soient fiers de moi et heureux. Cet objectif m’a beaucoup aidé, parce que je rêve de la médaille d’or olympique depuis mes 12 ans, lorsque je suis devenue championne de Russie pour la première fois ».

Le programme libre sur la musique de Saint-Saëns a mis Adelina sur la bonne voie. L’athlète semblait au départ ne pas savoir comment se tenir sur cette musique et surtout, de quelle manière lier ensemble cet enchaînement incroyablement complexe d’éléments. Le déclic s’est produit en cours de route. La musique l’a contraint à grandir et à faire appel encore et encore à ses ressources les plus profondes.

Au cours de sa dernière séance d’entraînement avant la finale, la patineuse s’est élancée sur la glace seulement revêtue de collants noirs très simples et n’a fait qu’esquisser le programme, sans réaliser les sauts. « Nous, les entraîneurs, cherchons habituellement à détecter chez les patineurs les plus petits défauts, et je me suis soudain rendu compte que la prestation d’Adelina était parfaite, se remémore Piotr Tchernichev, le metteur en scène du programme. Je ne l’avais jamais vu aussi détendue et inspirée sur la glace. Ensuite, j’ai vraiment pris peur. J’ai réalisé que quelque chose de très important allait immanquablement  se produire dans les heures suivantes ».

Avant le début de la prestation d’Adelina, Piotr lui a confié au cours de l’échauffement : « Ne te laisse aller à aucune émotion pendant la première partie du programme. N’y pense pas. Les émotions viennent vers toi naturellement ».

L’expression « la performance de sa vie » s’applique généralement à une prestation capable de captiver n’importe quelle salle, quelles que soient les préférences nationales des supporters. Il est assez rare de voir une salle dans laquelle il n’y avait pas un seul supporter pour soutenir le couple durant le championnat se lever 22 secondes avant la fin de la musique du temps réglementaire.

Cela serait faire preuve de beaucoup de malice que de prétendre que la victoire de Sotnikova aux Jeux olympiques ait été une totale surprise pour la communauté du patinage artistique. Ce n’est pas en vain que les collègues étrangers de la finaliste se sont efforcés de collecter un peu partout des renseignements à son sujet. Mais la chose la plus importante à connaître était la suivante : Sotnikova pouvait-elle résister à la frénésie qui s’est emparée de la salle, dominer ses émotions et réaliser son programme ? Il s’est avéré que oui.   

Les critiques formulées à l’encontre de la championne et portant sur la façon dont son programme a été noté par les juges s’expliquent assez facilement : en patinage artistique individuel féminin, cela faisait très longtemps que les trois médaillés n’avaient pas toutes exécuté à la perfection leur programme long, comme cela a été le cas cette fois-ci.

Réaliser « la performance de sa vie » et constater ensuite que quelqu’un d’autre devient champion n’est jamais facile, ni pour les athlètes eux-mêmes, ni pour leurs fans. Par ailleurs, les petites imperfections ayant privé la championne du monde Carolina Kostner et la championne olympique de Vancouver Kim Yu-na de la médaille d’or étaient « invisibles » pour les non-spécialistes. Et ce même avec le protocole indiquant le détail des notes : un saut un petit peu moins élaboré que celui du vainqueur, un degré un tout petit peu moins élevé de complexité dans les pirouettes et l’enchaînement des séquences.

Les deux compétitrices d’Adelina se sont en outre montrées prudentes en limitant leur vitesse de patinage. Dans une telle situation, les juges sont toujours un petit peu plus du côté de l’athlète qui patine en se donnant entièrement.

Basé sur des articles d’Izvestia et Sport-Express

 

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