Le flux des travailleurs migrants en Russie est en baisse

Crédit : Sergueï Bobylev / TASS

Crédit : Sergueï Bobylev / TASS

Selon les statistiques du Service fédéral russe des migrations (FMS), depuis le début de l’année 2015, quelque 270 000 étrangers sont entrés en Russie : ce chiffre est en baisse de 70% par rapport à l’année précédente. La baisse a commencé dès 2014. Toutefois, pour le moment, les autorités ne s’inquiètent pas à ce sujet et estiment qu’il est trop tôt pour tirer des conclusions.

Conformément à la réforme de l’immigration, début 2015, les amendements législatifs qui imposent un examen de langue russe, un examen médical et l’obtention d’une licence de travail aux travailleurs migrants sont entrés en vigueur.

Le coût de la licence varie selon les régions. Par exemple, à Moscou, il s’agit d’un premier versement de 14 000 roubles (186 euros), puis d’un versement mensuel de 4 000 roubles (53 euros). Les nouvelles règles ne s’appliquent pas aux citoyens biélorusses et kazakhs, partenaires de la Russie au sein de la Communauté eurasiatique.

Concierges et chauffeurs

Les statistiques publiées par le FMS portent sur la première moitié du mois de janvier, une période où les personnes concernées partent souvent chez eux, pour revenir avant le début de la saison agricole et la reprise des travaux de construction au printemps.

« Nous ne verrons pas de départs de migrants dans un avenir proche, a assuré le patron du FMS Constantin Romodanovski. Ils perçoivent en Russie un salaire 5 à 10 fois plus important que dans les pays dont ils viennent ».

Nikita Mkrtchian, expert en sociologie à l’École des hautes études en sciences économiques, nous a expliqué que ces premiers chiffres ne permettent pas d’évaluer la chute future du flux migratoire. « Le FMS réunit les données pour les 10 premiers jours de l’année, puis les compare aux 10 journées de l’année précédente, alors que pour obtenir des données objectives, il faudrait avoir des statistiques sur 2-3 mois », explique-t-il.

Si le nombre de travailleurs migrants décroît considérablement, il n’est pas évident que les Russes pourront les remplacer. « Je ne suis pas certain que les Russes s’empresseront d’aller balayer les rues, et puis nous ne disposons pas de telles ressources de main-d’œuvre », explique le sociologue.

L’association d’entrepreneurs Opora Rossii a estimé que la construction, le commerce et les travaux publics sont les secteurs qui seront les plus affectés par le départ des migrants.

L’essentiel des travailleurs migrants en Russie vient de pays de l’ex-URSS : Ouzbékistan, Tadjikistan et Kirghizstan. La plupart d’entre eux nettoient les rues, travaillent sur les marchés et dans la construction, ou conduisent les transports publics. Les travailleurs migrants venus gagner de l’argent en Russie cherchent rarement à s’installer dans le pays.

Généralement, ces personnes vivent dans une très grande pricarité : dans les sous-sols, sur les chantiers de construction, sur les marchés, dans des petits appartements de location à 10-20 personnes par logement et souvent contraints à dormir à tour de rôle. Tout cela pour pouvoir envoyer un maximum d’argent dans leur pays où ces sommes permettent à plusieurs familles de vivre relativement confortablement, selon les standards locaux.

« Ce n’est pas facile d’être un migrant : il faut quitter sa famille, son mode de vie. Si les migrants d’Asie centrale peuvent habiter sur les sites ou dans les sous-sols, les Russes ne le feront pas. Et il n’y a pas de dortoirs ou d’appartements décents pour eux », explique M. Mkrtchian.

Des spécialistes chers

Le cas des spécialistes hautement qualifiés (SHQ) est légèrement différent. La principale particularité de ces spécialistes est leur salaire élevé qui doit être supérieur à 2 millions de roubles par an (26 600 euros). Romodanovski a expliqué que, cette année, ils sont également activement contrôlés car, dans certains cas, les personnes arrivant dans le pays avec des documents de SHQ ne disposent que de compétences et de rémunérations standard, et auraient donc dû demander des documents très différents.

Selon les experts, de tels spécialistes viennent essentiellement d’Europe et des Etats-Unis, mais les statistiques ont subitement surpris les agents. En 11 mois de l’année 2014, le plus grand nombre de spécialistes hautement qualifiés sont arrivés des pays d’Asie-Pacifique, nous a annoncé le service de presse du FMS.

Par conséquent, pour prévenir ces situations, à partir de mars 2015, les sanctions contre les organisations embauchant des étrangers et coupables de telles violations seront renforcées. En cas de violations, elles perdront le droit d’exercer ces activités pendant 2 ans.

En 2015, les SHQ seront également soumis à une série de modifications : les frais d’octroi de l’autorisation de travail passeront de 2 000 à 3 500 roubles (26-46 euros). Alors que le salaire minimum pour ceux qui viennent travailler dans la république de Crimée ou à Sébastopol sera abaissé à 1 million de roubles par an (13 300 euros).

Nikita Mkrtchian a expliqué que le nombre de spécialistes devrait baisser prochainement, mais que cela n’a rien avoir avec le changement de la législation. « La Russie compte peu de SHQ, quelque 15-20 000 personnes seulement, mais ce nombre pourrait diminuer en raison de la chute du rouble qui se traduit pour eux par une baisse de salaire », a-t-il conclu. 

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